Lutte contre les renvois | Mobilisation citoyenne en pays vaudois: Hommage aux militants de base
Si Lausanne a été au cœur de la mobilisation contre le renvoi des «523» réfugiés déboutés, des refuges et des actions de soutien se sont également développés dans tout le canton. Pour saluer ce formidable élan de solidarité et rendre honneur aux nombreuses personnes qui, depuis plusieurs mois, s’engagent au quotidien auprès des requérants menacés de renvoi, voici un retour sur des visites au refuge de Vevey effectuées pendant la période des fêtes de fin d’année.
Comme la famille Demitri à Lausanne, la famille Jakupi à Morges ou la famille Krasniqi à Moudon, les Memetovic sont devenus le symbole de la résistance contre les expulsions dans la Riviera. Un groupe de bénévoles constitué par une dizaine de personnes mène un véritable travail de fourmis dans l’Est vaudois. Pas de récréation pour ces hommes et femmes qui, pendant la période des fêtes de fin d’année ont maintenu la flamme des campagnes de sensibilisation malgré la trêve annoncée par le Conseiller d’Etat Jean Claude Mermoud, en gelant les renvois jusqu’au 3 janvier 2005.
Des paroles et des actes
Devant le centre paroissial Sainte-Claire où la famille Memetovic se réfugie depuis quelques mois, le groupe est représenté par une sentinelle chargée de donner l’alerte en cas de descente de la police.
«Notre action est totalement pacifique. Nous ne pourrons pas nous opposer si la police investit le site pour expulser les personnes par la force. Mais nous resterons des témoins oculaires. Nous voulons simplement présenter la réalité cachée des personnes expulsées qui n’apparaît jamais dans le discours officiel», confie un bénévole.
Joignant les paroles aux actes, les militants distribuent tous les samedis matin sur la grande place du marché de Vevey, des tracts qui retracent l’histoire des Memetovic depuis le déclenchement de la guerre en Serbie, pays d’origine de la famille, et le dépôt de sa demande d’asile en Suisse en 1999.
Une intégration exemplaire
Cela fait cinq ans que Sadrija Memetovic, son épouse et leurs trois enfants vivent en Suisse comme demandeurs d’asile. L’intégration de la famille ne laisse aucun doute. Les époux Memetovic avaient des emplois stables jusqu’au retrait de leur permis de travail en automne dernier, leur fille de dix-huit ans fait un apprentissage d’employée de commerce et les deux derniers de la maison suivent normalement leur scolarité obligatoire. Une image qui contraste avec celle des «requérants d’asile profiteurs» brandie comme arme de campagne électorale, par le camp des xénophobes.
Très affectée par la décision de l’Office fédéral des réfugiés, la jeune fille ne cache pas sa déception. Elle veut surtout comprendre pourquoi sa famille est sommée de quitter la Suisse comme des malpropres:
«J’ai de plus en plus le sentiment que notre sort se règle sur la base d’une loterie, car les raisons profondes m’échappent malgré ma volonté de comprendre», regrette Shpresa.
Un travail de sensibilisation
Le groupe de résistance a réussi le pari de mobiliser une cinquantaine de personnes au cours des campagnes de sensibilisation dans la ville. Il multiplie les actions pour faire entendre sa voix. Tandis que le manifeste de protestation contre les renvois récolte des signatures, le groupe appelle également aux contributions financières pour aider la famille actuellement dans l’impossibilité d’exercer une activité lucrative. D’autres organisations actives à Vevey viennent s’associer au groupe des bénévoles qui a déjà obtenu le soutien de l’antenne locale de la section suisse d’Amnesty international.
Manuel L. Hiol
Vaud: la solidarité continue!
Au moment de rédiger ces lignes, le 21 janvier, nous venions d’apprendre la décision du Conseil d’Etat vaudois qui confirmait la nécessité pour les personnes visées de quitter le territoire tout en suspendant les mesures de contrainte pour les familles avec enfants, les femmes kosovares isolées ou provenant de Srebrenica (sic). Cette étrange non-décision semble enterrer définitivement toute idée d’une sensibilité différente en matière d’asile de la part du canton. Par ailleurs, aucun débouché n’est donné à cette suspension qui ne vise que l’exécution forcée des renvois, et non les décisions en tant que telles. Le gouvernement annonce toutefois vouloir faire le point après trois mois: l’affaire n’est donc pas encore tout à fait close…
Réd.