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#Stop Dublin Croatie | Manifestation nationale & témoignages

Alors que plusieurs renvois de personnes ont eu lieu, la mobilisation contre les transferts Dublin vers la Croatie et la dénonciation des violences que les personnes y ont subies s’intensifient. Des récits terrifiants sur les maltraitances vécues par les personnes d’origine burundaise, en particulier de la part de la police. Migrant Solidarity Network se fait le porte parole de Patrick et Flora; Siméon et Rose ou encore Amina, Innocent et leur neveu. Tou·tes passé·es par la Croatie. Tou·tes reportant de sévisses, brimades, passages à tabac ou moqueries. Solidarité sans frontières (SOSF) reporte également le témoignage de Bosco renvoyé le 26 janvier 2023 depuis Zurich jusqu’à Zagreb dans un avion vide! La coalition #StopDublinCroatie appellent à une manifestation nationale le 04 février à Berne. Elle propose des modèles de lettres à adresser aux autorités pour exprimer le refus que des personnes traumatisées soient renvoyées vers leurs bourreaux. La Suisse doit reprendre la responsabilité du traitement de leur demande d’asile, comme le règlement Dublin l’autorise!Nous reproduisons ci-dessous les différents témoignages récoltés par les associations membres de la coalition #StopDublinCroatie

Bosco a été expulsé hier vers la Croatie. Dans un avion vide

Solidarité sans Frontières

Mercredi matin, Bosco a été arrêté et emmené depuis le centre d’asile de la Guglera, à Giffers (FR). Ses amis l’ont vu arraché de son lit, emmené par des policiers. Ils ont vu le personnel ORS s’empresser de vider son casier. C’était clair, ils ne le reverraient plus.

Après une nuit en détention administrative à la prison de l’aéroport de Zürich, il a été emmené sur le tarmac, entravé et escorté par une dizaine de policiers, pour prendre un vol à 7h du matin. 

L’avion était complètement vide, il n’y avait que lui, le personnel de bord et un médecin pour l’accompagner. Il a fait escale à Vienne, en Autriche. Un autre avion l’a amené jusqu’à Zagreb. 

Bosco a fui son pays, pour échapper aux persécutions politiques. Il a aussi fui la Croatie, pour échapper aux violences policières. En Suisse, il luttait avec d’autres personnes dans sa situation, contre les renvois indignes, pour plus de solidarité, et moins d’exclusion. 

Il avait exigé au centre de Giffers un traitement plus digne, un meilleur accès à la santé et une nourriture plus adaptée pour les enfants, notamment. 

Bosco avait des problèmes de santé, consécutifs aux violences subies dans son pays et en Croatie. Il était en attente d’une opération chirurgicale. Les autorités d’expulsion n’ont rien voulu savoir, Bosco a été renvoyé. 

Comment peut-on justifier toute cette violence? Comment justifier cette débauche de moyens répressifs? 

A quel moment est-il devenu plus acceptable d’engager une dizaine de policiers, de mobiliser un avion entier pour expulser une seule personne plutôt que la laisser rester là où elle avait choisi d’aller, là où elle aurait pu se soigner et commencer une vie meilleure? 

Les renvois vers la Croatie sèment la terreur parmi ceux qui restent. Comment les justifiez-vous, le SEM, les polices cantonales? 

Face à cette terreur, face à cette violence, nous restons ensemble.

Siméon et Rose (Migrant Solidarity Network) +

“Aujourd’hui je sais que c’était un piège de la police”

Simeon et Rose ont dû fuir le Burundi cet été après que Simeon, avocat, a dû échapper à une tentative d’assassinat de la part de membres du pouvoir en place. Il avait découvert l’identité du violeur présumé d’un enfant, et cette personne était proche du parti au pouvoir. Comme beaucoup d’autres Burundais, Simeon et Rose ont pu fuir le pays en prenant un vol pour la Serbie, pays pour lequel il n’est pas nécessaire d’obtenir un visa pour y entrer. Depuis là, ils ont cherché à rejoindre la Suisse en passant par la Bosnie, la Croatie, la Slovénie, puis l’Italie. Mais, comme tant d’autres personnes empruntant la « route des Balkans », c’est en Croatie qu’ils ont dû faire face à l’oppression des autorités locales.

