Le statut juridique des personnes venues en Suisse en quête de protection varie selon le stade et l’issue de la procédure d’asile. Les droits de chacun-e – travailler, faire venir sa famille restée à l’étranger, voyager, toucher l’aide sociale en cas de besoin, etc. – dépendent étroitement du statut qui lui est octroyé. Ces droits ayant un impact considérable sur la vie des personnes concernées et leurs possibilités d’action, Vivre Ensemble en propose une synthèse pour les principaux statuts juridiques utilisés dans le domaine de l’asile.
Permis N
Demandeur-se d’asile
Qui: Procédure d’asile en cours. Voir Demandeur-se d’asile dans le glossaire
Travail: interdiction durant le séjour dans un CFA (Centre fédéral d’asile). Ensuite, une fois que la personne requérante d’asile a été attribuée à un canton, une autorisation provisoire d’exercer une activité lucrative peut être octroyée sous certaines conditions : situation sur le marché du travail, priorité aux travailleurs suisses. Il est obligatoire d’obtenir une autorisation avant le début de l’activité professionnelle.
Aide sociale: oui, mais barème spécial, inférieur à l’aide sociale normale (p.ex. à Genève, deux fois plus bas).
Regroupement familial: non
Mariage en Suisse: oui (des difficultés peuvent se poser par contre pour réunir les documents nécessaires, notamment ceux émanant du pays d’origine)
Scolarisation des enfants: oui en école, pour la scolarité obligatoire et post-obligatoire. Difficultés d’accès à l’apprentissage, qui implique un contrat de travail (dérogations possibles mais rares)
Voyage à l’étranger: non, sauf motifs exceptionnels
Liberté d’établissement en Suisse (choix du canton): non, changement de canton possible seulement à certaines conditions (invocation du principe d’unité de la famille) ou avec l’accord des deux cantons.
Renouvellement: tous les 6 mois, tant que dure la procédure
Possibilité d’obtenir une autorisation de séjour (permis B) ou d’établissement (permis C): dépend de l’issue de la procédure d’asile (à permis B réfugié, permis F réfugié, permis F, attestation de délai de départ). Possibilité de demander un permis B après 5 ans dans certains cas exceptionnels (« cas de rigueur »). Seules les personnes titulaires d’un permis B peuvent demander un permis C.
Naturalisation: non
Permis B réfugié
Autorisation de séjour pour réfugié-e
Qui: Personne reconnue comme réfugiée et à qui l’asile a été accordé. Voir Réfugié-e dans le glossaire
Travail: oui. Dans la pratique, problèmes de reconnaissance des diplômes, d’équivalences, etc.
Aide sociale: oui, barème ordinaire
Regroupement familial: oui, pour la famille nucléaire (conjoint-e et enfants mineurs)
Mariage en Suisse: oui (des difficultés peuvent se poser par contre pour réunir les documents nécessaires, notamment ceux émanant du pays d’origine)
Scolarisation des enfants: oui, y compris apprentissage
Voyage à l’étranger: oui, sauf dans le pays d’origine
Liberté d’établissement en Suisse (choix du canton): non, changement de canton soumis à l’autorisation des cantons (refusé notamment si la personne dépend de l’aide sociale)
Renouvellement: automatiquement tous les 12 mois. Révocation possible en cas de voyage dans le pays d’origine, de délit grave ou de menace pour la sécurité de la Suisse.
Possibilité d’obtenir une autorisation d’établissement (permis C): possibilité de demander un permis C après 10 ans (5 ans dans des cas d’intégration «exceptionnelle»)
Naturalisation: Depuis 2018, la Loi sur la nationalité (2018) ne donne accès à la naturalisation qu’avec le permis C.
Permis F réfugié
Admission provisoire pour réfugié-e
Qui: Personne reconnue comme réfugiée mais à qui l’asile n’a pas été accordé. Voir Réfugié-e admis-e provisoirement dans le glossaire
Travail: oui, mais obstacles nombreux, à commencer par une méconnaissance du permis par les employeurs, freinés par l’intitulé « provisoire », et des problèmes de reconnaissance des diplômes, d’équivalences, etc.
