Humeur | Renvoyons, renvoyons…
T., ressortissant afghan, a passé 5 mois et demi en détention en vue d’un refoulement vers son pays d’origine… Or le psychiatre qui le suivait depuis plusieurs années soulignait un état de stress post-traumatique lié aux événements vécus en Afghanistan et une péjoration de l’état de santé psychique avec des idées suicidaires non scénarisées. Le médecin soulignait également que Monsieur T. n’était pas apte à voyager…
La situation en Afghanistan se détériore jour après jour: on n’y compte plus les attentats, les morts; la corruption y est endémique, jusque dans les rangs des plus hauts dignitaires; les droits de l’homme y sont bafoués… J’ai peine à imaginer que nos autorités puissent envisager de renvoyer des Afghans chez eux, et que pour ce faire, elles n’hésitent pas à les détenir plusieurs mois dans l’attente d’obtenir un laissez-passer des autorités afghanes !! Tout comme je trouve inadmissible les renvois d’Irakiens, même s’ils sont originaires du Kurdistan, région qui n’est de loin pas «pacifiée»… Et que va-t-il se passer pour les ressortissants du Pakistan déboutés (deux situations connues en Valais), dont le renvoi devrait être planifié? Comment osera-t-on justifier un rapatriement dans ce pays où les civils sont les premières victimes d’attentats sanglants et de la violence politique?
Le comble des combles, c’est le renvoi en Cisjordanie d’une famille palestinienne après 9 ans de séjour en Suisse… Un renvoi qui s’avère déjà plus ou moins irréalisable si l’on tient compte de l’attestation de la Délégation générale de Palestine à Berne. Celle-ci confirme que, selon les accords d’Oslo entre l’Autorité palestinienne et Israël, les réfugiés palestiniens et ceux vivant dans la diaspora ne sont pas en mesure d’obtenir une carte d’identité palestinienne, document indispensable qui permettrait de vivre ou de retourner dans les territoires se trouvant sous l’autorité palestinienne.
Si l’on suit la logique de l’ODM, tout va bien en Afghanistan, en Irak, au Pakistan et en Palestine, puisque les renvois y sont programmés et exécutés dans la mesure où un laissez-passer serait délivré par les autorités de ces pays… Jusqu’où irons-nous dans l’indécence ou l’hypocrisie?
Françoise Jacquemettaz