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Documentation

Terre des femmes | Les femmes dans la procédure d’asile

Rapport de Terre des femmes – Suisse sur les difficultés que les femmes rencontrent dans la procédure d’asile.

header-objectLes persécutions de femmes ne sont pas prises au sérieux en Suisse, conclut une étude de TERRE DES FEMMES Suisse. 32 procédures de demande d’asile de femmes tirées des années 2004 à 2010 ont été analysées dans le cadre de cette étude. Il a été démontré que la grande majorité des refus d’octroi de l’asile a été basée sur un supposé manque de crédibilité. TERRE DES FEMMES Suisse prouve toutefois que des décisions, en particulier de première instance, sont en partie prises de manière précipitée en se basant sur un manque de crédibilité. Une raison pour cela est l’insuffisance fréquente des connaissances spécifiques aux femmes sur les différents pays lors du traitement de la demande d’asile. Ceci a pour conséquence que des stéréotypes et des comportements sont attribués aux requérantes d’asile même s’ils ne correspondent pas toujours à la réalité vécue par les femmes dans leur pays. Il est également trop souvent présumé qu’une protection étatique existe dans le pays d’origine, cela malgré le fait que, dans la plupart des pays, les femmes ne trouvent qu’une très faible voire aucune protection contre des persécutions privées (p.ex. mariage forcé ou menaces de mort suite à des atteintes à l’honneur).

Les résultats détaillés de cette étude peuvent être tirés du rapport « Les femmes dans les procédures d’asile – la reconnaissance des motifs de fuite spécifiques aux femmes dans les pratiques suisses ». Ce document contient également des propositions concrètes d’amélioration visant à garantir aux femmes une procédure d’asile juste et équitable.

Le rapport complet (en français) peut être téléchargé en cliquant ici.

Préface

Un vent glacial souffle actuellement sur la politique suisse de migration. Beaucoup semblent oublier que la plupart des requérant_e_s d’asile ne demandent pas simplement l’asile par soif d’aventure, mais plutôt parce qu’ils/elles n’ont aucune autre issue et qu’ils/elles craignent pour leur vie. Pour les femmes, les difficultés sont encore plus grandes, car souvent, elles subissent les formes les plus extrêmes de violence liée au genre non seulement dans leur pays d’origine, mais aussi pendant la fuite, et même dans le pays de destination.

Le fait que les femmes de nombreux pays sont victimes de persécution liée au genre a été reconnu légalement en 1998 avec l’insertion dans la loi suisse sur l’asile de motifs de fuite spécifiques aux femmes. Avec la publication du présent rapport qui porte sur l’examen de demandes d’asile de femmes, TERRE DES FEMMES Suisse apporte la preuve de ce que nous redoutions depuis longtemps : à savoir que dans la pratique, les motifs de fuite spécifiques aux femmes continuent à ne pas être pris en considération dans une mesure suffisante:

  • Il est effrayant de constater que les risques auxquels les femmes sont exposées ne font toujours pas l’objet d’enquêtes suffisantes. Plus particulièrement, une importance trop faible est accordée à la menace provenant de la famille (p. ex. : risque de mariage forcé, de violence au nom de l’honneur, mais aussi de mutilations génitales féminines).
  • La réalité de la vie de nombreuses femmes n’est pas examinée suffisamment en détail. Les suppositions qui sont faites sont basées sur les réalités de la vie de femmes vivant en Suisse, qui n’ont rien à voir avec celles de certains autres pays.
  • Pour les femmes, le contrôle de la vraisemblance constitue le plus gros obstacle dans la procédure d’asile. L’invraisemblance résulte d’une part de la nature de l’audition (peu d’égard pour les traumatismes subis, faibles connaissances des pays d’origine de la part des auditeurs/trices, manque d’expérience, et donc absence totale d’assurance et défiance des requérantes d’asile dans leurs contacts avec les autorités), et d’autre part de l’analyse insuffisante de la situation des femmes dans les pays d’origine. A ce sujet, je puis affirmer, grâce à mon expérience d’avocate, que dans mon cabinet, les histoires les plus invraisemblables de femmes se sont avérées exactes dans 98% des cas!

En ma qualité de conseillère nationale, je me mobiliserai pour la mise en oeuvre rapide des conclusions de cette étude.

Ainsi, l’Office fédéral des migrations (ODM) doit disposer de personnel bien formé en nombre suffisant pour traiter les demandes d’asile (y compris les auditions). L’équité de la procédure dépend précisément de ces personnes, d’où toute l’importance qu’elles soient non seulement formées aux techniques d’audition, mais qu’elles disposent aussi des informations nécessaires sur les pays et qu’elles se réfèrent aux réalités de vie des femmes dans ces pays.

A l’heure actuelle, dans la procédure d’asile, les décisions de l’ODM qui doivent être revues en deuxième instance sont trop nombreuses. Un travail de qualité doit être fourni dès le stade de la première décision, de façon à éviter un transfert en deuxième instance.

Je remercie vivement l’organisation TERRE DES FEMMES Suisse pour son engagement infatigable en faveur des femmes réfugiées et pour son travail précieux qui a débouché sur cette étude, dont la nécessité était urgente. « Un autre monde est possible » ! Soyons solidaires des femmes réfugiées et soutenons l’action de TERRE DES FEMMES Suisse par un don généreux !

Margret Kiener Nellen, Conseillère nationale PS, membre de TERRE DES FEMMES Suisse, Bolligen (BE)