Aide sociale: oui, barème ordinaire
Regroupement familial: seulement après 3 ans de séjour, et sous conditions (logement approprié, indépendance financière, etc.). Ne concerne que la famille nucléaire (conjoint-e et enfants mineurs).
Mariage en Suisse: oui (des difficultés peuvent se poser par contre pour réunir les documents nécessaires, notamment ceux émanant du pays d’origine)
Scolarisation des enfants: oui, y compris apprentissage
Voyage à l’étranger: oui, sauf dans le pays d’origine
Liberté d’établissement en Suisse (choix du canton): non, changement de canton soumis à l’autorisation des cantons (refusé notamment si la personne dépend de l’aide sociale)
Renouvellement: automatiquement tous les 12 mois. Levée de l’admission provisoire possible en cas de voyage dans le pays d’origine, de délit grave ou de menace pour la sécurité de la Suisse.
Possibilité d’obtenir une autorisation de séjour (permis B) ou d’établissement (permis C): possibilité de demander un permis B après 5 ans, sous réserve de conditions (indépendance de l’aide sociale notamment) et de double acceptation du canton et de la Confédération. Seules les personnes titulaires d’un permis B peuvent demander un permis C (5 ou 10 ans après obtention du permis B).
Naturalisation: Depuis 2018, la Loi sur la nationalité (2018) ne donne accès à la naturalisation qu’avec le permis C.
Permis F pour étranger-ère
Admission provisoire pour étranger-ère
Qui: Admission provisoire, prononcée quand la demande d’asile est rejetée mais l’exécution du renvoi n’est pas licite, pas raisonnablement exigible ou pas possible. Voir Personne admise provisoirement dans le glossaire
Travail: oui, mais obstacles nombreux, à commencer par une méconnaissance du permis par les employeurs, freinés par l’intitulé «provisoire», les difficultés à changer de canton pour y accepter un poste. Une taxe spéciale de 10%, prélevée sur les revenus, a été supprimée car considérée comme un obstacle à l’embauche
Aide sociale: oui, mais barème spécial, inférieur à l’aide sociale normale (p.ex. à Genève, deux fois plus bas).
Regroupement familial: seulement après 3 ans de séjour, et sous conditions (logement approprié, indépendance financière, etc.). Ne concerne que la famille nucléaire (conjoint-e et enfants mineurs).
Mariage en Suisse: oui (des difficultés peuvent se poser par contre pour réunir les documents nécessaires, notamment ceux émanant du pays d’origine)
Scolarisation des enfants : oui, y compris apprentissage
Voyage à l’étranger: non, sauf motifs exceptionnels. Après trois ans une fois par année, si la personne n’est pas dépendante de l’aide sociale.
Liberté d’établissement en Suisse (choix du canton): non, changement possible seulement à certaines conditions (invocation du principe d’unité de la famille) ou avec l’accord des deux cantons.
Renouvellement: automatiquement tous les 12 mois. Levée de l’admission provisoire possible en cas de changement de situation dans le pays d’origine (disparition des obstacles à l’exécution du renvoi). Dans les faits, l’immense majorité des personnes restent durablement en Suisse.
Possibilité d’obtenir une autorisation de séjour (permis B) ou d’établissement (permis C): possibilité de demander un permis B après 5 ans, sous réserve de conditions (indépendance de l’aide sociale notamment) et de double acceptation du canton et de la Confédération. Seules les personnes titulaires d’un permis B peuvent demander un permis C.
Naturalisation: Depuis 2018, la Loi sur la nationalité (2018) ne donne accès à la naturalisation qu’avec le permis C.
Permis S personnes à protéger
Qui : Le permis S est une protection collective accordée à un groupe déterminé pour la durée d’une menace grave, en particulier en cas de guerre. Le Conseil fédéral fixe les critères d’obtention de la protection provisoire.
Travail : Oui. L’exercice d’une activité lucrative est autorisé dès l’arrivée des personnes. L’exercice de l’activité lucrative reste soumis à une autorisation cantonale.
