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Notre regard

Mobilisation | Un village-une famille, l’équation pragmatique et solidaire

Le village de Giez accueille depuis bientôt quatre mois une famille de cinq réfugiés. Des réfugiés désirés. La démarche est suffisamment remarquable pour qu’un certain élan médiatique lui ait fait écho, que le Conseil d’Etat vaudois l’ait saluée, et qu’une vingtaine de communes se soient d’ores et déjà lancées dans des projets similaires. Nous donnons la parole au président de l’association née de cette démarche, Nicolas Rouge, qui raconte la genèse du projet.

Giez
Une famille de 5 personnes dans un village de 400 habitants? C’est à peine 1% de la population de la bourgade, relève Nicolas Rouge, qui appelle d’autres communes à suivre la démarche.

Notre projet est une réponse citoyenne, apolitique, responsable et solidaire à des situations humaines souvent dramatiques. Notre but est de mettre un logement à disposition d’une famille de réfugiés et de l’accompagner dans son intégration selon le principe du respect et de la solidarité. Par solidarité, nous aimerions que notre projet soit repris par d’autres communes dans toute la Suisse. L’exode vers l’Europe nous accompagnera pendant longtemps et nous ne pouvons rester inactifs et sans voix. Qu’ils fuient l’horreur syrienne ou irakienne, la misère des camps, la guerre civile, la tyrannie d’un dictateur ou les exactions de factions sanguinaires et fanatiques, les réfugiés sont d’abord des êtres humains auxquels sont déniés les droits les plus fondamentaux. Ne fermons pas les yeux face à un bouleversement qui marquera l’histoire de notre siècle. Après avoir vu à la télévision et dans les journaux ces images terribles d’hommes, de femmes, d’enfants bravant la mer déchainée et les routes détrempées, nous en avons beaucoup parlé dans le cadre de notre famille. Il n’était tout simplement pas possible de rester à ne rien faire. Et ainsi est née l’idée, le projet, d’accueillir une famille de réfugiés dans notre village de Giez. Quelques jours après en avoir parlé en famille, j’ai présenté le projet en séance de municipalité et celui-ci a tout de suite ravi notre Syndic et l’ensemble de mes collègues. Notre Syndic a proposé de mettre son appartement inoccupé à disposition de cette famille de réfugiés. L’idée s’est propagée sur les ondes de la RSR le matin du 16 septembre dernier, puis le lendemain dans le 24 Heures ainsi que dans les journaux régionaux.

Jusqu’à 16’ooo réfugiés potentiels

On dénombre 2324 communes en Suisse. Si l’on compte les villages et petites villes, il y en a entre 4000 et 5000 (4’168 no postaux). En se basant sur un chiffre de 4000 villages et en considérant que chacun d’entre eux peut accueillir une famille de quatre personnes, le potentiel d’accueil est de 16’000 réfugiés. Un village, c’est une grande famille qui sera plus à même d’entourer et de veiller à une bonne intégration de ces personnes une fois arrivées. Savoir écouter, partager des moments de convivialité durant un repas, échanger un sourire, de la compassion et de la fraternité. Avoir un comportement simple et chaleureux afin de dire avec le coeur: Bienvenue en Suisse! Afin de gérer au mieux l’arrivée de la famille, nous avons créé une association avec des structures bien définies, pour canaliser le travail de chacun. En effet, il est important de coordonner les dons, l’aide et les activités afin de ne pas «étouffer» la famille arrivée. Du 24 octobre au 3 décembre 2015 nous avons rénové l’appartement du Syndic Cruchet. Entourés de professionnels, de nombreux volontaires de l’association sont venus travailler durant 6 semaines. Arracher les tapisseries, enlever les boiseries, les vieux plafonds, les vieilles conduites trouées, la cuisine délabrée. De nombreuses personnes acquises à notre projet nous ont offert des meubles, de la vaisselle, des habits, des jouets pour les enfants.

Accompagner les premiers pas

Enfin, le vendredi 4 décembre, la famille est arrivée à Giez. Les parents syriens sont accompagnés d’un bébé d’une année, d’une petite fille de 4 ans et d’un garçon de 6 ans. Cette famille a quitté la région d’Alep et est en Suisse depuis quelques semaines afin de trouver refuge et sécurité. L’aîné de la famille et sa petite sœur ont tout de suite joué avec les peluches et jouets déposés dans leur chambre. Le petit dernier a pris possession de son «corridor» et y gambade en poussant des cris de joie ; il vient de faire ses premiers pas. Nous échangeons quelques mots en anglais et souvent nous nous exprimons par des signes ; c’est un bon début! Très émus par une telle amitié et fraternité, les parents remercient tous ceux qui ont participé à cette merveilleuse démarche citoyenne. Avec l’arrivée de la famille, le projet se poursuit. Notre rôle est de les accompagner dans leur quotidien afin de favoriser leur compréhension de notre culture. D’un tel échange découlera une intégration sociale et professionnelle plus rapide et dans les meilleures conditions possibles. Par solidarité, nous aimerions de tout cœur que notre projet soit repris par d’autres communes dans toute la Suisse, et que des collaborations «Privés-Public» se développent dans de nombreux villages.

NICOLAS ROUGE

Plus d’informations sur le site Un village-une famille

Les initiatives solidaires se multiplient en Suisse romande. Si vous aussi vous avez envie de vous engager,  consultez le « Petit guide solidaire » de la coordination asile.ge.

Vous êtes un groupement ou une association active, d’une manière ou d’une autre, auprès des réfugiés  en  Suisse  romande? Vous récoltez des  habits, cherchez des  bénévoles pour des cours de français, accompagner les réfugiés ou les demandeurs d’asile? Nous pouvons relayer vos actions et vos besoins: écrivez vivre.ensemble@asile.ch.

Cet article a été publié dans le cadre du dossier de notre numéro 157 de la revue Vivre Ensemble, sur le thème de l’engagement et la solidarité, qui comprend également les articles suivants: