Aller au contenu
Notre regard

Révision de la Loi sur la nationalité | Intégration à deux vitesses?

Le 4 mars 2011, le Conseil fédéral adoptait son message concernant la révision totale de la loi sur la nationalité, dont le projet de révision, examinée par la Commission des institutions politiques du Conseil national le 19 mai dernier. A 14 voix contre 9, le projet a été rejeté. Il partira donc au National.

Présenté comme une amélioration en raison de l’abaissement de 12 à 8 ans des années de séjour nécessaires à la naturalisation ordinaire, cette révision introduit un prolongement spectaculaire de ce délai pour les personnes relevant du domaine de l’asile. Et les plus touchés seront les jeunes titulaires de permis F (admission provisoire).

Les révisions des lois sur l’asile et sur les étrangers adoptées en 2006 semblaient pourtant avoir pris la mesure des besoins d’intégration de cette population, dont le séjour n’est provisoire que dans le texte.

Le Conseil fédéral lui adressait à l’époque un message clair: nous souhaitons vous permettre une véritable intégration en Suisse, pays où vous êtes appelés à demeurer. Aide à la formation, élargissement de l’accès au marché du travail ou droit de demander le regroupement familial sont autant d’améliorations qui ont concrétisé ce message

Aujourd’hui, le Conseil fédéral exclut cette même population de l’accès à la naturalisation. Si les années de séjour nécessaires à l’obtention du passeport à croix blanche étaient abaissées, seuls les détenteurs d’un permis C pourraient à l’avenir déposer une telle demande. A moins que leurs parents fassent preuve d’une intégration et d’un séjour suffisants pour obtenir un permis B puis C et demandent la nationalité suisse pour l’ensemble de la famille, les jeunes admis provisoires devront attendre leurs 18 ans pour obtenir individuellement ces mêmes statuts successifs, sur la base de leur intégration. Dans le meilleur des cas, ils ne pourront prétendre à la nationalité suisse avant leurs 24 ans. Dans la majorité des cas, ils devront attendre d’avoir soufflé leurs 29 bougies, même s’ils sont nés en Suisse et y ont passé la totalité de leur existence. Voilà qui fera certainement perdre leur latin, appris sur les bancs de nos écoles, à ces jeunes générations.

Marie-Claire Kunz