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Documentation

Solidarité sans frontières | Freiner les coûts de l’asile : comment trouver la pire solution ?

Sophie Guignard, Solidarité sans frontières

Les questions liées à l’asile reviennent fréquemment – si ce n’est systématiquement – sur la table des sessions parlementaires. Afin d’attirer l’attention sur les enjeux que peuvent soulever certaines motions déposées, asile.ch collabore avec diverses organisations – CSP, Elisa-asile, SOSF et la Conférence asile romande (CAR) – pour proposer des analyses et décryptages des objets parlementaires.

Après avoir encouragé une augmentation massive du budget de l’armée l’année passée, la Commission des finances du Conseil des États (CDF-E) s’attèle maintenant à trouver des solutions pour freiner les coûts du domaine de l’asile (motion «Freiner la hausse des coûts dans le domaine de l’asile»). La belle affaire. Et comment compte-t-elle s’y prendre ? En faisant exécuter plus d’expulsions ! En mettant les gens au travail le plus vite possible !

Ce sont évidemment des propositions qui vont bien plaire à la droite et sans doute au centre. Cela donne une impression d’efficacité, d’intransigeance et de sécurité.

Crédits : Flickr, Giulia Forsythe

Renvoyer les requérant·es d’asile

Les requérant·es d’asile coûtent cher ? Hop, on les renvoie, problème réglé. C’est méconnaître la réalité. Premièrement, les expulsions forcées coûtent extrêmement cher. En réponse à une question Piller-Carrard, le Conseil fédéral avait répondu que les coûts des vols spéciaux s’élevaient à 13’507 francs par personne en moyenne. Et ce chiffre ne comporte pas les frais d’escorte policière et d’accompagnement médical assumés par les cantons et la Confédération. Quand on sait qu’il faut une quinzaine de policiers pour expulser une famille, on peut vite s’imaginer le coût réel de chaque expulsion.

Considérons aussi que les vols spéciaux sont souvent des avions presque vides. Interrogée à ce sujet, la directrice du SEM Christine Schraner-Burgener avait expliqué que c’était à cause «d’annulations de dernière minute». On ne parle pas d’une excursion dans les Gastlosen mais bel et bien d’un transport de personnes non consentantes avec des mesures répressives sévères. Les «annulations de dernière minute» ne sont pas des caprices, mais plutôt des états de santé qui ne permettent pas l’expulsion, de recours juridiques aboutis ou de personnes qui disparaissent parce qu’elles préfèrent fuir à nouveau ou survivre dans la clandestinité plutôt que d’être renvoyées là où leur vie est en danger. De surcroît, et notamment en ce qui concerne les renvois Dublin vers la Croatie, de nombreuses personnes reviennent directement en Suisse après leur expulsion, tellement les conditions de vie là-bas leur sont intolérables.

Intégrer rapidement les requérant·es au marché du travail

La deuxième solution d’économies de la Commission des finances consiste à intégrer les personnes admises provisoirement ou reconnues comme réfugiées au plus vite sur le marché du travail. Et comment ? En coupant le budget de l’intégration, pardi ! Le plan est de réduire la durée de versement des forfaits de la Confédération et d’encourager l’insertion rapide sur le marché du travail au détriment de la formation.

Il y aurait tellement d’autres mesures !

Supprimer les inégalités entre les permis F et B par exemple, faciliter la reconnaissance des diplômes, faire commencer les mesures d’intégration dès l’arrivée sur le territoire et non après d’interminables procédures d’asile, par exemple. Mais non, des solutions autoritaires et court-termistes ont après tout bien plus de chances d’être acceptées au Parlement. Et tant pis si elles sont contraires à la réalité et à la dignité des personnes concernées.

La Commission des finances nous prépare décidément un avenir radieux :  du fric pour l’armée et la police et des salaires de misère pour les personnes étrangères qui doivent se mettre au travail coûte que coûte, qu’importent leurs aspirations, leurs diplômes, leurs compétences, ou leur avis, finalement.


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