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Documentation

Les cinq plus gros mensonges de l’«Edition spéciale» de l’UDC

L’UDC a fait parvenir à tous les ménages du pays son «Edition spéciale». Celle-ci regorge de faits tronqués, voire de véritables mensonges. Lorsque des initiants sont amenés à diffuser de telles contre-vérités, ils nous apportent la preuve que quelque chose cloche avec leur propre initiative. Voici les cinq plus gros mensonges de l’«Edition spéciale».

Billet publié sur le site « 28 février: NON à l’initiative de mise en oeuvre ». Cliquez ici pour lire le billet sur le site.

Durchsetzungsinitiative1. Le mensonge du refus

« Le Conseil fédéral et le Parlement ont refusé obstinément d’appliquer la volonté du peuple. Cinq années après l’acceptation de l’initiative, on attend toujours une loi d’application efficace. » (p.1):

L’initiative sur le renvoi a été fidèlement appliquée et un ensemble de modifications législatives a été décidé par le Parlement le 20 mars 2015. C’est l’initiative de mise en œuvre qui bloque son entrée en vigueur : en cas de non à l’initiative de mise en œuvre, la loi sur les étrangers la plus dure d’Europe, décidée par le Parlement en application de l’initiative sur le renvoi, entrera en vigueur. Vous trouverez ici la loi d’application. Cette dernière a été élaborée dans le délai de cinq ans imposé par l’initiative sur le renvoi, et l’UDC n’a pas lancé de référendum. De plus, l’initiative de mise en œuvre a été lancée avant même que les contours de la loi d’application ne soient connus.

2. Le mensonge de la « mise en œuvre »

« Cette initiative [de mise en œuvre] corrige la législation d’application molle que le Parlement a définie concernant l’initiative pour le renvoi des étrangers criminels. » (p. 2):

L’initiative de « mise en œuvre » élargit le catalogue de délits de l’initiative sur le renvoi de 35 nouveaux délits tels que «lésions corporelles simples», «violation de domicile en relation avec les infractions de dommages à la propriété», «violences ou menaces contre les autorités et les fonctionnaires», «fausse traduction en justice», «infractions à la loi sur les stupéfiants», etc. (lisez le texte de l’initiative). Cet élargissement ne correspond pas à la volonté populaire exprimée par l’acceptation de l’initiative sur le renvoi. Les estimations de l’Office fédéral de la statistique montrent clairement que le nombre de renvois serait quasiment trois fois plus important si l’on appliquait l’initiative de mise en œuvre (environ 10’000 renvois) en lieu et place de la loi d’application du Parlement (environ 3‘800 renvois), et ce en raison de cette liste de délits supplémentaires. Dans son application de l’initiative sur le renvoi, le Parlement a suivi l’esprit et la lettre du texte accepté par le peuple en 2010. Il a toutefois respecté les principes de l’Etat de droit inscrits dans notre Constitution, tels que le principe de proportionnalité et le principe de l’évaluation au cas par cas, ce que ne fait pas l’initiative de mise en œuvre.

3. Le mensonge de la sécurité

« Les étrangers ayant commis des délits graves ne pourraient pas récidiver en Suisse [en cas d‘acceptation de l’initiative de mise en œuvre. “ (p.2):

La plupart des délits commis en Suisse par des étrangers le sont par des «touristes» criminels (lire à ce sujet l’article de la NZZ en allemand). L’initiative de mise en œuvre et l’initiative sur le renvoi déterminent à quel moment un étranger se voit retirer son autorisation de séjour. Elles n’affectent donc que les personnes qui disposent d’une telle autorisation. Les «touristes» criminels n’en ont pas (tout comme les requérants d’asile déboutés ou les sans-papiers). L’initiative ne les concerne tout bonnement pas. Un «touriste» criminel se fiche d’ailleurs de perdre le droit de séjourner en Suisse, d’autant plus s’il est de toute façon venu dans notre pays illégalement dans le seul but de commettre des larcins. Il continuera donc de tenter d’y venir. Pour finir, on peut encore ajouter que les renvois vers de nombreux pays ne peuvent tout simplement pas être effectués. Pour toutes ses raisons, l’initiative de mise en œuvre n’est rien d’autre qu’une pseudo-solution aux dommages collatéraux gravissimes.

