Le Courrier | Des requérants d’asile préparent leur premier tournoi de football

Article de Sarah Budasz paru dans Le Courrier le 27 avril 2013. Cliquez ici pour voir l’article.

Il fait beau sur le terrain de football du Bois-des-frères où s’échauffent une dizaine de joueurs en maillots jaunes, sous le regard d’Eric Sommer, de l’association Agora (Aumônerie genevoise oecuménique auprès des requérants d’asile et des réfugiés).

«Joli nom, le Bois-des-frères, ça nous va bien», sourit-il. Retraité et bénévole, il entraine tous les mardis cette équipe composée de requérants d’asile hébergés dans les différents foyers de Genève. «Ils viennent plus ou moins régulièrement, en général ils sont une petite dizaine, mais ça tourne.» A la faveur du soleil, ils sont près d’une vingtaine ce matin. De l’autre côté du terrain, une équipe d’élèves du cycle de Montbrillant s’entraîne aussi. Leur prof vient proposer une rencontre amicale pour la fin de l’entraînement. «Notre premier match contre une autre équipe!», s’enthousiasme Eric Sommer.

«C’est bon pour le moral, le cerveau, la santé»

Certains viennent pour la première fois, d’autres sont des habitués à l’instar de Lamine, présent depuis cinq ans. «Au début je faisais partie d’un club, mais depuis que je n’ai plus de permis F, ça n’est pas possible, il pourrait perdre sa licence. C’est pareil pour le travail. Aucun employeur ne veut prendre le risque.» Blessé à la jambe lors d’une précédente session, il est venu assister à l’entraînement comme spectateur: «Ça permet de sortir et de ne pas se prendre la tête, de penser à autre chose. Si on reste à la maison, on pense tout le temps à notre situation, ce n’est pas sain.»

Un avis partagé par Alfred, également requérant d’asile: «C’est bon pour le moral, le cerveau, la santé.» Surnommé Obama, il est le capitaine de l’équipe. Parce qu’il est toujours calme et régulier, selon son entraîneur. «Et parce que je parle anglais!» Un plus certain pour être à la tête de cette équipe cosmopolite où Guinéens, Kenyans, Biélorusses, Somaliens, Tibétains, Erythréens, Tchétchènes se passent la balle. «On se comprend, on arrive à s’entendre en général.»

Créer des liens

Lamine et Obama jouent d’ailleurs entre amis le jeudi, au stade de Varembé. «J’aime le foot depuis que je suis petit, je jouais déjà en Guinée», raconte Lamine. «C’est important la socialisation. Les joueurs font des rencontres, amènent leurs amis, se passent des infos, créent des liens», témoigne Eric Sommer. «Certains viennent avec l’idée qu’on va leur trouver un club, il faut parfois tempérer leurs ambitions.»

Créée il y a cinq par Pierre Durrenmatt, coordinateur de l’Agora, dans le cadre des autres activités de l’association (cours de français et d’informatique, activités pour les enfants), l’équipe disputera ses premiers matchs officiels dans le cadre du tournoi de l’amitié organisé par le FC Satigny, le mercredi 8 mai. «On prend les plus réguliers, il faut récompenser ceux qui sont venus courir deux heures sous la pluie certains mardis», sourit Eric Sommer.

Ce mardi matin, la rencontre avec le cycle de Montbrillant s’achève par une défaite, 2 à 1. Pas grave, «c’était notre premier match», concède Eric Sommer. «On gagnera le tournoi!», assurent les joueurs, enthousiastes.