Aller au contenu
Notre regard

Législation | Mieux protéger les mineurs isolés: les recommandations du Conseil de l’Europe

Disparitions, exposition à de mauvais traitements voire à l’exploitation : la vulnérabilité et l’absence de protection des mineurs non accompagnés (MNA) ont conduit le Conseil de l’Europe –organisation internationale distincte de l’UE dont la Suisse est membre– à adopter le 13 octobre 2016 une résolution contenant 16 recommandations à l’attention des pays membres (1). Les Etats y sont exhortés à préserver le droit au regroupement familial dans le cas de mineurs migrants séparés, à garantir un logement adapté à leurs besoins et à faire en sorte qu’ils ne se voient jamais refuser l’entrée dans un pays membre.

Statistiques_MNA_Eurostat
Source: Eurostat

Un cadre légal en évolution

Le cadre général de protection des enfants au niveau international est régi par la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant (CDE), entrée en vigueur en 1990. Ratifiée par tous les Etats membres du Conseil de l’Europe, elle contient certaines garanties en faveur des MNA.

Pour renforcer leur protection au plan européen, le Conseil adopte en 1997 une première résolution définissant le MNA comme une personne de moins de dix-huit ans qui n’est pas accompagnée d’un adulte responsable d’elle devant la loi, ou laissée seule après être entrée sur le territoire d’un État membre. Toute décision le concernant doit faire prévaloir le principe d’ « intérêt supérieur de l’enfant », respectant entre autres son identité, la préservation de son environnement, ou encore son droit d’exprimer librement son opinion, et de voir celle-ci prise en considération.  Tout mineur, accompagné ou non, doit d’abord être considéré comme un enfant avant d’être considéré comme un migrant ou un réfugié. Et traité comme tel, recommande le Conseil.

Protection européenne lacunaire

La reconnaissance de la minorité revêt une importance toute particulière puisqu’elle s’accompagne d’une protection et d’un certain nombre de droits spécifiques reconnus dans la CDE et la résolution du Conseil de 1997. Il s’agit entre autres du droit à l’identité, à la protection, à l’éducation, aux soins de base et au regroupement familial. Autant d’obligations pour les pays d’accueil dont ceux-ci cherchent à s’affranchir par diverses méthodes visant à nier la qualité de mineur (voir Dublin | Contestation de l’âge: méthodes contestées).
Quand bien même la minorité est reconnue, le respect des droits des MNA est appliqué de manière inégale en Europe ( 2). Par exemple, le système d’asile danois n’accorde pas aux enfants âgés de plus de 15 ans un droit établi au regroupement familial. Plusieurs Etats sont dépourvus d’un système de tutelle légale, alors que dans d’autres, les procédures de désignation sont lentes, si bien que les mineurs migrants sont davantage traités comme des adultes. Sur ce point, la nouvelle résolution du Conseil de l’Europe recommande aux Etats de mettre en œuvre des normes communes et des garanties procédurales sur la tutelle et l’aide juridique.

Structures d’hébergement

Le Conseil appelle également les Etats membres à allouer des fonds suffisants aux structures d’accueil pour mineurs et à mettre un terme à la rétention d’enfants migrants. En effet, non seulement les structures d’hébergement pour mineurs sont insuffisantes, mais de plus, les enfants migrants risquent d’être arrêtés et placés en détention en raison de leur entrée ou séjour irrégulier ou en vue d’un renvoi.
Bien qu’elles soient non contraignantes, les recommandations du Conseil ont le mérite de rappeler quelques-unes des règles minimales relatives à la protection des enfants. Reste à savoir si les Etats continueront à faire primer un hypothétique contrôle de l’immigration sur la dignité des enfants.

ALEXIS THIRY

(1) Conseil de l’Europe Assemblée parlementaire, Harmoniser la protection des mineurs non accompagnés en Europe, Résolution 2136, 13 octobre 2016.
(2) Conseil de l’Europe: Commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, Harmoniser la protection des mineurs non accompagnés en Europe, 26 septembre 2016, Doc. 14142.