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Notre regard

Editorial | Ensemble

Samedi 15 juin 2002, la 23ème Journée des réfugiés sera placée cette année sous le thème de l’accueil et illustrée par le slogan «Ensemble».

«Ensemble», c’est un bel idéal. Et Dieu sait si la solitude et l’isolement pèsent souvent de tout leur poids, sur ceux que la vie a conduit sur les chemins de l’exil. Avoir perdu ses repères les plus familiers, sa maison et ses proches, est une des expériences les plus douloureuses. Malheureusement, si beaucoup de bénévoles s’efforcent d’agir auprès des réfugiés pour les aider à surmonter cette épreuve, force est de constater que notre système d’accueil ne fait qu’aggraver les choses.

Depuis qu’a été institué un système de répartition des requérants d’asile entre les cantons, jamais l’Office fédéral des réfugiés n’a voulu prendre sérieusement en compte les liens sociaux des personnes venues demander l’asile en Suisse. Bien sûr, les conjoints et leurs enfants mineurs ne sont pas séparés, mais pour le reste, les situations absurdes sont légion.

Madame M., âgée d’un peu plus d’une trentaine d’années, d’origine somalienne, est arrivée en Suisse en novembre 2001, afin de déposer une demande d’asile. Attribuée au canton du Valais, elle apprend quelques semaines plus tard que son frère réside à Genève. Ce dernier, arrivé en Suisse en octobre 1997, est gravement atteint dans sa santé physique. En effet, paralysé des membres inférieurs, il ne peut se déplacer qu’en chaise roulante, ce qui rend naturellement difficiles tous les gestes de la vie quotidienne. Au bénéfice d’un permis F, il occupe un emploi dans un atelier protégé.

Madame M. sollicite un transfert à Genève. D’une part pour vivre avec son frère qu’elle avait perdu de vue depuis plusieurs années, frère qui semble être de surcroît un des rares membres de sa famille encore vivant, mais bien sûr aussi pour l’entourer, lui rendre la vie plus facile et les actes quotidiens plus accessibles.

Cette demande a été rejetée en mai dernier pour des motifs administratifs. Les arguments d’ordre humanitaires que nous avions développés à l’appui de sa requête n’ont pas été retenus. Le Valais restera ainsi le canton d’attribution de Madame M.

Personnellement, je ne peux admettre une application de la loi aussi obtuse, dénuée du moindre esprit d’humanité. C’est à mon sens une manière tout à fait gratuite de nier les souffrances morales et physiques, vécues par les requérants venus chercher refuge chez nous. C’est leur dénier tout aussi gratuitement le droit de trouver un petit coin d’espérance, de retrouver le peu de famille qui leur reste. Et ce n’est malheureusement pas la première fois que je suis confrontée à ce genre de situation.

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