ADEM | Familles à l’aide d’urgence et dignité: antinomie dans les faits
A la suite de visites effectuées dans le foyer d’hébergement collectif de Vennes, dans lequel sont accueillis des requérants d’asile déboutés à l’aide d’urgence, y compris des familles, l’Alliance pour la Défense des Enfants Migrants (ADEM) souhaite rappeler les grands principes en matière de droits humains d’un hébergement et d’un encadrement respectueux des droits de l’enfant dans le canton de Vaud. L’ADEM rappelle l’importance d’offrir aux familles avec enfants des logements adaptés à leurs besoins, qui respectent leur vie privée et familiale. Quel que soit le statut légal des parents, le respect des droits de l’enfant doit être garanti, dans un climat de confiance et de sécurité nécessaires à son développement personnel, physique et psychique. Les enfants migrants sont avant tout des enfants qui doivent être traités en tant que tels, dans le respect de la dignité humaine.
L’article est publié dans son intégralité sur le site de l’Alliance pour la Défense des Enfants Migrants (ADEM). Cliquez ici pour lire le document dans son intégralité. Nous en reproduisons ci-dessous une première partie:
Familles à l’aide d’urgence et dignité humaine : une association antinomique dans les faits
Frappés d’une décision de non-entrée en matière exécutoire ou d’une décision d’asile négative entrée en force, à laquelle un délai de départ a été imparti, certains enfants migrants accompagnés de leurs parents se retrouvent dans des hébergements collectifs, avec comme seul moyen de subsistance l’aide d’urgence (art. 80a ss de la loi sur l’asile (LAsi) et art. 3 al. 3 let. a de l’ordonnance 2 sur l’asile relative au financement (OA2)). Droit fondamental inscrit dans la Constitution suisse, l’aide d’urgence doit permettre à la personne concernée « d’être aidé[e] et assisté[e] et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine » (art. 12 Cst.). Régie par le droit cantonal, l’aide d’urgence est en principe octroyée sous forme de prestations en nature et comprend le logement, en règle générale, dans un lieu d’hébergement collectif, la remise de denrées alimentaires et d’articles d’hygiène, les soins médicaux d’urgence ainsi que l’octroi, en cas de besoin établi, d’autres prestations de première nécessité » (voir p.ex. l’art. 4a al. 3 de la loi sur l’action sociale vaudoise (LASV)). Dans ce cadre, le droit à la dignité humaine, que l’on retrouve comme garantie constitutionnelle (art. 7 Cst.), également inscrit dans la Charte des Nations Unies et dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, doit être respecté et protégé.
Se pose alors la question du respect de ce droit à la dignité, lorsque des familles avec enfants en bas âge se retrouvent dans des logements modestes situés en périphérie, muni de grillages et surveillés par des agents de sociétés de sécurité privées, accompagnés ponctuellement par des assistants sociaux. Composées parfois de six individus installés dans une chambre de 40 m2, il arrive que ces familles partagent une salle de bain, une toilette et une cuisine avec d’autres personnes, et ce durant plusieurs mois. Tel est notamment le cas à l’hébergement collectif de Vennes, où l’ADEM a rencontré deux familles qui illustrent ce constat :
« Originaires d’Ethiopie, Madame et Monsieur vivent depuis plus d’un an dans une chambre avec leurs quatre enfants. Les deux aînés âgés de 11 et 13 ans vont à l’école, pendant que les plus petits de 3 et 4 ans demeurent avec leurs parents. Ceux-ci n’ont pas accès à la garderie en raison de leur statut. Les tickets de transport pour rejoindre la ville étant limités, ils restent durant la journée dans leur chambre, faute d’espace de jeux disponibles pour les enfants dans l’établissement et à proximité. A la rentrée de l’école, les plus grands rejoignent la chambre familiale, endroit confiné dans lequel il est impossible de se concentrer pour faire les devoirs. Le sommeil est léger et les nuits sont courtes. Les activités pour les parents sont inexistantes. Ils attendent alors que le temps passe ».
« Originaires d’Ethiopie, Madame et Monsieur ont 4 enfants, âgés de 6 mois à 3 ans. Affaiblie physiquement par le voyage durant lequel elle a été accidentée, violée et est tombée malade (hépatite B et syphilis), Madame peine aujourd’hui à se déplacer. Elle est soumise à des examens au
CHUV dans le but de stabiliser sa situation. Le père assume en conséquence la prise en charge des 4 enfants, essayant tant bien que mal d’instaurer une dynamique familiale, dans une chambre où la place manque et les espaces de jeux sont inexistants ».
La mise en œuvre de l’art. 12 Cst. relevant des cantons, ceux-ci sont alors compétents pour déterminer la nature et les modalités des prestations à octroyer dans le cadre de l’aide d’urgence. Ils définissent « la couverture des besoins élémentaires pour survivre d’une manière conforme aux exigences de la dignité humaine » (ATF 139 I 272 considérant 3.2 p. 276). Si les prestations minimales offertes aux familles déboutées dans le cadre de l’hébergement collectif de Vennes correspondent à ce à quoi elles ont droit d’après la loi, il paraît cependant essentiel d’apporter un éclairage sur la conception du droit à la dignité humaine à travers la perspective « droits de l’enfant ». […]
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