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Notre regard

Délit de solidarité | Norbert Valley acquitté

Norbert Valley, qui comparaissait devant la justice pour avoir porté assistance à un jeune Togolais en l’hébergeant quelques jours entre 2016 et 2017, a été acquitté jeudi 12 mars 2020. Soutenu par Amnesty International et des réseaux d’Église en Suisse notamment, le pasteur dit avoir agi selon ses convictions religieuses en hébergeant cet homme dans un local d’église. Le juge a tranché en estimant que cette aide ponctuelle n’était pas suffisante pour être condamnée. Cette décision survient toutefois quelques jours après le rejet par le Conseil national de l’initiative « En finir avec le délit de solidarité ». Elle démontre la marge de manœuvre dont disposent les juges dans leurs décisions, mais aussi le poids de cet article 116 de la LEI qui condamne le délit de solidarité, sans faire de distinction entre passeurs cherchant le profit et  personnes agissant par volonté d’aider, comme le rappelle l’éditorial du Courrier publié le 12 mars 2020 et que nous reproduisons ci-dessous.

Retrouvez également ici le billet et l’entretien de Jasmine Caye avec le pasteur Norbert Valley quelques jours avant le procès, publié sur forumasile.org ainsi que sur le blog du Temps « Le temps des réfugiés » (billet et entretien publiés le 09 mars 2020), et l’article de ArcInfo au sujet de l’acquittement ici (publié le 12 mars 2020).

Victoire incomplète

jeudi 12 mars 2020 – Benito Perez

[caption id="attachment_57938" align="alignright" width="313"] Source: lecourrier.ch – Le pasteur Norbert Valley à la sortie du tribunal, jeudi 12 mars 2020. DR[/caption]

Délit de solidarité – Le pasteur neuchâtelois Norbert Valley, qui avait été condamné en 2018 pour avoir hébergé un Togolais en situation irrégulière, a été acquitté jeudi en seconde instance. La victoire est belle pour les défenseurs du principe intangible de la solidarité, associations et personnalités présentes en force à l’audience à La Chaux-de-Fonds. Cette importante mobilisation, à gauche surtout mais aussi à droite, a sans doute pesé sur l’interprétation restrictive faite par le juge de l’article 116 de la Loi fédérale sur les étrangers. Le Tribunal a pu libérer le pasteur de toute charge, en minimisant l’aide réellement apportée, ne l’estimant pas de nature à entraver l’action administrative.

C’est heureux. Mais en creux, le jugement rappelle que la législation suisse continue de criminaliser la solidarité humaine envers des personnes parmi les plus fragiles. Une violation éhontée du droit international, celui-ci exigeant que l’on protège les acteurs humanitaires ainsi que les personnes potentiellement victimes de traite humaine.

Nombre de pays européens, tels l’Espagne, l’Italie ou la Belgique, connaissent d’ailleurs des dispositions immunisant les personnes qui agissent pour des motifs honorables. Ce qui permet de concentrer la répression sur les organisations criminelles, passeurs, marchands de sommeil et autres exploiteurs des clandestins. C’était également le cas de la Suisse avant que Christoph Blocher ne fasse modifier la loi en 2008.

La semaine dernière, la pseudo majorité centriste du Conseil national a balayé une initiative parlementaire, pourtant appuyée par 30 000 pétitionnaires, qui demandait un retour à plus d’humanité. Pour la seconde fois depuis le début de l’année et le jugement vaudois sur Credit Suisse, la justice helvétique montre plus d’ouverture que le pouvoir politique. On a envie de dire que ce n’est pas très difficile.