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Documentation

Blog | Journal d’un réfugié syrien

A propos du blog…

Dans quelques mois, cela fera quatre années que Le Réfugié Syrien a atterri à Genève, contraint de quitter Damas en catastrophe par les menaces que faisaient peser sur sa sécurité son refus de prendre part à l’entreprise répressive du régime. Sans rien pouvoir emporter dans sa fuite de sa confortable vie d’avant, ni s’autoriser à regarder en arrière. Quatre années que Le Réfugié Syrien s’évertue à nouer des liens dans cette Suisse qui lui a ouvert sa porte en lui accordant l’asile, à recoudre ce qui lui reste de morceaux d’une existence mise en pièces par la guerre, à en tisser de nouveaux pour colmater les déchirures de l’exil.

Quatre années d’une vie en clair obscur, d’efforts, d’espoirs, de doutes, et de larmes qui finissent par tout brouiller lorsqu’une voix blanche au téléphone informe qu’un voisin, une nièce, ou un ami, encore un, est mort au pays sous la dernière averse de bombes. Ceci est le journal que Le Réfugié Syrien a décidé de tenir en 2016, la chronique de son corps à corps avec la vie quotidienne et des tâtonnements de son âme. Son vrai nom n’a aucune espèce d’importance: Le Réfugié Syrien n’est qu’un parmi des millions d’anonymes à vouloir faire entendre sa voix.

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Le premier billet publié, c’était le 4 janvier 2016…

Voeux

Les fêtes m’inspirent un sentiment mitigé. Quand je regarde autour de moi tous ces gens qui réussissent à fêter Noël et le Nouvel an dans la joie en Europe, je suis touché, cela me réconforte et me donne de l’espoir. Bien sûr, le fait que cela aille très mal chez moi, en Syrie, gâche les choses. J’ai été bouleversé par la mort de Samir Souad, un ami ingénieur, à Idlib le 20 décembre, juste avant Noël. Sa famille et ma famille s’était prise d’amitié l’une pour l’autre dans les années 1990. La sienne est très connue à Idlib, elle travaille dans le domaine du froid, elle fabrique des frigos. 78 personnes sont mortes dans l’attaque lancée ce dimanche là par les avions russes. La maison des Souad a été complètement détruite. Samir n’était pas un jihadiste. Au contraire même, sa famille n’a jamais été religieuse. En plein centre-ville, le tribunal aussi a été visé par un missile. Il était plein d’avocats qui ont trouvé la mort. Pourquoi l’avoir bombardé? Pourquoi avoir bombardé le marché d’Ariha, le 29 novembre, un dimanche aussi, la ville qui se situe à moins de 5 km de mon village et tué des dizaines de civils? En qui le peuple syrien peut-il avoir confiance?

Pour revenir à des choses positives, je suis profondément reconnaissant à la Suisse de tout ce qu’elle nous donne à nous les réfugiés syriens. Quoi que, l’Allemagne offre mieux. Elle accepte tous les Syriens. En Suisse, ils n’obtiennent qu’un permis F, un permis provisoire. Mais à partir du moment où nous sommes en sécurité, en paix et au chaud, nous pouvons considérer que nous avons déjà tout par rapport à ceux qui sont restés en Syrie.

Mes vœux pour 2016? J’en ai deux. Premièrement, une solution pour la Syrie. Un vrai règlement diplomatique, pas une issue qui découlerait de l’approche actuelle, celle qui consiste à avoir laissé le champ libre à la Russie pour qu’elle fasse le ménage dans la région. Deuxièmement, que les musulmans, tous les musulmans, se mettent sérieusement à réfléchir à leur avenir, à la manière dont ils sont perçus par le reste du monde.