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Documentation

Frontex | Conférence de presse nationale sur Frontex

La campagne de votation contre le financement de l’Agence Frontex a été lancée le 25 février. Une conférence de presse nationale s’est tenue à Berne en présence des porte-parole de diverses organisations.

  • Saeed Farkhondeh, Migrant Solidarity Network
  • Mussie Zerai, cofondateur d’Alarmphone
  • Graziella de Coulon, Droit de Rester
  • Balthasar Glättli, conseiller national, président des Verts
  • Daniel Jositsch, conseiller aux États, PS
  • Andrea Meier, théologienne, Églises contre l’extension de Frontex

La conférence de presse, qui s’est tenue dans trois langues nationales, peut être revue en rediffusion ici: (début à la minute 14′)

https://www.youtube.com/watch?v=GORnYDRsdRU

Les conférenciers ont souligné combien les conséquences des pratiques de Frontex, bras armé de l’Union européenne, engagent notre responsabilité. Morts en Méditerranée, situation inhumaine en Lybie, principes de non-refoulement bafoués: les maltraitances et atteintes à la vie d’hommes, de femmes et d’enfants se font avec la participation de la Suisse et ce référendum est un moyen de dire stop, de refuser que ces pratiques se fassent en notre nom.

Nous publions ci-dessous le dossier de presse, avec le communiqué et des extraits d’interventions.

Communiqué de presse NoFrontex

Non à la loi Frontex le 15 mai 2022 Conférence de presse
25.02.2022

Aux frontières extérieures de l’Europe, la violence, la misère et la mort sont devenues le quotidien. Les personnes en fuyant la guerre et les régimes répressifs sont privées de leurs droits, battues et refoulées. En tant que garde-frontières et garde-côtes européens, Frontex y a sa part de responsabilité.

Des recherches confirment ce que les personnes en fuite disent depuis des années: Frontex est complice des violations des droits de l’homme3. Le long de la route des Balkans, Frontex participe à des «Pushbacks4» illégaux. En mer Méditerranée, Frontex est présente lorsque les gardes-côtes nationaux détruisent les moteurs des bateaux et abandonnent en mer les personnes en quête de refuge. La politique de cloisonnement de l’UE a coûté la vie à plus de 44 000 personnes depuis 1993, et bien davantage encore si l’on tient compte des cas non déclarés.

Malgré ces faits accablants, le Parlement suisse a décidé à l’automne 2021 d’augmenter massivement le financement de Frontex: la contribution suisse à Frontex passerait de 14 millions à 61 millions de francs par an d’ici 2027. Par ailleurs, le corps suisse des gardes- frontières et gardes-côtes participerait davantage aux opérations armées de Frontex à l’étranger. Des activistes* et des organisations de base autour du Migrant Solidarity Network ont lancé avec succès un référendum contre cette décision du Parlement. Aujourd’hui, une large alliance de collectifs de base, d’organisations, de partis et d’églises s’engage en faveur d’un NON le 15 mai.

Vous trouverez ci-suivant des déclarations avec les coordonnées des personnes à contacter ainsi que des informations de fond sur le référendum.

3 Voir p. ex. l‘émission SRF Rundschau du 06.10.2021; l’article Balkan Insight du 6.2.2020

4 Terme courant pour désigner le processus violent par lequel les personnes fuyant leur pays se voient refuser le droit à la liberté de mouvement et à l’asile.

Commentaires des participants à la conférence de presse du 25.02.2022

«Frontex agit comme si la migration était un danger, comme si les personnes fuyant leur pays étaient dangereuses. Alors qu’elles recherchent simplement la sécurité et des possibilités de vie permettant de se projeter dans l’avenir. Donner plus de moyens financiers à Frontex signifie qu’il y aura davantage de violence aux frontières. C’est pourquoi le comité No Frontex s’oppose à l’augmentation de l’argent alloué à Frontex. Nous voulons la liberté de mouvement et non une protection accrue des frontières».

