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Documentation

Lamin F., mort par erreur?

Le Matin Dimanche du 29 octobre 2017 a révélé dans un article que le jeune Lamin F., 23 ans, retrouvé mort  dans une cellule du Centre de police de la Blécherette, à Lausanne avait été interpellé et incarcéré par erreur. Les gardes-frontières l’auraient confondu avec un autre requérant d’asile, homonyme, signalé par les autorités lucernoises et qui devait être renvoyé en Italie en vertu des accords de Dublin.

Lamin F. souffrait d’épilepsie et avait subi une opération chirurgicale au cerveau à la fin du mois de septembre. « Une cicatrice était visible sur son crâne » rappelle le quotidien dominical. Malgré une nuit passée en observation aux urgences du CHUV suite à un malaise après son interpellation, il a été envoyé dans une cellule de le Centre de police de la Blécherette en vue d’être transféré  à Lucerne. Il est décédé mardi soir en cellule. 

Cliquez ici pour lire l’article sur le  site du Matin Dimanche.

« Lamin, mort dans les mains de la police parce qu’il était noir »  

« Lamin avait été attribué au canton de Vaud et enregistré au Service de la population (SPOP), comme l’indiquait le papier qu’il portait sur lui », rétorque le Collectif R dans un communiqué publié hier (ci-dessous). Il s’ indigne des circonstances de la mort du jeune homme et de la façon dont celle-ci a été présentée par la police: « Sa mort a donné lieu à une brève information de la part de la police, reprise par les médias, comportant des contre-vérités étonnantes et visant à criminaliser Lamin. » Le collectif R appelle à une manifestation le mercredi 1er novembre à 17 heures, Place de la Riponne à Lausanne. (Camille Giraut / Vivre Ensemble)

Retrouvez ci-dessous l’intégralité du communiqué de presse publié par le collectif R le 29 octobre 2017, ainsi qu’une version en anglais du communiqué.

Lire également l’exergue publiée par Le Courrier  « Lamine n’a pas été entendu » , le 30 octobre 2017.


Par ailleurs, le collectif R lance un appel aux dons pour soutenir les démarches liées à la mort de Lamin F.. Les versements permettront de compléter la somme nécessaire au rapatriement de son corps en Gambie vers sa famille ainsi que de participer aux frais d’avocats pour la famille, qui va se constituer partie civile dans l’enquête afin d’obtenir des informations détaillées, des investigations poussées et des réponses sur les responsabilités dans cette affaire. Pour y participer, pouvez faire un don avec la mention « Lamin » sur le CCP 17-549478-7  du collectif R.

Lamine, mort dans les mains de la police parce qu’il était noir

Il venait de Gambie, il avait laissé sa vie en plan pour essayer d’en refaire une et de se soigner. Et c’est à Lausanne, dans une cellule de la Police à la Blécherette que Lamine F est mort, seul, le 24 octobre dernier. Il avait 23 ans.

On connaissait Lamine, on savait qu’il était malade et qu’il venait de sortir de l’hôpital après une grave opération au cerveau dont il portait la cicatrice visible. Le service de la population (SPOP) était au courant et savait que Lamine avait besoin de contrôles médicaux suivis et qu’il était inapte au voyage.

Sans avoir commis aucun crime, Lamine a été arrête a la gare de Lausanne par les Gardes Frontières, des véritables cowboys qui agissent dans l’opacité totale et qui font régulièrement usage de la force, portant ainsi atteinte à la liberté mais aussi à l’intégrité des personnes.

Il était noir, considéré en situation illégale malgré son inscription au SPOP et à l’EVAM. Il faisait partie de cette catégorie de personnes, expulsables, isolées volontairement du reste de la population et victimes d’une violence policière quotidienne, « normale » envers les personnes « non blanches » notamment.