4. Le mensonge de la justice bisounours

« Il suffit qu’une expulsion soit désagréable au criminel condamné pour que le tribunal y renonce. » (p.1):

La clause de rigueur est formulée de manière très claire et rigide et n’a rien à voir avec le contre-projet de 2010. Ce dernier prévoyait en effet d’exclure une expulsion pour les condamnations inférieures à un ou deux ans de prison – selon le délit. Le contre-projet faisait donc dépendre un renvoi de l’importance de la peine, là où la loi d’application du Parlement fait dépendre le renvoi de la simple commission d’un délit. Ainsi, l’automatisme impitoyable cher à l’UDC devient la règle. Quant à la clause de rigueur inscrite dans la loi d’application du Parlement, voici son contenu: «Le juge peut EXCEPTIONNELLEMENT renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l’étranger dans une situation personnelle GRAVE ET que les intérêts publics à l’expulsion ne l’emportent pas sur l’intérêt privé de l’étranger à demeurer en Suisse.» Une expulsion ne sera donc exclue que dans des situations exceptionnelles. Par conséquent, l’écart important entre les 10’000 renvois imposés par l’initiative de mise en œuvre et les 3‘800 voulus par l’initiative sur le renvoi des criminels étrangers s’explique non pas par les exceptions concernées par cette clause de rigueur (voir ici aussi les estimations de l’Office fédéral de la statistique évoquées plus haut), mais bien par l’élargissement du catalogue à 35 nouveaux délits, réclamé par l’initiative de «mise en œuvre». La clause de rigueur prévoit simplement une pondération conforme aux principes de l’Etat de droit entre les intérêts privés d’un côté et les intérêts publics de l’autre. En cas d’acceptation de l’initiative le 28 février, les intérêts individuels – y compris ceux de proches innocents, comme les droits de l’enfant par exemple – ne seraient plus du tout considérés, même lors de la commission d’infractions relativement légères.

5. Le mensonge sur la portée de l‘initiative

« [L’initiative de mise en œuvre] énumère les délits graves qui entraînent une expulsion obligatoire alors que d’autres délits ne sont sanctionnés par une expulsion qu’en cas de récidive. » (p.2):

Le mot «récidive» est faux. Il suggère la commission d’un deuxième délit identique ou en tout cas de gravité équivalente au premier. L’initiative de «mise en œuvre» introduit cependant l’expulsion automatique pour 35 délits supplémentaires, dès que l’auteur a été condamné à une quelconque peine pécuniaire ou privative de liberté dans les 10 ans précédant la deuxième condamnation, peu importe la nature et la gravité de la première infraction. De plus, même des infractions de moindre importance conduiraient, en cas d’acceptation de l’initiative de mise en œuvre, à un renvoi sans condamnation préalable. C’est le cas par exemple du délit d’«escroquerie à l’aide sociale et aux assurances sociales», qui n’était pas concerné par la première initiative – la déduction incorrecte d’une allocation familiale ou d’une prestation d’assurance maladie suffit ici pour une expulsion automatique du territoire. On entend souvent que l’initiative de mise en œuvre ne contient aucun délit mineur. C’est faux: tant dans le catalogue de délits exigeant un renvoi sans condamnation préalable que dans celui des délits provoquant une expulsion en cas de condamnation dans les 10 ans précédents, l’initiative contient plusieurs infractions qui peuvent être qualifiées de peu de gravité au sens du code de procédure pénale (cf. art. 132 al. 3 CPP: un cas est de peu de gravité lorsque le prévenu est passible d’une peine privative de liberté de quatre mois au plus, d’une peine pécuniaire de 120 jours-amende au plus ou d’un travail d’intérêt général de 480 heures au plus).