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Notre regard

Statistiques 2012 | La face cachée des NEM Dublin

Si la Suisse a reçu plus de 28’000 nouvelles demandes d’asile en 2012, on peut affirmer qu’elle ne s’est pas beaucoup foulée à examiner les demandes de protection de ceux qui viennent frapper à sa porte. Les deux-tiers des demandes ont été écartées sans examen des motifs d’asile. Une réalité que décrit Karine Povlakic, juriste au Service d’aide juridique aux exilés (SAJE) dans notre deuxième Hors-série intitulé : Accords de réadmission – La banalisation d’une tragédie.

Examiner les chiffres (voir Tableau statistique de l’asile 2012)

En 2012, la Suisse a reçu plus de 28’000 demandes d’asile. Elle annonce en avoir traité 24’940. Sur ces 24’940 demandes « traitées », on peut déjà retrancher 14% de radiations pour cause de doublons, décès ou retrait de demandes d’asile. Puis, sur les 21’440 demandes restantes, elle a promulgué 65% non-entrées en matière, dont plus de 42% du fait que les demandeurs d’asile ont juste transité par un Etat membre de l’accord d’association Dublin. Autrement dit, la Suisse n’a examiné que 30 à 35% des demandes d’asile qu’elle prétend avoir traitées (selon que l’on tient compte ou pas des radiations).

Alors quand l’ODM parle d’un taux de reconnaissance de 11% des demandes d’asile déposées en Suisse, nous pouvons tout autant affirmer que le taux de refus de l’asile pour motifs infondés a été de moins de 16% en 2012. Ceci, alors que la loi sur l’asile est déjà, selon nous, des plus restrictive.

Autre manière de voir les choses: on peut partir des 30% de demandes examinées sur le fond (7435 demandes examinées) pour évaluer le taux de protection après examen des motifs d’asile. On arrive alors à un taux de protection de 54.2% (en 2011, il était de plus de 70%) (voir graphique)

Graphiques statistiques demandes 2012

Pourquoi ces différences de chiffes? Primo, l’admission provisoire est une reconnaissance du besoin de protection – elle n’a pas à être comptée dans les décisions négatives, comme le fait l’Office fédéral des migrations. Secundo, les décisions NEM Dublin ou pays tiers sûr, ne signifient pas que les demandeurs n’ont pas de raisons valables de demander l’asile. Elles signifient juste que la demande d’asile devrait être examinée par l’Etat tiers sûr ou l’Etat membre de l’accord de Dublin.

Or, qu’impliquent concrètement ces accords de Dublin et accords de réadmission ? Comment la Suisse envisage-t-elle la situation de personnes réfugiées vulnérables ?

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Comme le montre et le raconte Karine Povlakic, juriste au Service d’aide juridique aux exilés (SAJE), dans un article que Vivre Ensemble publie aujourd’hui sous forme de Hors-Série, la Suisse pratique uniquement une gestion administrative et automatisée des demandes d’asile, bien loin d’une « tradition humanitaire ».

« Accords de réadmission – La banalisation d’une tragédie » nous emmène sur la trace des Erythréens et des Somaliens, partant des causes de leur exil, les suivant sur leur route à travers l’Afrique, puis l’Italie, vers ce qu’ils espèrent un avenir plus sûr. Un espoir qui se heurte à l’accueil implacable de la Suisse. Et qui se traduit dans les statistiques en matière d’asile par des non-entrée en matière…

Sophie Malka

 

 

Plus d’infos

> L’article est paru dans Vivre Ensemble en février 2012. Vu son succès et son actualité, nous l’avons réédité en Hors-Série.
Vous pouvez le consulter sur notre site ou le commander.

> Tableau statistique de l’asile 2012.xlsx

> Retrouvez également notre Brochure sur les préjugés en matière d’asile

> Pour des « cas concrets », lire les fiches récentes de l’Observatoire romand du droit d’asile et des étrangers »:
Le TAF confirme le transfert en Italie de « Saba » malgré les viols qu’elle y a subis / La Suisse renonce au transfert en France d’une adolescente victime de prostitution