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Notre regard

Sri Lanka | L’impunité, fossoyeuse de la reconstruction? [2010]

Données socio-démographiques

Capitale: Colombo
Population: 20.4 millions (UN, 2010) – Cingalais bouddhistes (74%), Tamouls hindouistes, originaires de la région Tamil en Inde (18%) et Musulmans (8%)
Langues majoritaires: cingalais, tamoul, anglais
Religions: Bouddhisme, Hindouisme, Islam, Christianisme

Les réfugiés sri-lankais en Suisse

Le 14 février 2008, le Tribunal administratif fédéral (TAF) jugeait inexigible tout renvoi dans les provinces du nord et de l’est du pays, une possibilité de refuge interne dans le Sud et la région de Colombo ne pouvant être reconnue pour les Tamouls du Sri Lanka « qu’en présence de facteurs particulièrement favorables » (famille, travail et revenu assurés). Peu après la fin de la guerre, l’OSAR appelait à renoncer à des décisions négatives pour les requérants d’asile tamouls et à proscrire tout renvoi vers le Sri Lanka, les possibilités de fuite interne étant réduites à néant (prise de position du 8 décembre 2009).

Statistiques des demandes d’asile pour le Sri Lanka en 2009

Nouvelles demandes: 782
Dossiers traités en 1ère instance: 1028; radiations = 38
Décisions positives: octroi de l’asile = 179 / admissions provisoires = 505
Décisions négatives: 174 rejets / 132 NEM (dont 124 NEM Dublin)

L’impunité, fossoyeuse de la reconstruction?

La guerre civile au Sri Lanka a duré près d’un quart de siècle. Elle est l’une des plus sanglantes et des plus longues au monde, laissant des parties de l’île dévastées et des centaines de milliers de personnes déplacées. Les violences ont fait plus de 70’000 morts, dont 20’000 pendant les 3 dernières semaines des combats, qui ont pris fin en mai 2009. Au vu de la situation, le UNHCR recommande aux Etats d’examiner de manière très précautionneuse chaque demande d’asile. Si la personne ne remplit pas les critères de reconnaissance de réfugiés selon la Convention de 1951, une autre forme de protection doit lui être attribuée. Le UNHCR recommande également qu’aucun retour ne se fasse de manière forcée, mais toujours sur une base volontaire.

UNHCR / R. CHALASANI / OCT. 2002

Dès 1956, les Tamouls sont progressivement écartés de l’administration cingalaise et font l’objet de discriminations. Ils vont se battre pour acquérir un territoire autonome dans le nord et l’est du pays, appelé l’Eelam.

Une guerre civile commence en 1983. Le groupe armé tamoul, les Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE), est le plus organisé et puissant au Sri Lanka. Il est le plus discipliné au monde. Les LTTE ont leur propre capitale, Jaðna, leurs juridictions, forces de police, terrestre et navale, et même une armée de l’air rudimentaire. La plupart des combats ont lieu dans le nord. Des attentats suicide dévastateurs sont commis à Colombo dans les années 1990.

En mai 2009, après des combats extrêmement violents et des prises d’otages de populations civiles, le gouvernement affirme que les rebelles tamouls sont écrasés et que l’armée contrôle l’ensemble du territoire.

Le Conseil de sécurité de l’ONU demande une enquête indépendante sur les crimes de guerre. L’UE menace également de rompre ses liens économiques avec le Sri Lanka. Grâce au soutien de la Chine, de l’Iran, du Pakistan et de la Libye, la mise en accusation du gouvernement sri-lankais est empêchée et dès lors celle à l’encontre du LTTE également.

Durant tout le conflit, des violations des droits humains ont été perpétrées par les LTTE comme par les forces de sécurité sri-lankaises (intimidations, enlèvements, viols, assassinats). La torture est pratiquée en dehors des zones de conflit par la police et par le bureau de l’avocat général.

Actuellement, l’état d’urgence (qui permet les arrestations arbitraires et la torture de suspects tamouls) et les dispositifs de sécurité sont maintenus. Entre trois et cinq cent mille déplacés internes vivent dans des conditions extrêmement précaires. Ils n’osent pas quitter le pays, car ils sont souvent arrêtés à l’aéroport, soupçonnés d’appartenir au LTTE.

Si les LTTE sont décimés, ils possèdent néanmoins encore d’énormes ressources financières et logistiques. Plusieurs analystes affirment que la manière dont le gouvernement a poursuivi la victoire – en ignorant les appels internationaux – peut avoir radicalisé une nouvelle génération de Tamouls, à la fois sur l’île et dans la diaspora.

ELISE SHUBS
COUNTRY INFORMATION RESEARCH CENTER (CIREC)