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Le temps des réfugiés | La Cour des comptes européenne de l’UE critique les disparités de gestion des migrations

Le 13 novembre 2019, la Cour des comptes de l’Union européenne (UE) publiait son rapport d’audit «Asile, relocalisation et retour des migrants: il est temps de renforcer la lutte contre les disparités entre les objectifs et les résultats». Ce rapport examine le soutien financier et opérationnel de l’UE en faveur de la Grèce et de l’Italie. Il évalue dans quelles mesures les objectifs ont été atteints et si les procédures d’asile et de retour étaient efficaces et rapides. Le rapport couvre la période 2015-2018. La Cour des comptes s’est intéressée à l’accueil des requérants d’asile, à la procédure d’asile, au système EURODAC et au fonctionnement du système Dublin, aux relocalisations des requérants d’asile vers d’autres pays de l’UE et enfin à l’efficacité des renvois vers les pays d’origine. Le rapport est truffé de recommandations qui vont inévitablement influencer les décisions des autorités suisses. 

L’article dont le titre complet est «  La Cour des comptes de l’UE critique les disparités en matière de gestion des migrations en Grèce et en Italie » a été publié le 19 novembre 2019 sur le blog de Jasmine Caye hébergé par le quotidien Le Temps.

La Cour des comptes a publié le 13 novembre 2019 un communiqué de presse qui se trouve sur le site ou en cliquant sur son titre ici: « Il est temps de renforcer la lutte contre les disparités en matière de gestion des migrations en Grèce et en Italie, estime la Cour des comptes européenne. »

Le 13 novembre 2019, la Cour des comptes de l’Union européenne (UE) publiait son rapport d’audit «Asile, relocalisation et retour des migrants: il est temps de renforcer la lutte contre les disparités entre les objectifs et les résultats». Ce rapport examine le soutien financier et opérationnel de l’UE en faveur de la Grèce et de l’Italie. Il évalue dans quelles mesures les objectifs ont été atteints et si les procédures d’asile et de retour étaient efficaces et rapides. Le rapport couvre la période 2015-2018. La Cour des comptes s’est intéressée à l’accueil des requérants d’asile, à la procédure d’asile, au système EURODAC et au fonctionnement du système Dublin, aux relocalisations des requérants d’asile vers d’autres pays de l’UE et enfin à l’efficacité des renvois vers les pays d’origine. Le rapport est truffé de recommandations qui vont inévitablement influencer les décisions des autorités suisses. 

Diminuer la pression sur la Grèce et l’Italie

Selon les auditeurs, les mesures de l’UE visant à diminuer la pression migratoire sur la Grèce et l’Italie doivent être améliorées et intensifiées. Ils déplorent la lenteur excessive des procédures d’asile. En Italie, les demandes d’asile déposées en 2015 ont pris en moyenne quatre ans pour parvenir au stade du recours final, tandis que les demandeurs d’asile arrivant sur les îles grecques fin 2018 se voyaient attribuer une date limite pour les entretiens jusqu’en 2023.

Parallèlement à l’accélération des procédures d’asile, les auditeurs recommandent d’améliorer les logements sur les îles grecques, en particulier pour les nombreux requérants mineurs non accompagnés qui logent dans des conditions abominables. A ce sujet la Cour des comptes précisent ce qui suit:

À Samos, nous avons visité la section du centre (hotspot) réservée aux mineurs, qui consiste en sept conteneurs, abritant chacun une salle de bain et deux salles de séjour. Certains conteneurs n’avaient ni portes, ni fenêtres et n’étaient équipés ni de lits ni d’appareils de conditionnement de l’air. Chaque conteneur pouvait officiellement accueillir huit à dix mineurs, mais en hébergeait environ 16 non accompagnés, dont certains étaient même obligés de dormir par terre. Seuls des garçons séjournaient dans la section pour mineurs. Soixante-dix-huit mineurs non accompagnés étaient hébergés sous tente ou dans des maisons abandonnées situées à l’extérieur du point d’accès et devenues des annexes officieuses de celui-ci. Neuf filles non accompagnées dormaient au sol dans un conteneur de 10 m2 situé à côté du bureau de police, sans toilette ni douche.

