Editorial | Combat pour la dignité
Entre le 11 et le 25 janvier, une dizaine de Kurdes, originaires de Turquie, ont entamé une grève de la faim pour protester contre les brimades que le règlement du centre d’hébergement de Mettlen (Appenzell) leur fait subir quotidiennement. Une grève de la faim qui leur est apparue comme le seul mode d’expression à leur portée, comme c’est le cas dans leur pays d’origine, ou de tels mouvements sont parfois la dernière possibilité pour les Kurdes de protester contre l’oppression.
Les brimades que voulaient dénoncer ces réfugiés ont pour nom: contrôle des présences dans le centre deux fois par jour, traitements médicaux insuffisants, amendes en cas de non-respect du règlement, fermeture de la cuisine en dehors des heures de repas (et donc impossibilité de se préparer un simple thé chaud), attitude arbitraire du personnel à l’égard des visites, téléphones et télévisions accessibles seulement dans des périodes limitées.
La réponse des autorités cantonales a été purement répressive: renforcement de la présence policière, installation de projecteurs, présence de chiens policiers, séparation des grévistes pour tenter de les diviser. Les habitants de deux autres centres d’hébergement ayant débuté une grève de 24 heures en solidarité, les grévistes ont été envoyés de force à fin janvier dans des centres situés à l’extérieur du canton.
Cette grève de la faim constitue un mouvement de révolte de plus, après les occupations réalisées depuis une année par différents collectifs de «sans-papiers». Comme eux, ces hommes et ces femmes qui ne sont même plus des citoyens/ennes de seconde catégorie, mais des objets que l’on stocke temporairement avant de les renvoyer à l’expéditeur, ont voulu redresser la tête pour affirmer leur dignité d’êtres humains.
La situation dénoncée par les requérants d’asile de Mettlen ne constitue hélas que la pointe de l’iceberg. Les révisions permanentes de la loi sur l’asile ont fini par la vider de toute substance humanitaire. Dans toute la Suisse, des requérants d’asile vivent dans des conditions indignes, aussi bien au niveau financier (prestations sociales inexistantes), que matériel (logements d’une insalubrité scandaleuse), ou moral (mépris affiché et marginalisation).
De la même façon que la répression s’est abattue sur certains «sans-papiers» pour casser leur mouvement, la répression s’est abattue sur les grévistes de la faim de Mettlen. Il n’y a pourtant pas d’autre voie que de poursuivre dans la prise de parole et dans la dénonciation des conditions de vie déplorables faites aux réfugiés et aux «sans-papiers». En espérant que l’ensemble des révoltes qui secouent actuellement la population immigrée devienne une force capable de faire progresser les droits de toutes et de tous.
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