Nous sommes entrés en Croatie en passant par les champs, les forêts, etc. Nous avons essayé plusieurs fois d’entrer. La première fois, la police croate nous a attrapé dans la forêt. Mais, au lieu de nous amener au commissariat, à Zagreb, la police nous a jeté dans une autre forêt, loin, très loin. Elle nous a jeté dans une autre forêt, pour que nous retournions en Bosnie. Et quand la police nous a jeté dans cette forêt éloignée, elle nous a dit « Voilà Zagreb ». Ils nous insultaient dans les langues que nous ne comprenions pas. Et quand nous sommes [de nouveau] entrés en Croatie moi et ma femme avec notre groupe, ma femme était tellement fatiguée et malade. Alors la police croate s’est mal comportée envers ma femme. Ma femme était fatiguée, et il est arrivé un moment où elle est tombée par terre. Lorsque j’ai fait un geste pour lever ma femme, la police m’a frappé sur la jambe, j’ai même une marque. Elle m’a frappé fort avec le pied. Et puis, ma femme était fatiguée, en plus il faisait très froid, mais la police croate s’est mal comportée, elle ne respecte pas le droit de l’homme. Elle ne voit pas l’importance de l’homme. Il [le policier] a mal parlé, dans la langue croate que je ne comprends pas, mais j’ai vu qu’il tentait de m’insulter, même si je comprends pas. Il a utilisé un ton d’insulte pour dire que ma femme…, il a dit « Woman crazy! Woman crazy! ». Mais ma femme était fatiguée, malade à cause du froid. Et une deuxième chose que je peux dire, lorsque la police nous a amené dans le commissariat, la police nous a demandé « Est-ce que vous allez continuer ? », on a dit oui. « Vous continuez où ? ». « En Suisse ». La police nous a dit « Ok, pas de problème », puis elle nous a donné des feuilles à compléter, nous avons complété. Après avoir complété, la police nous a dit « Ok restez un instant ». On est resté dans la chambre. Après, la police nous a amené pour faire les empreintes. J’ai demandé à la police « C’est pourquoi ça ? », ils ont dit « Non non, c’est pour la sécurité, y’a pas de problème ». Nous n’avions pas d’autre moyens que de faire ce qu’ils disaient. C’est la police, donc nous étions dans une obligation d’accepter. Ils nous ont piégés. J’ai demandé encore « Il n’y a pas de conséquences ? », et il m’a répondu « Non non il n’y a pas de conséquences ». Il nous a pris les empreintes, les dix doigts, pour moi et ma femme. Après, il nous a fait signer des choses. Je lui ai dit « Comment puis-je signer ? », car les documents étaient écrits en croate. Je lui ai demandé « Comment je peux signer une chose que je ne comprends pas ? ». J’ai essayé de lire un papier qui était écrit en français, la police m’a repoussé et m’a dit « Si tu continues, ça sera grave ». Comment je peux signer ? Nous avons signé beaucoup de papiers. Après, on nous a donné un papier qui disait que nous avions sept jours pour quitter le territoire Schengen.Et, après nous avoir donné ce papier, la police croate nous a fait sortir. Mais, aujourd’hui je sais que c’était un piège de la police. Après le commissariat, la police nous a mis dans une camionnette, et puis ils nous ont amené vers le train, à la gare. Aussi, quand la police nous a donné le papier qui nous laissait 7 jours quitter le territoire Schengen, elle nous a dit que ce papier était comme un laissez-passer. Qu’aucun policier ne peut nous attraper dans le territoire croate. Une autre chose, après ces 7 jours, nous serons en situation illégale.

En résumé, la police ne respecte pas les droits de l’homme. Elle ne comprend pas la valeur de l’homme. Comment la Suisse veut nous faire retourner en Croatie alors que la police croate ne respecte pas les droits de l’homme ? Même si nous sommes des migrants nous avons des droits qui nous protègent. La Suisse c’est mon pays de rêve. Et la Suisse, c’est la sécurité. En plus comme j’ai fait du droit, j’ai vu les conventions et les traités qui ont été signé ici à Genève. C’est pourquoi j’ai choisi la Suisse.

Patrick et Flora (Migrant Solidarity Network) +

“Tu es au sol, mais ils continuent”

Patrick et Flora sont originaires du Burundi mais étaient réfugiés au Kenya depuis 2011. Dans le camp où ils vivaient, ils ont été agressés par d’autres réfugiés et ont dû quitter le pays pour protéger leurs vies. Ils ont atteint le continent européen via la Grèce avant de traverser la Macédoine, la Serbie, puis la Bosnie.

