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Documentation

Collectif R | Dublin: libération immédiate de A. et I. demandée

Dans un communiqué du 18 octobre 2017, Le Collectif R dénonce la mise en détention de deux demandeurs d’asile et demande leur libération immédiate. Les deux personnes s’apprêtent à être renvoyé vers l’Italie en vertu du règlement Dublin, après plusieurs années passées en Suisse.

Communiqué du Collectif R du 18 octobre 2017. Cliquez ici pour télécharger le communiqué.

Lire également à ce sujet l’article  de Miguel Martinez « Du Kafka à la sauce Dublin » , paru dans Le Courrier du 11 octobre 2017.

Après plusieurs renvois forcés, plusieurs recours et des années en Suisse à attendre au côté de sa sœur qui vit ici sans jamais pouvoir déposer sa demande d’asile, Ibrahim n’ose plus espérer et a entamé une grève de la faim…


En effet, il s’apprête à subir un 3e renvoi vers l’Italie alors que sa sœur vit en Suisse, que son soutien est indispensable, qu’il a des motifs d’asile à faire valoir et que depuis 2012, les autorités ont toujours refusé de les examiner, rejetant, comme pour le cas de Alamin, indéfiniment la responsabilité de sa prise en charge à l’Italie!

Après de longs mois à se terrer, après plusieurs décisions contradictoires visant à prolonger de manière presque indéfinie le refus d’entrer en matière sur ses motifs d’asile, Alamin n’ose quant à lui plus essayer de comprendre ce qui lui arrive, de peur de devenir fou…


Soutenu par plusieurs personnalités vaudoises, sa situation a fait l’objet de dénonciation lors d’une conférence de presse mardi passé et d’articles dans les médias romands en lien avec l’acharnement des autorités qui, violant le droit, se sont permis de prolonger son délai de renvoi au- delà du délai maximal. Il a été arrêté hier et malgré un dernier recours pendant au Tribunal, il risque d’être renvoyé en Italie sous peu.

Ibrahim et Alamin sont très fragiles psychologiquement en lien avec l’acharnement de longue durée subi par les autorités malgré leur parcours déjà difficiles ; ils ont déjà passé plusieurs années en Suisse et ont fui des persécutions graves dans leur pays d’origine… Malgré tout, leur situation n’a jamais fait l’objet d’un examen approfondi de la part des autorités suisses qui ne cessent de rejeter la responsabilité de l’examen de leur demande d’asile à l’Italie (depuis 2012 et depuis 2015 !), sans tenir compte de leur situation personnelle d’extrême gravité. Des renvois successifs, des mois d’attente et d’angoisse, des décisions contradictoires, des recours, des hospitalisations, des mobilisations vaines de la famille et des soutiens...: tous deux sont épuisés par des parcours rendus kakfaïens par les autorités de ce pays qui appliquent aveuglément et absurdément le règlement Dublin sans user de leur marge de manoeuvre et peu importe les dégâts humains graves qu’ils provoquent.

Leurs années de lutte pour le droit à faire examiner leur demande d’asile en Suisse se soldent par une mise en détention en vue d’un (nouveau) renvoi vers l’Italie suite à leur arrestation cette semaine: qu’est-ce qui justifie un acharnement sans limite et quand se terminera leur calvaire?

Ces situations mettent en évidence l’absurdité de l’application de ce Règlement qui produit une catégorie de personnes sans droits et gravitant en orbite dans le système européen de l’asile (alors que c’est ce qu’il prétendait prévenir) et surtout, elles mettent en évidence les coûts humains inacceptables que produisent ces décisions et ces renvois !!!

Les autorités cantonales et fédérales disposent d’une marge de manœuvre permettant de cesser cette violence grave exercée sur les personnes comme Ibrahim et Alamin. Elles sont pleinement responsables de violations graves des Droits de l’Homme et de leur intégrité! Nous exigeons la libération immédiate d’Ibrahim et d’Alamin, l’annulation de toute décision et procédure de renvoi à leur encontre!


La situation d’Ibrahim Fazeli

De nationalité afghane, I. est né en Irak, car son père y faisait des études en langue arabe. Sa famille y a vécu pendant une trentaine d’années. Après l’éclatement de la Guerre du Golfe, sa famille s’est réfugié en Arabie saoudite.

Par la suite, elle s’installe en Iran où il travaille pendant environ sept ans comme chauffeur à l’Ambassade d’Oman à Téhéran. Il fait l’objet de harcèlement de la part des services secrets iraniens pour qu’il accepte de travailler pour l’Iran.

