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Le HCR utilise des drones au service des populations déracinées en Afrique

Ces aéronefs télépilotés permettent d’évaluer les besoins des personnes ayant fui les conflits et la persécution au Mali, au Nigeria et au Soudan du sud.

Article publié sur le site du HCR, le 21 novembre 2017. Cliquez ici pour lire l’article sur le site du HCR.

Les drones évoquent pour beaucoup les aéronefs télépilotés qu’emploient les militaires pour larguer des missiles. Mais dans les régions d’Afrique affectées par les conflits, des organisations d’aide humanitaire comme le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, utilisent d’autres versions de cette technologie pour planifier les opérations de secours et sauver des vies.

Les drones servent de plus en plus souvent dans des pays comme le Niger, le Burkina Faso et l’Ouganda pour cartographier les grandes populations de personnes déracinées, pour évaluer leurs besoins et trouver la meilleure manière de leur venir en aide. Ils servent également à évaluer les dégâts environnementaux que provoquent ces déplacements.

«Cette technologie permet de nombreuses applications pacifiques, dans le domaine des droits de l’homme, de la fourniture de l’aide humanitaire ou la cartographie des installations de réfugiés ou de déplacés internes», explique Andrew Harper, le responsable de l’Unité du HCR pour l’Innovation, en soulignant «l’énorme» potentiel des drones.

Cette technologie arrive à maturité à un moment où le nombre de personnes déracinées par les guerres et la persécution bat tous les records, avec plus de trois millions d’entre elles déplacées au sein de leurs pays ou déracinées au-delà des frontières par les conflits sévissant au Soudan du Sud, au Nigeria et au Mali.

Dans la région de Diffa à l’est du Niger, la nécessité d’une meilleure gestion des informations revêt un caractère de plus en plus urgent après les attaques de Boko Haram ayant forcé des dizaines de milliers de personnes à fuir leurs foyers ou des camps de réfugiés.

Selon les statistiques de fin octobre, plus de 250’000 hommes, femmes et enfants ont été déplacés depuis 2015. Ils sont nombreux à avoir trouvé refuge dans plus de 100 sites informels qui sont apparus des deux côtés de la principale route est-ouest de la capitale, Niamey. Deux de ces camps accueillent quelque 20’000 personnes.

Cette foule désespérée comprend des déplacés internes, d’anciens réfugiés qui sont rentrés au Niger et des réfugiés du Nigeria. Exposée aux raids de Boko Haram, cette population en quête de sécurité et d’assistance est très mobile, ce qui complique son suivi et sa cartographie.

Le HCR s’est adressé à Aziz Kountche, un constructeur de drones autodidacte, pour mieux comprendre la dynamique des déplacements de cette population. Il a créé un drone simple mais efficace, qui ressemble à un modèle réduit d’avion. Le T-800 M a obtenu l’autorisation du gouvernement pour opérer à proximité du front. Il a pris des photos et des vidéos qui permettent de cartographier précisément de nouvelles installations, ce qui sera déterminant pour organiser l’intervention humanitaire sur un territoire de la taille de la Belgique.

«En utilisant les images prises par des drones, nous voulons améliorer notre service de cartographie pour une meilleure analyse du contexte», déclare Benoit Moreno, employé du HCR en charge des relations extérieures. Les images ont permis à l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés ainsi qu’à ses partenaires de visualiser la situation dans les sites, d’identifier les besoins et d’apporter les nombreux services requis, y compris les systèmes d’alimentation en eau, les latrines, les infrastructures scolaires et de soins de santé. Elles ont également permis d’enregistrer les personnes déplacées.

[caption id="attachment_39569" align="aligncenter" width="966"] Une image aérienne prise par un drone et montrant des tentes et des abris qui logent des déplacés internes autour du village de Kindjandi au Niger. © HCR[/caption]

Le petit avion télécommandé a servi à prendre des vues aériennes détaillées des deux camps de la région, à savoir le camp de réfugiés de Sayam Forage et le camp de déplacés internes de Kabelawa, et il a permis de réaliser l’ampleur des importants dégâts environnementaux provoqués par les populations qui coupent du bois pour faire du feu autour des installations spontanées dans cette région où deux tiers du territoire est touché par la désertification. Le prochain survol par un drone devrait intervenir au début de l’année prochaine.

Au Burkina Faso voisin, où plus de 32’000 réfugiés maliens vivent encore quatre ans après avoir fui le conflit dans leur patrie, le HCR utilise un drone encore plus sophistiqué pour surveiller les besoins des réfugiés. Nombreux d’entre eux vivent dans la région aride du Sahel, craignant trop de retourner au Mali en dépit de l’accord de paix signé l’année dernière.

Le HCR a récemment utilisé un drone à quatre hélices pour survoler le camp tentaculaire de Goudoubou (12 kilomètres de long et cinq kilomètres de large) qui accueille quelque 9640 réfugiés près de la ville de Dori. Contrairement au drone utilisé à Diffa, celui-ci a utilisé une caméra vidéo pour filmer les abris, l’école primaire, le marché, le centre de soins et la route de Dori.

Dans cet environnement rude, beau et s’étendant à l’infini, l’emploi du drone a fourni des informations vidéo précieuses sur la façon d’apporter de l’aide et de faciliter la vie quotidienne dans une région dotée de peu de ressources naturelles et d’infrastructures.

«Les vues aériennes et la cartographie du camp permettent de refondre nos efforts de réponse aux besoins à court terme et à long terme. Nous pouvons par exemple suivre l’évolution des endroits où se trouvent les abris ainsi que les mouvements au sein des camps. Nous pouvons également documenter l’évolution du contexte environnemental et des ressources naturelles disponibles dans les camps et leurs alentours. Ceci permettra ainsi de mieux prévenir et d’atténuer les risques de catastrophes naturelles», explique Alpha Oumar, le chef du bureau du HCR sur le terrain à Dori.

Au même moment, en Ouganda, où se trouvent plus d’un demi-million de réfugiés et de demandeurs d’asile sud-soudanais, le HCR espère pouvoir utiliser des drones pour observer la croissance et l’évolution des sites d’installation de réfugiés. Le projet se concentrera sur le camp de Bidibidi ouvert en août et qui accueille actuellement plus de 200’000 personnes ayant fui la récente éruption de violences en juillet à Juba.

[caption id="attachment_39570" align="aligncenter" width="640"] Camp de Bidibidi. Photo: Climate Centre / flickr[/caption]

Dans le cadre d’une stratégie d’utilisation plus systématique de drones, ces engins serviront à présenter l’installation à différentes étapes, depuis ses débuts en tant que site naissant en août dernier jusqu’à devenir aujourd’hui l’un des plus vastes complexes d’accueil de réfugiés au monde.

Pour le HCR, ces projets n’en sont probablement qu’à leur début. «Nous devons saisir les opportunités technologiques pour le présent, et à fortiori, pour l’avenir», explique Andrew Harper.

«C’est l’exemple d’une technologie disponible subitement et dont nous devons nous servir pour notre organisation. Si nous parvenons à les mettre en oeuvre pleinement, nous pourrons non seulement faire notre travail plus efficacement mais aussi mieux aider les personnes relevant de notre compétence.»