RTS, L’invité du 12h30 | Léonard Vincent publie « Les Erythréens » et leur donne la parole
Léonard Vincent a été interviewé par Natacha Van Cutsem dans le 12h30 du 10 février 2016.
Léonard Vincent a présenté son dernier livre « Les Erythréens »:
Dans son ouvrage « Les Erythréens » (Editions Payot & Rivages), le journaliste français Léonard Vincent donne la parole à ce peuple dirigé par un dictateur alcoolique et paranoïaque. Des êtres pris en otage attendant le jour de la délivrance ou partant sur les routes de l’exil.
Il a également commenté les propos tenus par Thomas Aeschi (UDC) dans un article paru le 10 février dans le Temps. Dans cet article, M. Aeschi a déclaré que « La Suisse doit dialoguer avec l’Erythrée, qui n’est pas l’enfer que l’on croit ».
Natacha Van Cutsem: « Plusieurs parlementaires suisse sont partis en Erythrée pour comprendre ce qui amène les Erythréens à demander l’asile en Suisse. L’un de ces politiciens, Thomas Aeschi, est resté 6 jours sur place et s’est exprimé dans Le Temps aujourd’hui. Il se défend de ne pas être tombé dans la propagande du régime d’Asmara et il dit ceci ‘Ce pays n’est pas l’enfer que l’on croit’. Est-ce que ça vous fait bondir? »
Léonard Vincent: « Cela me fait plutôt rire, j’espère pour lui qu’il a ramené des spécialités locales et une paire de sandales et pris de belles photos. C’est à peu près tout ce qu’il aurait pu ramener dans les conditions dans lesquelles il est parti. Le voyage a été manifestement organisé par les autorités érythréennes. On a déjà vu cela dans l’histoire de la politique européenne. Je me souviens d’un petit film de la radio-télévision belge où on voyait une délégation de parlementaires belges en Corée du Nord et c’était absolument grotesque. Là c’est la même chose. Cette interview est parfaitement hallucinante, dans une réponse M. Aeschi dit qu’il était parti pour voir de ses propres yeux quelles étaient ces violations de l’homme dont parle l’ONU, et puis dans la phrase après il dit qu’il n’avait pas pour mandat de vérifier la situation des droits de l’homme. Ce qui est sûr c’est que ces parlementaires ne sont pas allés à la grande prison Karsheli au centre d’Asmara où se trouve un certain nombre de prisonniers politiques depuis plus de 15 ans, dans des conditions absolument épouvantables. Ils n’ont pas demandé non plus d’aller visiter le bagne d’EiraEiro, dans les montagnes, où se trouvent les prisonniers politiques de septembre 2001 et plusieurs journalistes, dont certains sont morts et enterrés dans le sable quelque part là-bas. (…) On a encore une fois une visite guidée avec des gens qui ont des certitudes et qui sont allés dîner avec les autorités, qui ont logé à l’Hotel Intercontinental, qui ont pris de jolies photos de ce magnifique pays et qui reviennent avec des certitudes. Tout cela est assez grotesque, en plus d’être obscène et dangereux. Pour leur carrière d’abord, mais aussi dangereux pour ceux qui sont dépendant des décisions qui sont prises par des autorités qui se fondent sur leur racontards pour prendre par exemple des décisions de renvoi dans le pays ».