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Notre regard

Baisse des demandes d’asile et centres fédéraux. Ne pas refaire les erreurs du passé

La conseillère fédérale Karin Keller Sutter a promis des économies dans le domaine de l’asile de l’ordre de 30 millions de francs par an grâce à la fermeture de centres fédéraux. Raison invoquée? Le nombre d’arrivées en Suisse est au plus bas avec 14 500 demandes projetées à fin 2019 par Berne. La fermeture reste « temporaire » précise le Conseil fédéral. L’idée est sans doute d’éviter les erreurs du passé, notamment le chaos organisé par Christoph Blocher qui avait calibré le dispositif d’accueil à 10 000 demandes par an, réduisant le financement fédéral aux cantons en conséquence. Sans se poser de question, ceux-ci avaient résilié baux d’appartements et lieux collectifs. Ils s’en étaient mordu les doigts, une fois réalisé que les chiffres avancés par l’ex-patron de l’UDC relevaient avant tout du fantasme. Dans l’urgence et souvent face à un voisinage hostile, ils s’étaient rabattus sur des abris de protection civile ouverts dans la précipitation.

Aujourd’hui, les cantons feraient bien de s’en souvenir avant de licencier du personnel formé et de prévoir la fermeture de lieux de vie. D’une part parce que miser sur le blocage des frontières en Méditerranée et dans les Balkans est illusoire: ce sont les guerres et persécutions qui poussent les gens à partir et on ne peut pas dire que le monde se porte mieux. Ensuite parce que le nombre de personnes ayant reçu une protection et vivant en Suisse restera stable : les cantons devront les héberger durablement.

C’est notamment pour avoir ignoré ou nié le fait que la majorité des personnes dont on examine la demande d’asile obtient une protection de la Suisse que les autorités cantonales ont sous-estimé les besoins d’hébergement et d’encadrement. Pour s’en convaincre, nos dirigeants peuvent aussi relire le décryptage «Médias et public enfumés par la rhétorique de la hausse des demandes d’asile» (Cristina del Biaggio et Sophie Malka, Comptoir des médias, 2015).

Car on le sait bien, l’histoire se répète.

Sophie Malka