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Notre regard

Genève | Accompagnement des personnes frappées de NEM

Le foot, c’est le bon espoir!

Pour les pensionnaires du Lagnon, le foyer où sont logées à Genève les personnes frappées d’une non-entrée en matière (NEM), jouer au football représente un moment privilégié dans la semaine. A part l’aide d’urgence qui leur permet de survivre, rien ne leur est proposé. Aucun encadrement. Comme ils n’ont pas le droit de travailler, ils passent leur journée à «zoner». Sans horaire à respecter, on devient rapidement déstructuré.

Mardi, 10 heures, stade des Evaux, Genève. Une douzaine de jeunes gens, la plupart Africains s’échauffent autour du terrain de foot. «En Afrique, on aime le foot, alors, bien sûr on a envie de jouer! Ça nous oblige à nous lever le matin et à nous parler. Avant, on habitait ensemble mais on ne se connaissait pas. Grâce au foot, on se connaît mieux. Le foot, c’est le bon espoir!» «Ça nous permet de rester actif, on joue pour rester en bonne santé, pour ne pas tomber malade de la tête. Avant, je n’étais pas bien. Depuis que je joue au foot cela va mieux.»

Une bonne ambiance

Quelques personnes venant d’autres foyers rejoignent le groupe. «Mon sport favori, c’est le rugby, mais je n’ai pas trouvé d’équipe. Alors je viens m’entraîner avec les gars du Lagnon. C’est sympa, il n’y a pas de discrimination, même si on vient de pays différents: Cameroun, Côte d’Ivoire, Nigéria… Les gars sont solidaires. On est là pour jouer ensemble!» «Le foot nous réunit, nous permet de nous connaître. On vient de foyers différents et l’équipe met une bonne ambiance entre nous.»

Oublier le quotidien

10h30, on forme les équipes avec l’aide de Samuel Ninck, accompagnateur bénévole et de Timothée Wuillemin, jeune médecin civiliste. On choisit l’arbitre. La partie peut commencer. Au bord du terrain, Pierre Dürrenmatt, pasteur et responsable à l’Aumônerie genevoise oecuménique auprès des requérants d’asile (Agora), assume le rôle de supporter, de juge de touche et de porteur de thé: «c’est une grande joie de les regarder jouer. Ils peuvent, pendant un moment, oublier leur situation. Le mois passé, une classe du canton de Lucerne est venue en visite dans le cadre d’une semaine civique. Cinq collégiens ont participé à la partie de foot du mardi. Tout le monde a eu beaucoup de plaisir!»

Une présence indispensable

Aux environs de midi, la partie s’achève: 8 à 0 pour les Rouges! Pour Samuel Ninck, présent auprès des joueurs depuis plus d’une année, la situation reste fragile: «chaque fois c’est difficile de les faire bouger. Le matin, n’ayant aucune obligation, ils n’ont pas forcément envie de se lever. Ou alors, par manque de repères, ils ont oublié que c’est mardi ! Mais finalement, il y a toujours quelques motivés qui entraînent les autres. Petit à petit, ils se responsabilisent. Ils se chargent d’apporter le ballon et de laver les maillots. Néanmoins, ils ont besoin d’être accompagnés.»

Faire quelque chose ensemble

Timothée côtoie l’équipe depuis six mois: «Au foyer, il n’y a pas à proprement parler de vie commune. Certains disparaissent, des nouveaux arrivent mais chacun vit pour soi. Le foot exprime leur volonté de faire quelque chose ensemble. C’est aussi une porte ouverte pour sortir de l’isolement. Il se passe parfois des choses positives: suite à une demande de notre part, le FC Sion nous a envoyé dix billets d’entrée pour assister au match contre Galatasaray, au stade de la Praille. Cela reste une soirée mémorable! Les joueurs du Lagnon aimeraient rencontrer d’autres équipes. Ils ont l’envie de progresser, cela les motiverait encore davantage.»

Propos recueillis par Nicole Andreetta