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Documentation

Le Courrier | Projet pilote pour faciliter l’accès des réfugiés à l’université

Des réfugiés sont inscrits comme auditeurs, bénéficient de cours de français et sont guidés par un étudiant mentor.

Article de Rachad Armanios, publié dans Le Courrier, le 1er mars 2016. Cliquez ici pour lire l’article sur le site du Courrier.

Huit réfugiés ont entamé la semaine passée un programme pilote d’intégration à l’université de Genève. Ils devraient bientôt être une vingtaine. Acceptés comme auditeurs, ils auront en plus la possibilité à la fin des cours de passer les examens. En cas de succès, ils pourront faire valoir les crédits acquis s’ils souhaitent poursuivre dans la filière choisie.

Un mentor les aide à évoluer dans le monde universitaire, tandis qu’ils bénéficient de cours de français accélérés, adaptés à ce public en général formé. La plupart ont en effet commencé ou achevé des études dans leur pays de provenance, mais ne remplissent pas les conditions d’immatriculation en matière de reconnaissance de diplômes et de français.

[caption id="attachment_30165" align="aligncenter" width="1500"]Une rencontre informative des partenaires et candidats a eu lieu au Centre social protestant (CSP) de Genève en février. Photo: Alberto Campi Une rencontre informative des partenaires et candidats a eu lieu au Centre social protestant (CSP) de Genève en février. Photo: Alberto Campi[/caption]

Un «coup de pouce»

L’alma mater accepte de déroger à ces critères. Mais temporairement. Car ils devront en principe être remplis pour rejoindre un cursus à la fin du programme. Il n’y a donc aucun passe-droit, plutôt un «coup de pouce» pour faciliter l’intégration des réfugiés au niveau académique, précise Mathieu Crettenand, adjoint au rectorat qui pilote le programme «auditeurs-réfugiés».

Ce projet est mené par l’université en collaboration avec le Bureau de l’intégration, la Conférence universitaire des associations d’étudiantEs ainsi que la Coordination asile.ge.

Ce sont des étudiants qui officient comme mentor. Une cinquantaine ont fait acte de candidature alors que la tâche est bénévole, preuve de la solidarité et de l’enthousiasme suscités, se réjouit M. Crettenand. La CUAE officie par ailleurs comme porte d’entrée de l’université pour ces migrants, sous la forme d’une permanence. M. Crettenand se réjouit de cette collaboration avec la faîtière des étudiants, permettant un premier accueil moins formel que la machine administrative universitaire. Par ailleurs, la Maison des langues de l’université propose des cours de français aux candidats.

Cinq facultés sont incluses au programme: sciences de la société, sciences, médecine, lettres, faculté de psychologie et des sciences de l’éducation. Le programme s’adresse à des demandeurs d’asile, des réfugiés ou des personnes en admission provisoire. Précisons que le statut de séjour n’entre pas dans les critères d’admission de l’université.

Pour l’heure, les candidats viennent d’abord de Syrie et d’Erythrée, mais aussi de Colombie, de Biélorussie, etc. L’un est vétérinaire, l’autre biologiste, un autre a été économiste durant onze ans dans son pays, et on trouve l’ancien directeur d’une régie publique d’une ville syrienne… Amorcé via le bouche à oreille ce semestre, le programme sera officiellement lancé à la rentrée de septembre. Il pourrait accueillir à terme quarante étudiants sur une année. S’il suscite l’enthousiasme, le projet pose toutefois des défis.

Gagner du temps

Le risque n’est-il pas de susciter de faux espoirs si les auditeurs ne parviennent pas, à la fin du programme, à obtenir la reconnaissance de leurs diplômes ou le niveau de français? Ces migrants auront du moins été plongés dans leur société d’accueil via l’apprentissage du français et de savoirs, répond M. Crettenand. Mais il veut croire dans la grande motivation des candidats. Surtout, le programme permet de gagner du temps en mettant un pied dans le monde académique en attendant une reconnaissance des diplômes, ajoute-t-il. Souvent longue, celle-ci se fait en général par le bas et il s’agit souvent de faire un complément d’étude, ajoute Cristina Del Biaggio. Travaillant à l’université, elle est aussi active dans le monde associatif à Vivre Ensemble, qui fait partie de la Coordination asile.ge. «Ce projet arrive à un moment où la Confédération réfléchit à intégrer les demandeurs d’asile tout de suite et non plus en attendant qu’ils obtiennent un permis B. Or l’entrée à l’université reste de facto compliquée pour ces migrants en raison d’une politique fédérale de reconnaissance des diplômes restrictive et faute d’accès à des cours de français adaptés, ce qui prive la Suisse de leurs compétences.»