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The Conversation | La parole maltraitée des jeunes migrants

Article de Igor Babou et Joëlle Le Marec, publié sur le site The Conversation, le 18 mai 2018. Cliquez ici pour lire l’article complet sur le site The Conversation.

Le 4 janvier 2018, des membres d’un réseau d’hébergeurs de migrants isolés font circuler l’avis négatif émis par la Direction de l’action sociale, de l’enfance et de la santé du département de Paris, en réponse à la demande de statut de mineur isolé par un jeune Malien récemment arrivé. L’argument principal pour mettre en doute la minorité est la «maturité» du jeune «qui a pris seul l’initiative de quitter son pays».

De nombreux autres récits de parcours migratoires sont qualifiés d’«imprécis» ou de peu crédibles. Ce jeune, comme tant d’autres, est donc mis à la rue, avec la possibilité de faire un recours, mais sans autre aide que celle des bénévoles qui tentent de compenser l’indifférence des pouvoirs publics face à la situation d’un jeune isolé sans ressources ni famille, en plein hiver.

Autre cas: celui d’un jeune Ivoirien hébergé par un des auteurs de ce texte, qui depuis fin août 2017 attend de rencontrer le juge des enfants suite à un recours effectué il y a 8 mois. Le statut de mineur isolé étranger lui avait été refusé par cette même direction de l’action sociale. Sur l’avis, une brève biographie tirée de «l’entretien d’évaluation » était ainsi rédigée:

«Vous quittez alors le pays. Vous passez par le Burkina Faso, le Niger et l’Algérie, pour aller en Libye […] avant d’embarquer sur un zodiac à destination de l’Italie […] vous n’apportez aucun élément tangible permettant d’étayer la minorité et l’isolement que vous alléguez.»

Dans quelles situations de parole les jeunes migrants sont-ils mis par nos institutions au moment où ils sollicitent une protection? Quel type de «vérité» peut-on attendre de tels dispositifs de recueil de la parole? Que penser des récits qui en sont tirés et des conséquences en termes de politiques publiques, pour ces jeunes, et pour l’ensemble de la société française?

Nous allons voir que les sciences sociales peuvent nous aider à poser correctement ce type de question, lorsqu’elles articulent des travaux scientifiques et une enquête ou une implication directe dans les situations vécues. L’enjeu est ici, pour nous qui sommes à la fois des chercheurs en sciences sociales et des citoyens engagés dans des actions de solidarité et de défense des droits humains, de faire circuler dans le débat public certains arguments qui n’y sont pas discutés.

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