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Documentation

Le Courrier | Migrants piégés en vue de leur renvoi?

Mohamed Musadak rédige un article dans le Courrier concernant les pratiques d’arrestations de la Brigade migrations et retour (BMR) de la police genevoise. En marge d’un procès où six de ses membres sont accusés d' »abus d’autorité » envers des personnes soumises à des décisions de renvoi, il traite de la possible signalisation à la police par l’Office cantonal de la population et des migrations (OCPM) de la présence de ses personnes à leur guichet . Cette pratique mettrait en péril l’accès à l’aide inconditionnelle qu’est l’aide d’urgence. En effet, pour obtenir cette aide, l’OCPM doit viser un document ce qui amène des personnes en situation irrégulière à se rendre dans ses locaux. La menace d’une arrestation suite à leur passage à l’OCPM pourrait décourager des personnes d’en faire la demande alors qu’elles seraient en situation de détresse.

L’article de Mohamed Musadak « Migrants piégés en vue de leur renvoi? » a été publié le vendredi 29 novembre 2019 dans le quotidien Le Courrier.

Migrants piégés en vue de leur renvoi?

[caption id="attachment_56089" align="alignright" width="273"]renvoi aide d'urgence arrestation OCPM Cet article a été reproduit grâce à l’aimable autorisation du quotidien Le Courrier. L’accès à cet article ne doit pas faire oublier que l’information a un coût et ce sont les abonné-e-s au Courrier qui garantissent son indépendance.[/caption]

« L’Office cantonal de la population et des migrations (OCPM) a beaucoup de mal à l’admettre vis-à-vis du public, mais il nous appelle régulièrement pour interpeller des migrants en vue de procéder à leur renvoi.» Les propos datent de la mi-novembre et sont ceux d’un assistant sécurité publique de niveau 4 – soit un assistant policier autorisé à porter arme et menottes –, membre de la Brigade migrations et retour (BMR). Ils confirment les soupçons qu’ont depuis de nombreuses années les associations de défense du droit d’asile.

L’homme était interrogé dans le cadre de son procès, ainsi que celui de cinq de ses collègues, pour abus d’autorité, notamment lors de l’interpellation d’un sans-papiers tunisien qui se rendait l’OCPM pour faire viser son attestation de délai de départ – une obligation légale. «Nous avons un accord avec l’office: Pour éviter les scandales et pour des raisons de sécurité, il nous est demandé de ne pas intervenir dans le périmètre immédiat ni à l’intérieur des locaux.» Cette pratique, si elle devait s’avérer vraie, est très décriée. Pour pouvoir toucher l’aide d’urgence – un maigre pécule de 300 francs par mois –, un requérant d’asile débouté doit absolument «faire tamponner son papier blanc (l’attestation de délai de départ)» à l’OCPM. «L’aide d’urgence est un droit inconditionnel garanti par l’article 121 de la Constitution. Procéder à des interpellations dans ce cadre prive les personnes concernée de ce droit et incite, au final, à la clandestinité», analyse Sophie Malka, coordinatrice et rédactrice responsable à l’association Vivre ensemble.

«Il convient de préciser que l’OCPM n’appelle jamais la police pour interpeller un ressortissant étranger aux guichets», dément Laurent Paoliello, directeur de la communication au Département de la sécurité, de l’emploi et de la santé (DSES). «La seule exception que souffre cette règle est lorsqu’une personne fait l’objet d’un mandat d’amener par la police et est signalée comme recherchée sur la base de données fédérale. Police-secours est effectivement informée du fait que l’individu se trouve dans les locaux de l’OCPM.»

En 2019, une seule personne a fait l’objet d’une telle interpellation par la police dans les bureaux de l’office, selon le DSES. Une ambiguïté sur la pratique demeure cependant: «Dans les autres cas, si la Brigade migration et retour (BMR) de la police souhaite interpeller une personne soumise à une décision de renvoi après son passage à l’OCPM, elle doit adresser au préalable une demande écrite et motivée. Celle-ci doit être validée par la direction de l’office.» Selon le département, en 2019, la BMR a procédé à quatre interpellations hors du périmètre de l’OCPM après leur passage.