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CTPSR | Médias britanniques et personnes migrantes

De quelle manière les expériences et les voix des personnes migrantes sont-elles présentées dans les médias lors des débats publics sur la migration en Grande-Bretagne? C’est la question à laquelle répond l’étude « Victims and Villains: Migrant voices in the British media« , publiée par le Centre for Trust, Peace and Social Relations.

Parue en 2016, l’étude s’appuie sur une analyse de plus de 600 articles parus dans la presse anglaise lors de la période précédant les élections générales de 2015. Elle s’appuie également sur une série d’entretiens réalisés avec différents acteurs associatifs travaillant sur la thématique et des entretiens collectifs avec des personnes migrantes.

De manière générale, 46% des articles analysés présentent la migration comme une menace et les personnes migrantes comme mauvaises, voire dangereuses (Villain), alors que 38% les présentent comme «victimes». Seuls 10% des articles présentent la migration comme un avantage  et ce sont principalement en termes économiques que ces cas de figure se présentent.

Quant à la présence des voix migrantes dans les médias, 85% des articles de journaux traitant de la thématique migratoire n’exposent pas la perspective des personnes migrantes. Selon les auteurs, «l’absence de la parole des migrants en tant que source journalistique prive le public d’une compréhension nuancée ou complexe des questions migratoires» (5). De plus, c’est généralement dans les articles plutôt négatifs vis-à-vis de la migration que les voix des personnes migrantes sont absentes. Dans les articles présentant la migration sous un jour plus positif ou humanisant, la parole des personnes migrantes aura davantage tendance à être prises en comptes. Néanmoins, les auteurs regrettent que les personnes soient trop souvent présentées comme victimes ayant besoin de compassion et d’aide.

En effet, pour les auteurs de l’étude, la présence de la figure du migrant-victime peut certes être bénéfique – comme dans le cas du traitement de la détention à durée indéterminée. Mais la concentration de la parole migrante dans des articles les présentant comme victimes ne reflète pas la complexité et la variété des histoires des personnes migrantes qui vivent en Grande-Bretagne. L’expérience migratoire est ainsi présentée comme « exceptionnelle » et les expériences quotidiennes et normales de la plupart des personnes migrantes sont tues.

Cette perspective limitée a donc tendance, sur le long terme, à renforcer les stéréotypes et la dichotomie bon migrant/mauvais migrant, en répétant l’idée que les migrants sont uniquement récepteurs de l’ «aide» du pays d’accueil et, potentiellement, une menace pour la solidarité publique.

La recherche suggère ainsi que la couverture médiatique doit intégrer un bien plus grand éventail de perspectives et de points de vue de manière à ce que le débat sur la migration puisse être plus équilibré et puisse refléter la variété des réalités vécues par les personnes migrantes et leur contribution à la société d’accueil.

Raphaël Rey

« Victims and Villains: Migrant voices in the British media« : une étude de Heaven Crawley, Simon McMahon, Katharine Jones pour le Centre for Trust, Peace and Social Relations.

Cliquez ici pour obtenir l’étude en anglais.