Craignant pour sa vie, I. décide de partir. Il obtient un visa auprès de l’Italie. Il arrive à Milan via Istanbul. Comme il a appris dès son enfance que la Suisse est un pays de liberté et des droits de l’homme et que sa sœur est installée en Suisse, il décide de la rejoindre. En juillet 2012, il dépose une demande d’asile à Vallorbe. En septembre de la même année, il reçoit une décision de non- entrée en matière sur la base du Règlement Dublin III. Il doit être renvoyé en Italie.

La police vient le chercher dans un abri PC où il vit et il est renvoyé à Rome en Janvier 2013. Il revient rapidement en Suisse et dépose une nouvelle demande d’asile, mais il est renvoyé encore une fois à Milan par vol spécial.

Cette fois-ci, il décide de tenter sa chance en Allemagne. Il dépose une nouvelle demande d’asile à Stuttgart. L’Allemagne essaie de le renvoyer en Suisse, mais la Suisse n’accepte pas et déclare que l’Italie reste le pays responsable pour le traitement de sa demande d’asile.

I.reste dans ce pays jusqu’en juin 2014, mais revient en Suisse pour ne pas être renvoyé en Italie. Il va au Service de la population (SPOP) du Canton de Vaud où il a été attribué et dépose une nouvelle demande d’asile. Il reçoit de nouveau une décision de non-entrée en matière et il doit être encore une fois renvoyé en Italie sur la base du Règlement Dublin III. Il fait appel à cette décision. Après à peu près trois ans en Suisse, le Tribunal administratif fédéral rejette son recours. Comme A., I, a dû être hospitalisé en milieu psychiatrique durant une période de ce long parcours, épuisé et atteint psychiquement par cette situation intenable.

Il est actuellement en détention administrative dans le Centre de détention Favra, à Genève. I. a commencé une grève de la faim contre son troisième renvoi en Italie.


La situation d’Alamin Omer

Le règlement Dublin en vigueur autorise les autorités suisses à renvoyer les requérants d’asile ayant transité par un pays tiers de l’espace Schengen pendant un «délai de transfert» de 6 mois, qui peut être prolongé jusqu’à maximum 18 mois si l’intéressé se soustrait à son renvoi. Si ce délai maximal est expiré et que le renvoi n’a pu être exécuté, les autorités doivent impérativement entrer en matière sur leur demande d’asile et examiner sur le fond les motifs d’asile de l’intéressé.

Au mépris de ces règles et des principes de droit, pour A., requérant érythréen ayant fui la dictature et ayant transité par l’Italie avant de déposer une demande d’asile en Suisse en mai 2015 (il y a déjà 28 mois déjà), l’attente pour voir sa demande enfin examinée par les autorités suisses devrait au final durer 42 mois (trois an et demi)! Sinistre record mettant en évidence une violation évidente du droit en vigueur (règlement Dublin) dénoncée par les soutiens de A.

En effet, après avoir prolongé le délai de transfert de A. de 6 à 18 mois, le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) s’est soustrait à l’obligation que lui impose le règlement Dublin d’examiner sa demande d’asile. De manière arbitraire, le SEM a rendu à la place une deuxième décision de renvoi vers l’Italie lui indiquant un nouveau délai de transfert, comme s’il venait d’arriver sur le territoire suisse! Au total, c’est bien un délai de 42 mois que le SEM s’octroie pour effectuer ce renvoi à tout prix et malgré les limites du droit en vigueur. En dernier lieu, le juge du Tribunal fédéral administratif (TAF) pourtant censé modérer les erreurs ou abus les plus grossiers du pouvoir exécutif, s’est permis de constater qu’il y avait en effet erreur de la part du SEM, sans toutefois contrecarrer sa décision, et ceci, pour des raisons absolument opaques !

A. a été arrêté hier et se trouve actuellement en détention administrative en vue d’un renvoi, après une longue période passée en Suisse, durant laquelle il a étudié, appris le français et construit un réseau de soutien.

Les personnalités soutenant A. et ayant dénoncé cette situation à ses côtés:

Luc Recordon (ancien conseiller aux États), Marie-Claire Caloz-Tschopp (professeur, ex-directeur de programme au Collège international de philosophie), Céline Cerny (écrivaine), Alain Clavien (professeur Université de Fribourg), Raphael Mahaim (député du Grand conseil vaudois, les Verts), Michel Buhler (chanteur- compositeur, écrivain, acteur), Ilias Panchard (co-président des Verts suisses), Céline Ehrwein (membre du bureau des Verts vaudois), Claude Calame (directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales à Paris et professeur honoraire à l’UNIL), Blaise Hofmann (écrivain), Claude Pahud (éditeur et fondateur éditions Antipodes), Mireille Aubert (ancienne députée socialiste, Grand conseil vaudois), Johann Dupuis (UNIL), Leonore Porchet (députée Grand conseil vaudois, les Verts)