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Notre regard

L’Odyssée d’Hakim, par Fabien Toulmé

L’Odyssée d’Hakim, (tomes I & II), Fabien Toulmé paru aux Éditions Delcourt, 2018/19

Selon les derniers chiffres du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, 5,6 millions de Syrien·ne·s ont fui leur pays. En presque neuf ans de conflit, la Syrie a perdu plus d’un quart de sa population qui a principalement trouvé refuge dans les pays voisins. Une minorité se trouve actuellement en Europe.

Derrière ces données brutes et implacables se cachent pourtant des histoires singulières qu’aucune statistique ne pourra jamais retranscrire. De ce constat, le dessinateur Fabien Toulmé a tiré L’Odyssée d’Hakim, un magnifique roman graphique. L’ouvrage met un visage sur ces hommes et ces femmes contraints de fuir les persécutions et la guerre qui ravage leur pays.

L’idée lui est apparue en mars 2015. Alors que le crash de la Germanwings occupe l’actualité médiatique pendant plusieurs jours, il est frappé de constater que le naufrage survenu au même moment de 400 personnes en Méditerranée est relégué en fin de journal.

C’est dans ce contexte que l’auteur fait la connaissance d’Hakim, un réfugié syrien de 30 ans qui vient de s’installer à Aix-en-Provence avec ses proches. De leurs conversations désarticulées naitront trois volumes – le troisième est en préparation, – retraçant de manière chronologique l’exil d’Hakim, de la banlieue sud de Damas au sud de la France.

Par son témoignage, le principal intéressé souhaite transmettre à ses enfants l’histoire familiale.

L’un des tours de force de l’ouvrage est de montrer la migration dans toute sa complexité à travers des dessins simples et épurés que les aficionados de l’Arabe du futur et de Persépolis ne manqueront pas d’apprécier.

Cet article a été publié dans un cahier spécial de la revue Vivre Ensemble, qui propose une sélection de livres et BD sur la thématique de l’exil. À télécharger ici ou en cliquant sur l’image ci-dessus.

Bien que rien ne semble avoir été épargné au jeune Hakim, le propos ne tombe jamais dans le sensationnalisme. Le personnage principal nous fait part avec beaucoup de lucidité des difficultés qu’il a dû surmonter sur sa route mais aussi de ses espoirs et de ses rencontres.

Contrairement aux péripéties d’Ulysse, tout sonne juste dans ce récit empreint de réalisme si bien qu’on s’identifie sans mal aux protagonistes de cette histoire. Dans une Europe en proie au repli identitaire, l’Odyssée d’Hakim apparaît comme un remède nécessaire à la déshumanisation ambiante des réfugié·e·s.

ALEXIS THIRY