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Documentation

ODAE romand | Refus de visa humanitaire à un homosexuel camerounais persécuté

Au Cameroun, « Michel » vit dans la crainte depuis que son homosexualité a été découverte : sa famille le menace de mort et il ne peut réclamer la protection des autorités, qui pourraient le faire condamner à 5 ans de prison pour son orientation sexuelle. La Suisse lui refuse un visa humanitaire sollicité à l’ambassade, estimant qu’il n’est pas suffisamment menacé.

Billet publié sur le site de l’ODAE romand, le 1er septembre 2014. Cliquez ici pour lire la fiche complète sur le site de l’ODAE romand.

Résumé du cas

Depuis que son homosexualité a été découverte, « Michel » est continuellement menacé notamment par sa famille, qui estime que son orientation sexuelle est une atteinte à son honneur. De plus, s’il était dénoncé, il risquerait une peine de prison pouvant aller jusqu’à cinq ans. Vivant de plus en plus dans la crainte d’être persécuté, il décide de demander un visa humanitaire à l’ambassade suisse à Yaoundé. Celle-ci est refusée, au motif que « l’objet et les conditions du séjour envisagé n’ont pas été justifiés » et que sa volonté de quitter l’espace Schengen après l’expiration du visa de trois mois n’est pas établie. « Michel » sollicite un entretien avec l’Ambassadeur pour lui exposer sa situation, sans succès. Entre-temps, sous la pression de son voisinage et du chef de son quartier, « Michel » est obligé de quitter son logement et se retrouve à la rue. Saisi d’une opposition au refus de visa, l’ODM confirme la décision de l’ambassade, estimant que « Michel » n’est pas suffisamment menacé, car au Cameroun, « si les homosexuels interpellés et arrêtés sont souvent détenus dans des conditions relativement précaires, les poursuites et les condamnations judiciaires sont cependant plutôt rares ». L’Office affirme également que s’il se sentait vraiment en danger, il n’aurait pas attendu presque trois ans depuis son ‘coming-out’ forcé pour demander un visa humanitaire. En faisant cette évaluation, l’ODM ne tient pas compte du fait que le jeune homme ne dispose d’aucune attache en dehors de son pays et que l’exil n’est pas un choix anodin. En juin 2013, l’avocat de « Michel » dépose un recours au TAF. Peu après, la famille de « Michel » essaie de l’assassiner, parvenant à le blesser à l’épaule. Le recours est en suspens.

Questions soulevées

  • Comment l’ODM peut-il affirmer que les homosexuels ne sont pas menacés au Cameroun, alors que de récents procès pour homosexualité (tel que celui de Roger Mbédé en 2011) ont abouti à la condamnation des protagonistes à des peines de plusieurs années de prison ?
  • Selon les promesses du DFJP (voir déclaration de la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga du 25 mars 2013), le visa humanitaire devait remplacer les demandes d’asile dans les ambassades. L’histoire de « Michel » n’illustre-t-elle pas l’ineffectivité du dispositif ?
  • Est-ce acceptable que l’on reproche à « Michel » de ne pas avoir démontré sa volonté de quitter l’espace Schengen à l’échéance de son visa humanitaire, alors que ce visa est justement censé permettre à des personnes menacées de déposer une demande d’asile une fois en Suisse (voir arrêt TAF E-7319/2013 du 7 février 2014) ?