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OIM | L’OIM dénonce la tendance du «vaisseau fantôme» et rencontre les migrants secourus

Le spectre d’énormes embarcations transportant des centaines de migrants à travers les eaux dangereuses est apparu pour la nouvelle année de manière terrifiante ces derniers jours lorsque plus d’un millier de migrants, la plupart fuyant la Syrie, ont dû être secourus dans la Mer Méditerranée.

Communiqué de presse de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), publié sur son site le 6 janvier 2014. Cliquez ici pour lire le communiqué sur le site de l’OIM.

D’après les témoignages des survivants, les équipages des deux bateaux ont délibérément abandonné hommes, femmes et enfants à bord, en route vers les côtes italiennes malgré la très forte probabilité de noyade.

Le navire Blue Sky M du Moldova, qui transportait 736 personnes, a accosté la veille du Nouvel An dans les Pouilles. Il a été accueilli par un membre du personnel de l’OIM qui a pu s’entretenir avec au moins une douzaine de passagers syriens avant qu’ils ne soient transportés vers des centres d’accueil en Italie. Ces passagers ont décrit un dangereux périple d’une semaine qui leur a coûté entre 4000 et 6000 dollars, payés aux passeurs basés en Turquie.

L’Ezadeen, un deuxième bateau anciennement transporteur de bétail, a été abandonné par son équipage avec 359 réfugiés syriens (dont 62 mineurs) à bord et a été remorqué à quai en Calabre par la mission Triton de l’UE pendant le week-end.

«Les migrants nous ont raconté que pendant le voyage, ils étaient sous le contrôle strict des passeurs qui les forçaient à rester assis, et que les conditions météorologiques étaient très mauvaises», a déclaré Flavio di Giacomo, porte-parole de l’OIM en Italie.

L’OIM en Italie a déclaré que les autorités locales enquêtaient sur les informations des médias selon lesquelles les passeurs ont abandonné le bateau après avoir enclenché le pilotage automatique. Certains témoins auraient raconté aux enquêteurs avoir vu le skipper du Blue Sky M enclencher le pilotage automatique mais sans quitter le bateau: il serait resté à bord, feignant de faire partie des migrants. Cette personne est actuellement interrogée par la police italienne.

Les informations des médias sur ces dernières arrivées font état de tarifs allant jusqu’à 8000 dollars par personne, information que l’OIM n’a pas pu vérifier. Les analystes de l’OIM sont persuadés que la perspective de transporter des personnes d’une seule nationalité – des migrants fuyant la Syrie lors des derniers périples – donne l’opportunité aux cercles de passeurs de recourir à certaines économies d’échelle qui n’étaient pas aussi évidentes dans les listes de passagers plus «mélangés» ayant quitté l’Egypte et la Libye en 2014.

«La prévisibilité de voir des milliers de personnes fuyant désormais la Syrie chaque mois permet aux passeurs de prévoir un flux fiable de clients, leur permettant ainsi d’établir un tarif de référence», a expliqué Joel Millman, porte-parole de l’OIM à Genève. «Ainsi, ils peuvent prévoir les bénéfices qu’ils feront pour chaque voyage et déployer rapidement des bateaux et des équipages.»

Joel Millman a ajouté que la récente décision du Liban d’imposer un visa aux migrants syriens cherchant à entrer au Liban pourrait faire dévier le trafic de nouveaux migrants vers les côtes turques, ce qui ne fera que gonfler la demande de services auprès des passeurs.

Pendant les 11 premiers mois de 2014, l’Italie a rapporté que 163’368 migrants avaient été secourus en mer, soit près de trois fois plus qu’en 2013. Pendant l’année écoulée, les Syriens représentaient la principale nationalité, avec un peu moins de 40’000 arrivées au 30 novembre 2014, suivis d’un peu plus de 34’000 Erythréens.

Plus de 3000 migrants ont disparu dans la Mer Méditerranée en 2014, présumés morts noyés lorsque leur petit bateau hors d’état de naviguer en partance d’Afrique du Nord a sombré.

Au cours des quatre derniers mois de 2014, l’OIM a appris que de plus gros navires «mères» attendaient au large d’accueillir des passagers amenés par les passeurs. De plus gros bateaux en provenance de Turquie transportant des migrants de Syrie ont commencé à faire leur apparition en grands nombres à la fin de l’année dernière à l’Est de la Méditerranée.

D’après les témoignages de migrants recueillis lors d’autres récents accostages, les cargos utilisés sont très vieux et hors d’état de naviguer. Les experts maritimes estiment le prix de ces bateaux entre 100’000 et 150’000 dollars, permettant aux passeurs de gagner jusqu’à 3 millions de dollars pour des périples comme les deux derniers qui transportaient jusqu’à 900 migrants entassés.

«La situation est inquiétante car les passeurs gagnent beaucoup d’argent – environ 3 millions de dollars pour chaque voyage – lors de longues et dangereuses traversées. Avec cet argent, ils peuvent acheter d’autres bateaux et continuer leur activité le long de cet itinéraire ou en empruntant de nouveaux couloirs maritimes», a déclaré Federico Soda, chef de mission de l’OIM en Italie.

Ce trafic resté très dense jusqu’à la fin 2014 – plus de 2000 migrants ont été secourus entre Noël et Nouvel an – suggère que dans les conditions actuelles, peu importe si la Méditerranée est surveillée par des patrouilles de l’opération italienne Mare Nostrum ou de sa remplaçante, la Mission Triton.

«Ce nouvel itinéraire est une conséquence directe de la crise syrienne», a ajouté Federico Soda de l’OIM. «Malgré la fin des opérations de secours en mer dans le cadre de Mare Nostrum, les arrivées se poursuivent en raison des nombreuses crises aux portes de l’Europe.»

«Nous n’avons jamais vu autant d’arrivées pendant l’hiver: si elles ne diminuent pas, il ne sera plus possible d’intervenir de manière adéquate et le risque de naufrage ne fera qu’augmenter», a t-il conclu.

Le Directeur général de l’OIM, William Lacy Swing, a cité le cas des pirates somaliens, dont la menace pour le commerce international a été stoppée par une équipe multinationale dans le Golfe d’Aden. «Une équipe d’intervention multinationale a permis de mettre fin à la piraterie au large de la Somalie. Si cela a été possible, il est aussi possible de déployer une équipe pour stopper les gangs de passeurs», a t-il déclaré lundi.

Pour plus d’informations, veuillez contacter

Flavio di Giacomo
OIM Italie
Tel: +39 347 089 8996
Email: fdigiacomo@iom.int

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