Au moment de la publication du rapport, le maire de l’île de Samos Georgios Stantzos mentionnait l’audit et mettait en garde les autorités grecques contre les conséquences des conditions de vie «primitives» imposées aux réfugiés sur l’île.

Trop de mouvements secondaires dans l’UE

Concernant l’enregistrement des empreintes digitales dans le système EURODAC, la situation s’est beaucoup améliorée dans les centres hotspots en Italie et en Grèce. Cependant, entre 2015 et 2018, la Cour a remarqué un volume élevé de mouvements secondaires dans l’UE ce qui a rendu l’application du mécanisme de Dublin difficile. Les données EUROSTAT traduisent aussi de faibles taux de transferts Dublin qui s’expliquent selon les auditeurs, par la fuite ou la disparition des personnes concernées, des raisons humanitaires, des décisions de justice en suspens et des cas de regroupement familial (1).

Les  réinstallations très insatisfaisantes

Les États membres de l’UE se sont juridiquement engagés à réinstaller 98 256 migrants, sur un objectif initial fixé à 160 000. Or seuls 34 705 ont été effectivement réinstallés (21 999 depuis la Grèce et 12 706 depuis l’Italie). Selon les auditeurs, la performance insuffisante de ces programmes s’explique surtout par le faible nombre de requérants potentiellement éligibles enregistrés en vue d’une relocalisation, surtout parce que les autorités grecques et italiennes ont eu de la peine à identifier les candidats. Une fois les migrants enregistrés en vue d’une relocalisation, la solidarité à leur égard a mieux fonctionné. Les auditeurs ont cependant relevé un certain nombre de faiblesses opérationnelles dans le processus de relocalisation (2).

Augmentation des renvois vers les pays d’origines

Pour la Cour des comptes, le fossé entre le nombre de décisions négatives et le nombre de renvois exécutés depuis la Grèce, l’Italie ou le reste de l’UE, est trop important. Le taux de renvois des ressortissants de pays tiers ayant reçu l’ordre de quitter l’UE était d’environ 40 % en 2018 et de 20 % en Grèce et en Italie. En s’inspirant de certains centres de renvois destinés aux personnes qui acceptent volontairement de rentrer vers leurs pays d’origine, la Cour des comptes recommande différentes mesures qui permettront de faciliter les renvois dont l’ouverture de nouveaux centres de détention et l’offre plus systématique de programmes de réintégration dans les pays d’origine.

Conclusion

Le  rapport de la Cour des comptes de l’UE est une mine d’information pour comprendre le fonctionnement des centres hotspots en Grèce et en Italie. Globalement, sa lecture donne le sentiment que l’UE se dirige à grands pas vers une prolifération de  centre hotspots, un raccourcissement des procédures d’asile et une armada de mesures facilitant l’exécution des renvois vers les pays d’origine.

Lire le rapport et le communiqué de presse:

Asile, relocalisation et retour des migrants: il est temps de renforcer la lutte contre les disparités entre les objectifs et les résultats

Communiqué de presse de la Cour des comptes

Notes:

  1. La base EURODAC fonctionne selon un système d’échange et de comparaison. Chaque État enregistre les données des demandeurs d’asile dont il traite les dossiers dans sa base nationale et les transmet à une unité centrale pour qu’elles y soient enregistrées et comparées avec les empreintes déjà enregistrées. Cette unité centrale transmet le résultat (positif ou négatif) de la comparaison à l’Etat membre selon un système « hit/not hit », concordance / non concordance. L’objectif de ce système est de contribuer à la mise en œuvre du règlement Dublin en identifiant l’Etat responsable de l’examen d’une demande d’asile suite à la prise des empreintes digitales du demandeur d’asile ; le règlement de Dublin et celui d’Eurodac constituent ainsi le « système de Dublin ».
  2. En vertu des décisions de réinstallation, seules les nationalités ayant un taux moyen de reconnaissance de 75% ou plus – pouvaient prétendre à la relocalisation. L’utilisation de cette approche globale était jugée cohérente par les Etats de l’UE. Cependant le taux de reconnaissance des demandes d’asile reste très disparate d’un État membre à l’autre. La moyenne à l’échelle de l’UE n’est donc pas un indicateur optimal de la chance d’obtenir une protection internationale dans un État membre donné.