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Comptoir

La construction de l’image des réfugiés. Une responsabilité commune.

De Facto, numéro 3. Institut Convergences Migrations

L’interview de Géraldine Schwarz l’évoque: des mouvements populistes de droite à travers l’Europe s’approprient la mémoire, mais aussi la politisation des enjeux touchant à l’accueil des réfugiés (p. 2). Comment amener un autre regard sur les migrations actuelles ? Comment faire passer une information basée sur des faits et éloignée des idées reçues ? Le 2 octobre 2018, Vivre Ensemble, en partenariat avec le Service de la cohésion multiculturelle de Neuchâtel, a réuni des acteurs d’horizons diversifiés pour en parler. Communiquer en marge de la surenchère et de la temporalité du politique et rendre cette action visible sont autant de défis partagés, évoqués tout au long de cette stimulante discussion.

Journalistes, étudiants, militants, le public nombreux représentait à lui seul une belle diversité. Les quatre panélistes issus du milieu académique, journalistique, de l’intégration ou de l’administration publique ont mené un dialogue constructif entre leurs champs d’action. En introduction, Emmanuelle Hazan, journaliste et modératrice de la table ronde, a proposé à chacune et chacun de réfléchir à sa responsabilité à partir de sa posture professionnelle dans le discours véhiculé sur les réfugiés. Car si le débat public se forme au gré des informations diffusées, la presse, maintes fois accusée de surenchère, n’est sans doute pas la seule en cause. Celles et ceux qui l’utilisent comme porte-voix en sont également responsables. Ne pas agir uniquement en réponse aux fausses nouvelles. Valoriser les actions en faveur d’une meilleure interconnaissance des populations. Faire circuler les informations pour combattre les discriminations.Ces défis ont été mentionnés à plusieurs reprises. Le journaliste, Gabriel de Weck, rédacteur en chef des radios RBNJ [1], a notamment évoqué la difficulté de traiter de sujets sur l’asile dans des moments d’urgence, lorsque l’opinion publique est chargé d’émotions. Apporter des reportages réguliers sur d’autres facettes de la vie des réfugiés en Suisse permettrait sans doute de créer une autre perception de cette réalité.

Partager l’information

Les exigences académiques engendrent d’autres problématiques selon Joëlle Moret, chargée du transfert de connaissances au sein du NCCR [2]. La course aux publications au sein de revues cotées se fait souvent au détriment d’un temps de travail dévolu à la vulgarisation des résultats de recherche auprès du grand public. Un public déjà convaincu est alors atteint, mais il peut néanmoins faire circuler l’information plus loin, par effet « boule de neige ».

C’est cet effet «rumeur» basé sur des faits réels qu’a évoqué Céline Maye, cheffe du Service de la cohésion multiculturelle du canton. Elle imagine former des personnes pour se rendre dans des bars de quartier, sur des places de marché,  là où la parole est citoyenne, mais parfois imprégnée de peurs et de préjugés. Selon elle, faire se rencontrer des personnes sujettes à des discriminations semblables procurerait à l’opinion publique une assise concrète. Serge Gamma, en charge du Service des migrations neuchâtelois, explique que le dialogue a été placé au centre de son action. Les portes des structures d’accueil des réfugiés sont régulièrement ouvertes au public afin de favoriser la rencontre.

Ce tour de table dynamique, autant que les échanges avec un public incisif, a permis de rappeler que chacune et chacun participe à la construction des représentations publiques.

Prendre la parole, la faire circuler, échanger, parfois dans la controverse constitue un exercice démocratique salutaire. Convoquer la mémoire, se rappeler de ceux qui ont osé parler en des temps plus autoritaires encore sont autant de manières de participer à la fresque permanente de ce qu’accueillir signifie.

Giada de Coulon

[1] RBNJ, Radio Berne Neuchâtel Jura-bernois
[2 ] National Center of Competence in Research (NCCR) for migration and mobility studies basé à l’Université de Neuchâtel

SENSIBILISATION DES JOURNALISTES

Ateliers et formation

Éthique et stéréotypes les défis et enjeux de la communication en matière d’asile étaient au cœur des ateliers à l’intention des journalistes neuchâtelois organisés en préambule à la table ronde du 2 octobre par le Comptoir des médias. Ce projet de Vivre Ensemble vise à sensibiliser les acteurs de l’information aux réalités et préjugés de l’asile. Outre les représentants de la RBNJ et d’Arcinfo, les journalistes du média en ligne Voix d’Exil, ayant connu un parcours dans l’asile, ont enrichi les discussions par leurs regards et expériences. Également présents, des membres d’associations et acteurs de la communication au sein de l’administration publique. Chaque atelier visait à approfondir et discuter des terminologies et des statuts administratifs de l’asile, d’en interroger l’usage politique, générique, juridique et l’impact qu’ils peuvent avoir sur le public. Ainsi des significations et représentations des termes « migrant » ou « réfugié », « illégal » ou « irrégulier ». La communication officielle, via les statistiques et discours, a également été passée au crible. Ces ateliers ont pour but d’outiller les acteurs de l’information et de leur permettre de développer un regard et une analyse critique sur l’actualité de l’asile. Le retour très positif sur ces échanges nous invitera à renouveler l’expérience. Sans doute dans un autre canton.

C’est dans cet esprit que le Comptoir des médias inaugure ses FOCUS SUR L’ASILE, des mini-formations à l’’intention des journalistes. Elles ont la particularité d’être dispensées gratuitement et in situ, à savoir dans les rédactions romandes. Nous proposons une formule courte sur des thématiques établies selon les intérêts et besoins des rédactions, ou de l’actualité. Premier rendez-vous en janvier.

Plus d’infos sur asile.ch/comptoir-des-medias