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Notre regard

Afghanistan : Mobilisée pour l’autonomie des ex-détenues dans son pays

Giada de Coulon

Ancienne réfugiée, Rohina Samim se bat pour le droit des femmes en Afghanistan. De ses propres mots, elle veut faire de l’humanitaire, pas de la politique. Hope for Afghan Women est l’association qu’elle a créée il y a quelques années. Son but : venir en aide aux femmes afghanes ex-détenues à travers un foyer d’accueil et leur réintégration dans la société. Depuis la prise de pouvoir des talibans, le centre accueille toutes les femmes et enfants qui ont besoin d’aide.

photo credit Mariam Alimi

Arrivée enfant en Suisse en 1978, suite au coup d’État soutenu par les Soviétiques, Rohina Samim est issue d’une famille d’intellectuels afghans. Elle se forme à Genève, dans le domaine de la finance. Devenue adulte, elle tombe sur des images de lapidation d’une femme dans son pays d’origine ce qui la bouleverse. Elle qui a été élevée dans un modèle d’équité des sexes refuse de rester muette face à ces crimes. En 2005, elle se rend en Afghanistan. Pendant quinze ans, s’occupant des populations vulnérables par divers moyens comme les microcrédits, elle observe avec impuissance la corruption qui déstabilise le pays, comment les efforts de démocratisation à Kaboul creusent le fossé ville-campagne et voit l’insécurité qui augmente malgré une forte présence internationale.

Hope for Afghan Women
L’état de violence aura raison de sa présence sur place. En 2019, après plusieurs menaces, elle décide de retrouver refuge en Suisse. Son engagement ne s’arrête pas là. Elle crée l’association Hope for Afghan Women qui vient en aide aux femmes afghanes détenues à leur sortie de prison. Fragilisées par l’incarcération, rejetées par leurs familles et souvent enceintes ou devenues mère en prison, il leur est difficile de retrouver une situation stable. Un centre d’accueil à Kaboul leur propose les services de psychologues, d’avocat·es, de pédopsychiatres ou de sages-femmes. L’association veut les réintégrer dans la société en travaillant à leur autonomie : recherche de logement, scolarisation de leurs enfants dans des écoles publiques, des formations pour les mères. Cette valeur est au cœur de l’engagement de Rohina qui ne faiblit pas à l’heure où la politique est à nouveau venue bouleverser le quotidien de l’association.

Le peuple a faim
Depuis la prise de pouvoir des talibans, les besoins sont redevenus basiques. Les femmes et les enfants toquent à la porte de l’association pour demander à manger. De l’huile, de la farine, les personnes ont faim et Rohina s’exaspère que ce soit une nouvelle fois les plus vulnérables qui payent le plus lourd tribut des sanctions internationales. Les puissances occidentales devraient, selon elle, se montrer davantage responsables face à une situation qu’elles ont partiellement contribué à créer et sanctionner directement le gouvernement taliban.
Actuellement la situation est très floue en Afghanistan. Malgré cela, le centre de l’association reste ouvert, Rohina veut continuer à œuvrer dans l’humanitaire. Ce qui importe, c’est l’autonomie des femmes avant tout. Et dans ce pays déjà marqué par une structure patriarcale traditionnelle, cela reste un défi de taille.