Aide sociale : Oui. Le barème qui s’applique est celui similaire aux personnes en procédure d’asile et titulaires d’une admission provisoire, soit inférieure à l’aide sociale ordinaire
Regroupement familial : Oui, pour la famille nucléaire (conjoint·e et enfants mineurs)
Mariage en Suisse: oui (des difficultés peuvent se poser pour réunir les documents nécessaires, notamment ceux émanant du pays d’origine)
Scolarisation des enfants: oui
Voyage à l’étranger: oui
Liberté d’établissement en Suisse (choix du canton): oui, les liens familiaux ou amicaux sont privilégiés pour déterminer le lieu de résidence. Si aucun lien de connaissance n’est mentionné, la clé de répartition cantonale s’applique.
Validité : La validité du permis S est limitée à un an, mais peut être prorogée. Après au plus tôt cinq ans, les personnes à protéger reçoivent une autorisation de séjour B qui prend fin au moment où la protection provisoire est levée. Dix ans après l’octroi de la protection provisoire, le canton peut délivrer une autorisation d’établissement (permis C) à la personne à protéger.
Naturalisation: La personne à protéger peut déposer une demande de naturalisation si elle obtient une autorisation d’établissement (permis C).
Permis C réfugié
Autorisation d’établissement pour réfugié-e
Qui: Personne reconnue comme réfugiée qui a pu obtenir une autorisation d’établissement, après avoir séjourné un certain nombre d’années en Suisse au bénéfice d’un permis B réfugié et rempli des conditions, notamment d’intégration.
Travail: oui. Dans la pratique, des problèmes de reconnaissance des diplômes, d’équivalences, etc. peuvent se poser.
Aide sociale : barème ordinaire
Regroupement familial: oui, pour la famille nucléaire (conjoint-e et enfants mineurs)
Mariage en Suisse: oui (des difficultés peuvent se poser par contre pour réunir les documents nécessaires, notamment ceux émanant du pays d’origine)
Scolarisation des enfants: oui, y compris apprentissage
Voyage à l’étranger: oui. Un voyage dans le pays d’origine peut entraîner la révocation de la qualité de réfugié (mais pas forcément celle du permis C).
Liberté d’établissement en Suisse (choix du canton): oui, sauf si la personne dépend de l’aide sociale
Renouvellement: automatiquement tous les 3 ou 5 ans. Révocation du permis C possible dans les cas prévus à l’art. 63 LEtr (p.ex. délit grave, menace pour la sécurité de la Suisse ou dépendance à l’aide sociale). Si la personne a la qualité de réfugié, elle ne peut toutefois pas être renvoyée (à permis F réfugié). Révocation de la qualité de réfugié possible, notamment en cas de voyage dans le pays d’origine ou de modification notable de la situation dans le pays d’origine. Dans ces cas, le permis C peut malgré tout être conservé à titre d’étranger-ère si les conditions d’octroi sont remplies.
Naturalisation: demande possible après 10 ans
Attestation de délai de départ
Personnes déboutées ou frappées d’une NEM
Qui : Personne dont la demande d’asile a fait l’objet d’une décision de renvoi exécutoire par décision ordinaire ou de non-entrée en matière; personne ayant demandé le réexamen de sa demande d’asile après une décision négative; personne ayant déposé plusieurs demandes d’asile en Suisse. Voir Débouté-e et Décision de non-entrée en matière (NEM)
Travail: non (dans des cas très particuliers, les autorités cantonales peuvent prolonger l’autorisation de travail au-delà du délai de départ)
Aide sociale: non. Possibilité de demander l’«aide d’urgence», une prestation de survie, remise la plupart du temps sous forme de bons ou en nature (barquettes de nourriture déjà préparées, etc.), rarement en espèces (environ 10 francs par jour, parfois moins).
Regroupement familial: non
Mariage en Suisse: non, sauf si un droit au séjour découle du mariage
Scolarisation des enfants: oui mais seulement en école (pas d’apprentissage)
Voyage à l’étranger: non (très rares exceptions pour les procédures extraordinaires)
Liberté d’établissement en Suisse (choix du canton): non
Renouvellement: variable, la personne doit se présenter régulièrement (tous les mois, toutes les semaines, voire plus souvent) auprès des autorités cantonales en charge de la migration pour faire viser son attestation de délai de départ.
Possibilité d’obtenir une autorisation de séjour (permis B) ou d’établissement (permis C): non. Exceptions dans certains cas pour des raisons de protection de la vie familiale, ou dans des «cas de rigueur», après au moins 5 ans de séjour.
Naturalisation: non