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Notre regard

Macédoine | A l’épreuve des frontières

Données socio-démographiques

Capitale: Skopje
Surface: 25’713 km2
Population: 2,11 millions d’habitants
Chef d’Etat: Giorge Ivanov
Chef du gouvernement: Nikola Gruevski
Langues parlées: macédonien, albanais
Religions: 67% orthodoxes, 30% musulmans, 3% autres

La Macédoine n’est pas un pays tiers sûr

Le rapport d’août 2015 du HCR est clair: «La Macédoine ne doit pas être classée comme pays tiers sûr. Dès lors le HCR recommande aux autres Etats de renoncer à un renvoi vers la Macédoine», le respect du principe de non-refoulement n’étant pas garanti. Du fait des «défaillances constatées dans le système de l’asile», amplifiées par l’importante arrivée de migrants dans le pays, la République macédonienne se trouve à la fois dans l’incapacité d’offrir une protection adéquate aux demandeurs d’asile qui la réclament, mais aussi de garantir le droit de ne pas être contraints de retourner dans un pays où leurs droits seraient bafoués, explique encore le HCR.

Selon les informations du Secrétariat d’Etat aux migrations, la Suisse ne considère pas le pays comme un «Etat tiers sûr» au sens de l’article 6a (2) lit. b LAsi. Cela signifie qu’une personne ayant transité ou séjourné dans un tel pays ne peut y être renvoyé, car elle ne pourrait y bénéficier d’une protection adéquate et qu’un risque de refoulement existe.

En revanche, la Macédoine reste dans la liste des «pays d’origine sûrs», pour ses propres citoyens, selon l’art. 6a (2) lit. a LAsi.

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Photo: Alberto Campi, 2015.

Macédoine: à l’épreuve des frontières

La Macédoine: pays de transit sur la Route des Balkans. L’étape macédonienne de la route des Balkans permet à celles et ceux qui le réussissent de gagner la Serbie puis de passer en Hongrie, pays d’entrée dans l’Union européenne. Leur but ultime est d’arriver en « Allemagne ou dans les pays scandinaves ». Le phénomène s’est accéléré ces dernières années. Le nombre de demandeurs d’asile empruntant cette route aurait quadruplé entre 2012 et 2014, passant de 5’000 à 20’000. Une hausse qui résulte en partie de la crise syrienne débutée en 2011. Provenant principalement de Syrie, d’Irak, d’Afghanistan ou de Somalie, ils seraient plus de 50’000 à avoir « (…) traversé la Macédoine entre le 1er janvier et le 1er juin 2015 ». Éviter la Méditerranée en choisissant la route terrestre et le passage par la Macédoine n’est pas sans risques. De multiples barrières et dangers entravent la route de celles et ceux qui traversent le pays: système d’asile déficient, criminalisation des réfugiés par les autorités macédoniennes, attaques par des bandes mafieuses.

Une route dangereuse, un statut précaire. Au cœur de l’actualité ces dernières semaines, la situation des migrants en Macédoine est en constante évolution. Après avoir décidé, en juin, de leur octroyer un laissez-passer de 72 heures, officiellement pour leur permettre de déposer une demande d’asile, Skopje a déclaré fin août l’état d’urgence, refoulant à sa frontière grecque des réfugiés désespérés. Avant la mi-juin 2015, les réfugiés étaient considérés comme «illégaux». Un statut les rendant vulnérables et victimes de nombreuses violations. Ils ne pouvaient emprunter les transports publics; le voyage qui mène de la frontière gréco-macédonienne à la Serbie – une distance de 250 km qui équivaut au trajet entre Genève et Bâle – s’effectuait principalement à pied ou à bicyclette. Plus de 25 personnes ont perdu la vie par le passage d’un train en 2015. Les migrants étaient aussi les proies faciles de groupes criminels et de passeurs mal intentionnés. Vols, kidnapping ou trafic d’êtres humains figurent sur la liste de leurs méfaits. Ils craignaient également la police, la détention arbitraire et les mauvais traitements. En raison de leur statut, ils ne pouvaient porter plainte, demeurant des victimes silencieuses.

72 heures pour traverser le pays. Suite à l’émotion du dernier accident de train et aux pressions de la population civile, le Parlement a adopté une loi octroyant un laissez-passer de 72 heures. Officiellement pour accéder à une procédure d’asile. Dans les faits, le document leur permet de traverser légalement le pays et d’emprunter les transports publics. Le nombre anodin de demandes d’asile enregistrées démontre que les migrants préfèrent continuer leur chemin. Cette décision a aussi entraîné la fermeture du centre de détention de Gazi Baba et a affaibli les bandes criminelles qui kidnappaient et rançonnaient les migrants.

Etat d’urgence. Entre la mi-juin et la mi-août, 41’414 laissez-passer ont été distribués selon les autorités de Skopje. Une hausse significative qui aurait conduit, selon certains observateurs, les autorités déjà dépassées à déclarer l’état d’urgence et à tenter de fermer sa frontière avec la Grèce le 20 août dernier. En effet les rapports du HCR et de plusieurs organisations déploraient déjà, malgré de récentes améliorations, une prise en charge inadéquate, un régime d’asile ineffectif et des conditions sanitaires insoutenables dans les centres d’accueil.

Luma Pillet

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