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ODAE romand | 4ème rapport d’observation – La Suisse au ban de la légalité?

L’Observatoire romand du droit d’asile et des étrangers a publié son 4ème rapport d’observation, mercredi 30 novembre. Le rapport propose, à partir des observations faites durant l’année écoulée, une analyse des tendances en matière d’application des lois sur l’asile et sur les étrangers.

Avec l’interdiction du mariage des personnes sans statut légal, la Suisse a franchi un nouveau cap en matière de privation des droits les plus élémentaires dans le domaine du droit des étrangers, quitte à frôler l’illégalité. La condamnation du Royaume-Uni par la Cour européenne des droits de l’homme pour avoir mis en place des mesures similaires d’interdiction du mariage, ainsi que plusieurs arrêts courageux des Tribunaux cantonaux, dont celui du Tribunal administratif vaudois à ce sujet, semblent annoncer la non-application d’une disposition discriminatoire, disproportionnée et inutile, en ce qu’elle n’ajoute rien aux dispositions déjà en vigueur pour lutter contre les mariages dits « blancs ».

Un destin similaire sera probablement réservé à l’initiative relative au renvoi des criminels étrangers. La Suisse a déjà été condamnée par la Cour européenne en raison du manque de proportionnalité prévalant dans les dispositions en vigueur. Si celles-ci deviennent davantage restrictives et systématiques, il semble alors tout à fait illusoire de penser qu’elles passeront le test de la conformité avec le droit international.

Dans le domaine du droit des étrangers, nous observons toujours des cas de personnes qui ne peuvent être régularisées, malgré de longs séjours en Suisse et une intégration exemplaire. Ces vies se font en Suisse dans l’illégalité, car ce pays ne leur reconnaît pas de place, alors que certaines personnes sont nées ici ! Elles n’y ont pas une vie, mais toute leur vie. La situation est tout aussi incongrue pour les personnes de nationalité

suisse qui ne peuvent faire venir les membres de leur famille que selon des conditions bien plus restrictives que celles dont bénéficient les citoyens européens résidant en Suisse (« Alim », « Jahara »). Une discrimination que les députés ont décidé de maintenir en septembre 2011.

Dans le domaine de l’asile, on observe la poursuite du refus des autorités d’assouplir l’application de l’accord de Dublin, dont la clause de souveraineté permettrait à la Suisse d’examiner les demandes d’asile de personnes vulnérables ayant transité dans des pays tels que l’Italie et Malte. Par ailleurs, le manque d’instruction de la part de l’Office fédéral des migrations pour établir les faits (« Aran ») et la restriction de l’accès au recours à travers l’exigence d’avances de frais rendent particulièrement difficile l’obtention du statut de réfugié (« Kofi »).

Les mesures récemment annoncées en matière d’asile passent manifestement à côté de ces questions. Leur mise en œuvre pourrait au contraire réduire davantage les possibilités de mettre en avant ses motifs d’asile et d’avoir accès à un recours effectif. Les propositions de modifications octroient en effet un rôle encore plus prépondérant aux preuves recueillies dans les Centres fédéraux d’enregistrement et de procédure, alors que nombre d’allégations requièrent du temps et l’intervention de la société civile pour être étayées (« Yeshi »).

Ce rapport vise à rappeler que derrière un débat houleux, saturé d’informations parfois erronées et de nouvelles annonces, les vies de nombreuses personnes sont touchées au quotidien par un durcissement continu.

> ODAE romand | 4ème rappport d’observation