D’après le peu d’informations que nous avons, Lamine a été conduit au CHUV pour un contrôle et personne au CHUV ne s’est opposé à ce qu’il soit par la suite incarcéré à la Blécherette. Étonnant, étant donné son hospitalisation récente pour graves motifs de santé ! Où est la cohérence des responsables médicaux qui prodiguent des soins importants à Lamine et qui en même temps donnent le feu vert pour sa mise en détention et l’expulsion ?

Sa mort a donné lieu à une brève information de la part de la police, reprise par les médias, comportant des contre-vérités étonnantes et visant à criminaliser Lamine.

Non, Lamine n’était pas en infraction à la loi sur les étrangers, il était à l’aide d’urgence et en possession de l’attestation d’octroi de cette aide délivrée par le SPOP. Il était hébergé dans un centre EVAM et donc toujours à disposition des autorités.

Non, Lamine ne devait pas être renvoyé à Lucerne. Il avait été attribué au canton de Vaud et enregistré au SPOP comme l’indiquait le papier qu’il portait sur lui.

Non, Lamine n’était pas seul, il avait des amis ici et il était en contact avec les milieux de défense des droits des immigré-e-s.

Que s’est-il vraiment passé entre dimanche et mardi pour Lamine? Trop de non-dits, de contre- vérités, trop de silences, autour de sa mort.
Parce que «ce n’était qu’un sans papier» et noir de surcroît, Madame la Procureure?
Pourquoi, avez-vous retardé jusqu’à lundi, sans explications, la reconnaissance du corps de la part de ses amis?

Aujourd’hui, selon la Procureure, il semblerait que la police des garde-frontières se soit «trompée» et qu’elle l’ait confondu avec quelqu’un d’autre, ce dont ils auraient pris conscience le vendredi seulement! Si cela est vrai, cela souligne à quel point les polices (gardes frontières, police cantonale, etc.) commettent des négligences, des mauvais traitements et des abus constants sur les personnes noires et précaires qui ont des conséquences extrêmement graves pouvant mener à la mort. Lamine était au bénéficie d’un document qui attestait qu’il était attribué au Canton de Vaud et présentait des problèmes de santé de manière visible mais il aurait été pris pour quelqu’un à renvoyer à Lucerne et fait l’objet d’aucune précaution en lien avec sa santé!

Il n’a pas été entendu et sa situation n’a pas été examinée, tout cela parce que sa parole n’avait aux yeux de la police pas la même valeur que celle de tout autre citoyen qui peut revendiquer ses droits!

Nous exigeons maintenant que le voile soit levé sur toutes ces zones d’ombre.

Parce que tout est incompréhensible et scandaleux dans son interpellation et dans sa mort.

Parce que cela est bien un cas tristement emblématique du traitement des immigré-e-s en situation «irrégulière» et du manque d’attention qui leur est porté

Parce que cela montre l’absurdité de la criminalisation du séjour non autorisé

Parce que le terme d’illégal n’est pas anodin, il produit et distille un message implicite selon lequel cette catégorie de personnes sont des « sous-citoyens » sans droits et sur lesquels on aurait tous les droits!

Parce que la violence sur les immigré-e-s, et spécialement sur les noirs, est toujours invisible, banalisée et sans limites

Parce que la vie des sans-papiers compte. La vie des requérant-e-s d’asile, débouté-e-s ou non, compte! La vie des noir-e-s compte!

Nous demandons un débat public sur la violence policière afin qu’elle soit traitée par les autorités et qu’elle sorte de la zone d’ombre et d’impunité dans laquelle elle s’épanouit actuellement, dans l’indifférence générale.

En attendant, pour dire Adieu à Lamine, en solidarité avec sa famille et ses proches, en solidarité avec toutes les autres personnes noires ou étrangères quel que soit leur statut, victimes de la violence et de la négligence criminelle des forces de police,

Nous appelons à manifester Mercredi 1 novembre à 17h, rdv Place de la Riponne à Lausanne

Collectif R, 29 octobre 2017