Les business des passeurs, un marché devenu lucratif par la fermeture des frontières
Le Comptoir des médias est intervenu auprès de la rédaction de Mise au Point (RTS) concernant le reportage « L’Europe coûte que coûte« , qui a été diffusé le 4 octobre 2015. Notre intervention a porté sur la manière dont les passeurs ont été représentés et qualifiés.
Le 9 octobre 2015, nous avons écrit le message suivant à la rédaction de Mise au Point:
Nous vous félicitons pour la qualité de ce reportage et pour les propos de M. Faure. La figure du passeur y était décrite dans toute sa complexité. Comme vous le montrez, les passeurs ne sont pas toujours parties de grandes filières criminelles, mais peuvent être de simples vendeurs de bateaux pneumatiques ou de gilets de sauvetage, « sans scrupules » car vendant sciemment du matériel non fiable.
Dans l’interview qui suit le reportage, M. Faure affirme que la lutte contre les passeurs de l’Union européenne n’est pas la solution à la crise humanitaire actuelle, car « le business est tellement lucratif que même si on les mettait hors état de nuire, il y en aura toujours d’autres pour prendre la relève ». Pour que l’analyse soit complète, sans doute aurait-il fallu ajouter que si ce business est si lucratif, c’est en raison des efforts des Etats européens à rendre les frontières extérieures de l’Union européenne hermétiques. Plus les murs, barbelés ou opérations maritimes comme Navfor med -rebaptisée il y a quelques jours Sophia– se multiplient, plus la traversée de ces frontières est difficile et dangereuse pour les migrants et risquée pour les passeurs. Or à risque élevé, prix élevé. Les réfugiés, qui majoritairement sont en besoin de protection, n’ont de toute manière aucune alternative. C’est pourquoi ils ont prêts à payer n’importe quel prix pour réussir à entrer dans la Forteresse Europe.
L’article de Hein de Haas, co-directeur de l’Institute for Migration Studies et professeur aux Université d’Oxford et Amsterdam, nous montre le cercle vicieux dans lequel se trouve actuellement l’Union européenne, cercle vicieux qui a comme effet pervers celui d’augmenter le nombre de morts plutôt que de les diminuer.
À notre sens, votre analyse aurait mérité d’évoquer cet aspect fondamental: tant que les personnes persécutées n’ont pas accès au territoire européen pour y déposer une demande de protection, comme c’est leur droit, elles seront contraintes d’y accéder en prenant des voies irrégulières, et à mourir aux portes de l’Union.
Le 16 novembre 2016 nous avons reçu la réponse suivante de la part de la rédaction de Mise au Point:
Nous vous remercions vivement d’avoir pris la peine de nous écrire car nous sommes toujours ouverts aux remarques et critiques! Nous espérons donc pouvoir continuer à compter sur votre fidélité.