Saeed Farkhondeh | Migrant Solidarity Network | frontex-referendum@immerda.ch

«Frontex représente la politique de l’Union européenne. Depuis des années, l’UE mène une politique de fermeture et de haut mur, sans avoir la moindre pensée pour le sort des personnes désespérées qui restent prisonnières au-delà des murs et sont souvent à la merci d’un avenir de souffrance, de torture et de mort. La réduction des ressources de Frontex peut être un premier pas important pour pousser l’UE à changer radicalement cette politique de murs toujours plus hauts».

Mussie Zerai | Cofondateur d’Alarmphone

«Au collectif Droit de Rester à Lausanne, pendant nos permanences, nous recevons les quelques personnes qui ont réussi à passer entre les barbelés, les tirs et les contrôles. Fatiguées d’errer, de subir emprisonnement ou tortures, violence de toute sortes elles espèrent être arrivées. Mais ici, la même violence les poursuit, violence administrative, violence policière, violence dans la négation de leur existence en tant qu’êtres humains. Ils et elles deviennent des numéros qu’on case quelque part où ils/elles sont gardé·es, surveillé·es, pour finir expulsé·es avec violence dans les avions de Frontex.»

Graziella de Coulon | Droit de Rester

«La solidarité et la protection des droits fondamentaux sont des valeurs européennes centrales essentielles: le droit de déposer une demande d’asile en fait partie. Ce droit est actuellement bafoué par Frontex. En votant non, la Suisse consolide les forces au sein de l’UE et du Parlement européen qui exigent de Frontex le respect des droits fondamentaux».

Balthasar Glättli | Président des Verts – Daniel Jositsch | Parti socialiste – Zürich

«Chaque être humain est à l’image de Dieu et a droit à une vie dans la dignité. Que nous protégions nos frontières de ceux qui cherchent protection est absurde. Protégeons plutôt les droits de l’homme le 15 mai.»

Andrea Meier| Théologienne catholique, «Églises contre l’extension de Frontex»

Informations de fond sur l’agence européenne de gardes-frontières et de gardes-côtes Frontex

En bref: Frontex est l’agence de protection des frontières de l’Union européenne. Fondée en Pologne en 2005, avec une armée de gardes-frontières et un énorme arsenal de matériel d’intervention, elle est l’agence de l’UE qui connaît la croissance la plus forte. Elle orchestre la politique européenne de défense contre l’immigration. NoFrontex exige: NON à Frontex, OUI à la liberté de circulation pour tous et toutes.

Les activités principales de Frontex

●  Renforcement des autorités locales de gardes-frontières et gardes-côtes et mise à disposition de savoir-faire technique et stratégique (en particulier dans le domaine de la surveillance par le biais de l’harmonisation des normes et systèmes européens)

●  Élaboration de soi-disant «analyses de risques» accompagnées de recommandations d’action (comme par exemple le renfort des contrôles aux frontières, l’extension des interventions de Frontex ou l’augmentation des ressources de l’agence)

●  Rapatriement de migrants non légalisés (implication directe et indirecte dans des «Pushbacks» illégaux)

●  Planification et réalisation des renvois dans toute l’UE Domaines d’intervention Au fil des années, le mandat de Frontex n’a cessé de croître. Frontex coopère activement avec plus de 20 pays non membres de l’UE et/ou y envoie des agents, dont le Niger, le Sénégal et de plus en plus de pays des Balkans. En mai 2019, Frontex lançait sa première opération dans un pays tiers en Albanie, suivie de deux opérations au Monténégro en 2020. Un accord sur le statut permettant de telles opérations a été ratifié par la Serbie en automne 2021. 87 agents Frontex doivent y être déployés. Alors que Frontex parle d’efforts contre le «crime organisé», le lieu d’intervention montre le véritable objectif de la mission prévue. Le centre de coordination local de l’opération Frontex est le poste frontière de Gradina entre la Serbie et la Bulgarie qui était auparavant souvent le point de départ de Pushbacks. En outre, on a appris récemment que Frontex prévoyait d’intervenir pour la première fois dans un pays africain, le Sénégal. Qui plus est, Frontex coopère systématiquement avec les soi-disant gardes-côtes libyens qui interceptent d’innombrables bateaux et les renvoient de force en Libye, où les migrant-e-s sont détenu-e-s dans des conditions de violences extrêmes.

