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Notre regard

Grève des femmes | Un an après : quels projets? Quelles revendications?

« ON NE LÂCHE RIEN »

Des mots fortement prononcés les 8 mars, 1er mai et 14 juin 2020, tant sur les réseaux sociaux que dans l’espace public. Après le prodigieux élan qui a marqué la grève de 2019, la mobilisation a continué, avec une détermination que la crise sanitaire n’arrivera guère à freiner.

Genève, 14 juin 2020, au stand de la Coordination asile Genève

Parmi les événements

25 novembre 2019, journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes: diverses manifestations, dont des marches silencieuses, se déroulent dans plusieurs endroits de Suisse. La participation est importante: femmes et hommes, de tous les âges et de diverses origines.

8 mars 2020, journée internationale des droits des femmes, qui tombe cette année sur un dimanche! Le thème des revendications est donc vite décidé: valorisation du travail domestique, de la prise en charge éducative et de tous les métiers liés aux soins, lesquels doivent fonctionner 24 h/24, 7 jours/7. En ce jour dominical, appel aux femmes à faire la grève du travail ménager, à exiger du temps pour soi et l’obtention de congés parentaux; à être solidaires avec toutes celles qui ne peuvent quitter leur fonction et avec toutes celles exploitées à travers le monde. Mais ce 8 mars coïncide avec les premières mesures sanitaires. Les collectifs ne renoncent pas, réinventent leurs actions pour occuper au maximum l’espace public et faire entendre leurs revendications, qui s’avèrent d’une pertinence particulièrement aiguë!


FACE AU COVID-19

Moins d’un an après la grève, la pandémie, quelque peu inattendue, vient à elle seule renforcer les raisons qui ont poussé un demi-million de femmes à descendre dans la rue. Le rôle essentiel du travail lié à la reproduction sociale (soins, nettoyages, entretien domestique, garde des enfants), toujours si mal reconnu, éclate au grand jour.Le projecteur se pose enfin sur ces emplois sous-payés dans les hôpitaux, les EMS, les soins à domicile, la vente, les services de nettoyage, faisant appel à une main-d’œuvre avant tout féminine, et très souvent migrante.

De façon brutale, la crise révèle et aggrave une précarité extrême qui existe bel et bien en Suisse : celle des employées de maison pouvant se retrouver d’un jour à l’autre sans ressources; celle des personnes dénommées «sans-papiers», qui contribuent largement à notre économie, mais qui, leurs jobs perdus, ne peuvent plus se nourrir ni se loger ; celle des personnes réfugiées, encore plus isolées qu’auparavant dans des centres insuffisamment organisés pour assurer leur protection sanitaire.

Face à ces réalités et ces multiples dangers, dont les femmes paient le prix fort, la Coordination romande des collectifs pour la grève féministe prend rapidement position, en adoptant 15 revendications pour une sortie féministe du Covid-19. Plusieurs points concernent les personnes issues de la migration. Déjà fortement exprimées lors du 14 juin 2020, ces revendications peuvent être consultées sur le site www.marchemondiale.ch.


14 JUIN 2020

Encore un dimanche! Nouvel appel national à une grève du travail domestique !
« On se mobilise et on s’organise malgré la crise »
L’ingéniosité est de mise ! Informations, musique, photos, marques de solidarité circulent sur les réseaux sociaux ; des forums et conférences sont proposés en ligne. Quant à l’occupation de l’espace public, elle n’est pas en reste. Dans de nombreuses villes, les collectifs mettent en place toutes sortes d’actions, colorées, inventives, percutantes, rappelant que l’égalité est encore loin d’être gagnée. De nombreuses femmes sont dans la rue.
À 15h24 retentit dans toute la Suisse « Une alerte féministe en musique ». Là où elles se trouvent, les femmes se mettent à chanter et à faire du bruit.


TOUTES AUX FRONTIèRES

Suite à la rencontre internationale « Femmes* – Migration-Refuge » qui s’est tenue à Genève en septembre 2019, initiée par la Marche mondiale des femmes et organisée dans la foulée de la Grève du 14 juin, une action féministe à l’échelle européenne était prévue à la frontière franco-italienne de Menton-Vintimille les 17 et 18 octobre 2020 (cf n° VE 174 et 175).
En raison de la pandémie, elle est reportée au printemps 2021. Mais l’organisation est en cours. Un comité transnational s’est créé, ainsi qu’un site: https:// toutesauxfrontieresfr.wordpress.com.

Une première idée proposée par les militantes suisses, encore en discussion: mener une campagne européenne du type de celle qui avait été menée par l’Appel d’elles à l’échelle suisse (pétition adressée aux autorités politiques et publication de témoignages) en vue de sensibiliser et mobiliser à cette action d’«occupation» de la frontière.

DANIELLE OTHENIN-GIRARD

*L’astérisque est utilisé pour inclure les multiples identités de genre