Décision | Persécutions des Roms en Serbie: Pas d’asile, après plusieurs viols
Ces dernières années, la question des persécutions spécifiques aux femmes et celle de la nature étatique de l’auteur des persécutions n’ont cessé d’être débattues. Mais la pratique reste désespérante. Jusqu’à quand le simple bon sens restera-t-il bafoué?
C’est ici le cas d’une famille rom de Serbie, dont le fils a eu le malheur de s’éprendre d’une femme serbe. Ainsi que le résume la Commission de recours en matière d’asile (CRA), dans une double décision du 27 juin 2003, cette famille avait déjà connu diverses brimades et vexations de la part de la population locale (insultes, jets de pierre, etc…) en raison de son origine ethnique, et ces problèmes se seraient nettement amplifiés depuis le mariage coutumier du fils. Fermement opposée à cette union, la famille serbe de l’épouse aurait usé de ses liens avec la police pour tenter de les séparer. Dès lors, le fils aurait été emmené très régulièrement au poste de police où il était maltraité. Quand les policiers ne trouvaient pas le fils, ils s’en prenaient à sa mère qui aurait subit des violences, dont notamment trois viols. Que deviennent ces persécutions dans les considérant «en droit» de la décision? En voici un extrait:
«Certes, la recourante a été maltraitée et a subi en particulier des violences sexuelles par la police à diverses reprises. Toutefois, la Commission constate, à l’instar de l’autorité de première instance, qu’il s’agit là de conflits d’ordre familial ayant pour origine des motifs de nature privée, puisqu’incités par des proches de la belle-fille de la recourante qui occupent des postes à responsabilité au sein de la police locale. Rien ne permet d’imputer ces actes aux autorités yougoslaves, ce d’autant moins que la recourante n’a pas essayé de chercher protection auprès d’instances policières supérieures. L’on ne saurait dès lors reprocher aux autorités serbes d’avoir encouragé ou toléré ces actes. En outre, il convient d’admettre que cette situation est circonscrite au plan local et que l’intéressée pourrait y échapper en déplaçant son domicile et en s’installant ailleurs sur le territoire de la Serbie et Monténégro».
L’asile est ainsi refusé, et le renvoi jugé exigible. En effet:
«Si la Commission ne minimise pas les difficultés que pourraient rencontrer les recourants en se réinstallant, elle constate que celles-ci ne seront, en tout état de cause, pas plus importantes que celles qu’affrontent leurs compatriotes demeurés dans la région».
Et qu’on ne vienne pas dire qu’il s’agit d’une décision machiste. Il y avait deux femmes parmi les trois juges appelés à trancher.
Rédaction