Frontex et sa montée en puissance

Frontex a été créée en 2005 et son mandat a successivement été étendu en 2007, 2011 et 2019. Son budget a littéralement explosé depuis: alors qu’en 2005, son budget annuel s’élevait à 6 millions d’euros, jusqu’à 11 milliards d’euros sont prévus pour la période de 2021- 2027.

Quant à son personnel, la force opérationnelle de Frontex doit être augmentée d’ici 2027 pour devenir une armée permanente indépendante comptant 10 000 garde-frontières et garde-côtes.

L’arsenal de l’infrastructure militaire ne cesse de croître: l’agence dispose de ses propres véhicules d’intervention, de bateaux et de drones et équipera à l’avenir son armée stationnaire permanente de ses propres armes.

La participation personnelle de la Suisse

La Suisse est représentée par deux personnes au conseil d’administration de Frontex: Marco Benz, vice-directeur de l’AFD et sa suppléante Medea Meier.

En outre, la Suisse envoie des gardes-frontières en mission aux frontières extérieures. Ces derniers effectuent entre 1500 et 2500 jours de mission par an – un chiffre en augmentation constante. Il s’agit de spécialistes en documents, de maître-chien ou de soi-disant spécialistes du retour pour les expulsions. Entre mars et septembre 2020, quatre gardes-frontières suisses ont par exemple participé à la mission Evros dans le domaine de la surveillance des frontières. L’Evros est le fleuve frontalier entre la Grèce et la Turquie. La région frontalière est une zone difficile d’accès et fortement militarisée. Depuis des années, il existe des rapports faisant état de Pushbacks systématiques de la région, principalement par les autorités grecques – mais avec l’aide directe et indirecte du personnel de Frontex.

Rapports, obligation de rendre compte et responsabilité

En tant qu’agence exécutive, Frontex a une personnalité juridique propre dans le cadre de l’UE et jouit d’une grande indépendance. Son organe de contrôle est la Commission européenne, mais selon le règlement, Frontex n’est pas soumise à quelconques directives, ce qui laisse notamment au directeur (actuellement: Fabrice Leggeri) une grande marge de manœuvre. D’innombrables rapports de ces derniers mois mettent à jour de grandes lacunes dans les mécanismes des droits fondamentaux et des systèmes de rapports – ils ne conduisent ni à des obligations de comptes rendus contraignantes ni à un contrôle efficace du travail aux frontières. Actuellement, plusieurs procédures sont en cours contre Frontex suite à des plaintes pour violation des droits de l’homme ainsi qu’à des accusations de corruption.

Cloisonner au lieu de sauver

Au lieu d’assurer des voies de fuite sûres et nécessaires, Frontex mène une véritable guerre contre la migration. Parallèlement, et en partie à cause de cela, des milliers de personnes continuent de se noyer en Méditerranée. Près de 24 000 personnes sont mortes depuis 2014 en route vers l’Europe, sous les yeux de l’agence parfaitement équipée et de ses troupes d’intervention. Et ce, bien que Frontex ait une vision de plus en plus complète de la frontière extérieure de l’espace Schengen: elle a investi 147 millions dans la surveillance aérienne et analyse les mouvements transfrontaliers en temps réel dans son quartier général. Parallèlement, les missions officielles de sauvetage en Méditerranée sont successivement réduites.

D’innombrables rapports de ces derniers mois montrent en outre la participation d’agents de Frontex à des opérations de Pushback en mer Égée.

Compte-rendu de la conférence de presse par la RTS ici: Le comité No Frontex dénonce les agissements de l’agence de l’UE