Le Courrier | Le référendum qui embarrasse les socialistes
Le référendum qui embarrasse les socialistes
ASILE • Le PS laissera-t-il les référendaires aller seuls au charbon? Pour certains élus socialistes, ce serait une erreur.
La campagne de signature contre la révision urgente de la loi sur l’asile met les socialistes dans une position délicate. Si le PS pouvait justifier par des arguments stratégiques son refus d’initier le référendum, il lui sera plus difficile d’expliquer pourquoi il ne le soutiendrait pas maintenant qu’il est lancé. «Ne pas récolter de signatures contre les durcissements pourrait donner l’impression que nous les cautionnons», estime la conseillère nationale Ada Marra (ps/ VD).
Sur le fond, le PS est clairement opposé aux mesures urgentes, affirme la Vaudoise. Au National, 32 socialistes ont refusé la révision en vote final et 12 se sont abstenus. Aux Etats, la ligne était moins nette: une poignée de socialistes ont approuvé les durcissements.
Il y a dix jours, le président du PS Christian Levrat annonçait que son parti ne récolterait pas de signatures. Il appelait le PS à ne «pas se battre pour des symboles» mais à investir son énergie «dans des projets positifs». C’était avant le lancement du référendum par les Jeunes verts et des organisations de défense des migrants. «Une débâcle à 80% contre 20% ne va pas renforcer nos positions pour défendre les requérants», maintient Christian Levrat aujourd’hui, ajoutant n’avoir entendu que peu de voix roses discordantes face à la stratégie du parti discutée au sein du groupe aux Chambres.
Pour Ada Marra pourtant, le lancement du référendum doit amener le PS à rediscuter sa position. Car le «saucissonnage» des révisions compromet de toute façon l’élaboration d’une «stratégie globale». Le PS ferait donc mieux de revenir aux fondamentaux: la défense des «valeurs». La conseillère nationale fait un constat d’échec de la recherche de consensus sur la politique migratoire au Parlement. «Nos propositions sont manipulées, détournées. La gauche ne peut plus être constructive, car la droite ne veut rien entendre.»
La Jeunesse socialiste se prononcera le 20 octobre sur son éventuel engagement dans le comité référendaire. Sa direction y est favorable. Les Jeunes socialistes pourraient adopter une résolution invitant le PS à soutenir le référendum. Mais elle ne serait soumise à la base du parti que le 1er décembre, à quelque six semaines de l’échéance du délai référendaire. Trop tard? «Si des socialistes veulent déjà récolter des paraphes, qu’ils y aillent», commente Christian Levrat.
Le PS freine-t-il parce que le dossier de l’Asile est aux mains de «sa» ministre Simonetta Sommaruga? «Cela n’a joué aucun rôle», conteste le président. C’est pourtant l’avis de Pascal Holenweg, conseiller municipal socialiste en ville de Genève. «La ministre chargée d’appliquer cette xénophobie d’Etat est issue de nos rangs. De la droite de nos rangs, certes, et c’est pour cela que c’est ce ministère qui lui a été confié: pour nous obliger à une solidarité partisane contradictoire avec nos choix fondamentaux.»
Mais le Parti socialiste suisse devra de toute façon se distancier, affirme Pascal Holenweg. «Il ne pourrait pas appeler à voter oui ou blanc et sera de toute façon en porte-à-faux avec Mme Sommaruga. Alors autant l’être tout de suite.» Et de remarquer que, même si Christian Levrat fait comme s’il parlait au nom du PS, c’est bien la base qui décidera de la politique à suivre.
Chez les Verts, cette consultation a eu lieu en amont. «Contrairement au PS, nous n’avons personne à ménager», commente la coprésidente du parti Adèle Thorens. Les sections cantonales se sont opposées au lancement d’un référendum pour des questions de moyens et de stratégie. «Mais, par solidarité et parce qu’un échec dans la récolte de signatures serait un très mauvais signal, les Verts ont décidé de soutenir un référendum si d’autres le lançaient.» Les écologistes se sont engagés à récolter entre 6000 et 10 000 signatures