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Notre regard

Commentaire | Mariage interdit aux sans statut

Cette fois, c’est clair. Après le Conseil national, le Conseil des Etats a décidé le 25 mai que les déboutés de l’asile et les sans papiers n’auront plus le droit de se marier en Suisse. Ne sont-ils pas des hommes pour être privé de ce droit fondamental? Ceux qui ont soutenu cette interdiction, ont eu l’habileté de ne parler hypocritement que de lutte contre les mariages blancs. Mais qui s’est préoccupé de cette majorité de couples liés par une vraie relation affective, et qui ne pourront désormais plus faire célébrer leur union?

On a dit ici où là que les mariages sincères pourraient se faire dans le pays d’origine du fiancé sans statut. La belle affaire lorsqu’on vit avec un salaire de misère, et quand on connaît toutes les complications qui accompagnent la validation du mariage et l’obtention d’un visa de retour.

Mais surtout: A-t-on bien conscience qu’un requérant d’asile en cours de procédure n’a pas le droit de retourner dans son pays, et qu’il lui sera donc totalement impossible d’épouser une compatriote dont la demande d’asile a été rejetée? Ignore-t-on que nombre des déboutés ne peuvent pas rentrer dans leur pays pour s’y marier, soit qu’ils y encourent des risques que les autorités suisses n’ont pas su reconnaître, soit que leur pays d’origine refuse de les réadmettre? Pour eux aussi, le mariage deviendra formellement impossible. Ils ont pourtant souvent entre vingt et trente ans, une période où chacun crée sa famille.

Et que dire des Suisses, que les hasards de la vie auront conduits à rencontrer l’âme sœur parmi ces damnés de la terre que sont

les sans statut. Et que deviendront les enfants de l’amour dont l’un des parents risque un jour d’être brutalement expulsé? La violation de la Constitution fédérale et du droit international est évidente, quoi qu’en dise Madame Widmer-Schlumpf. Mais quel sans statut parviendra à soutenir quatre ou cinq ans de procédure pour que justice soit dite?

Yves Brutsch