“Depuis la Bosnie, c’était un voyage très difficile pour arriver en Croatie. Parce que chaque fois que nous entrions en Croatie, la police nous attrapait et nous battait. Et je vous le dis, ils ne frappent pas pour de semblant… mais ils vous battent pour de vrai, vous savez. Ils vous battent parce que, quand ils vous attrapent, surtout quand vous êtes avec des Afghans, quand ils vous attrapent avec eux, mon ami, vous ne pouvez même pas l’imaginer. Parce que les Afghans, quand ils rencontrent la police, parfois ils se défendent. Alors quand la police vous attrape avec les Afghans, vous êtes battu très violemment. Mon ami, ils te battent pour de vrai. Ils ne regardent pas où ils te battent. Tu es à terre mais ils continuent. Ils te frappent avec leurs bâtons, de très gros bâtons. Alors ils m’ont battu jusqu’à ce que mon épaule soit démise. Ma femme a dû arracher mon t-shirt pour me faire un bandage. On a essayé plusieurs fois d’entrer en Croatie, et la cinquième fois on a décidé de passer par la forêt. Des buissons, des buissons, des buissons, dans la montagne, on devait se cacher des gens. On a réussi à y aller, mais ma femme était fatiguée. Nous étions avec quatre autres personnes, ils sont partis parce qu’ils ne pouvaient pas nous attendre. Alors moi et ma femme, nous avons décidé d’aller là où nous pourrions peut-être voir quelqu’un qui pourrait nous aider avec de l’eau ou de la nourriture parce que nous étions très affamés, très fatigués, dû au fait d’avoir dû vivre plusieurs jours dans la forêt. Nous y sommes restés presque une semaine et demie. Puis, quand nous avons décidé de sortir de la forêt et d’aller sur la route, la police est immédiatement venue. Ils nous ont attrapés, vous savez. Ils nous ont emmenés et mis dans leur véhicule où vous ne pouvez pas voir, où que vous alliez. On a fait presque une heure et on est arrivés là où ils ont arrêté la voiture. Ils nous ont fait sortir. C’était leur endroit, leur bureau. Ils ont apporté les papiers, vous savez, « Hé vous, signez ici ». Vous savez, ils utilisaient leur langue, et ils vous donnaient des papiers en croate, « Signez ici ». Tu ne peux pas lire, tu ne peux rien faire. On n’avait pas le choix parce qu’on ne peut pas être en désaccord. On ne communiquait pas avec eux parce qu’ils parlaient leur langue. « Non, je ne parle pas anglais », ils disaient. Pas d’anglais, pas de français, mais on devait signer. Ensuite ils nous ont emmenés là où il y avait des ordinateurs, et ils ont dit « Mettez vos doigts ». Après ça, la nuit, vous savez, ma femme était très malade parce que, vous savez, elle a perdu trois bébés, elle a fait trois fausses couches.

Alors on a essayé de leur dire qu’elle était très malade, vous savez, elle pleurait. Les dents aussi, vous savez, elle avait mal, elle pleurait très fort. Devant eux. On a essayé de leur dire mais ils riaient. « Burundians! Burundians! Talking Burundians! », et ils riaient. Mais vous savez, on a décidé de dormir là, mais ma femme n’a pas bien dormi parce qu’elle avait très mal. Et vous savez, on était fatigués, sans nourriture et sans rien. On a dormi là. Le lendemain matin, ils ont appelé un taxi et nous ont dit « Partez ». Pas d’argent, pas d’information, pas de papier, ils nous ont dit : « Partez ». Le taxi est venu à la police, c’est eux qui ont appelé le taxi. Et le taxi nous a emmenés là où il y a un centre. Mais dans le centre, il y avait beaucoup de gens, vous savez. Pas d’endroit pour dormir parce qu’il y avait beaucoup de gens, alors on n’est pas restés là. On voulait continuer à avancer. J’ai appelé un taxi, comme un Uber, ça s’appelle Bolt, et on lui a dit qu’on voulait aller en Slovénie. Puis il nous a dit « Ok je vous emmène à cette frontière, vous payez ça ». On l’a payé quand on est arrivés à la frontière et il nous a dit « Allez par-là ». Mais j’ai utilisé Google Maps, puis on est passé dans la forêt, on est passé dans l’eau, et on est entrés en Slovénie. En Slovénie, nous avons pris un bus jusqu’en Italie. En Italie, on a pris un train. Personne ne nous a arrêtés. Nous étions deux, vous savez, quand vous êtes deux et sans bagages, on fait moins attention à vous. Pas de police, rien. Quand on est arrivés en Suisse, la police nous a arrêtés. Ils nous ont dit « Où sont vos papiers ? » et je leur ai dit « Nous allons à Genève », parce que je connaissais Genève, c’est là que se trouvent les bureaux de l’UNCHR, je leur ai dit « Je vais à l’UNCHR ». J’ai tous les papiers du camp de réfugiés, via mon adresse e-mail, alors je voulais aller là-bas pour tout leur dire parce qu’il n’y a aucune aide au Kenya. C’est pourquoi nous y sommes allés, mais en chemin, nous avons été attrapés par la police et ils nous ont amenés ici. Mais nous sommes en sécurité ici, ils ont bien traité ma femme, et nous sommes très heureux. C’est pourquoi nous avons décidé de venir ici. Concernant mon épaule, jusqu’à présent, je suis soigné au centre. Ils m’ont dit qu’il y avait quelque chose qui me manquait dans l’épaule. J’ai besoin d’une opération. Le problème c’est qu’ils m’ont dit qu’ils feront mon opération que quand j’aurai l’asile. Et je souffre vraiment, vous savez. Mon épaule sort sans cesse, elle s’est déboîtée. Ils m’ont donné des médicaments contre la douleur mais, vous savez, c’est un médicament, même quand je le prends mon épaule se déboîte. Les médicaments ne guérissent pas mon épaule. J’ai commencé la physiothérapie mais le thérapeute m’a dit « Je ne peux rien faire » parce que quand il essaie, mon épaule sort. Et c’est vraiment douloureux, je pleure comme un bébé. Quand je fais quelque chose, comme prendre un objet un peu lourd, mon épaule ressort à nouveau. Et quand elle sort, je dois la remettre en place immédiatement. Je m’adapte comme je peux, mais, vous savez, c’est très dur. Mais grâce à Dieu, nous sommes ici maintenant. Le voyage a été très difficile, car nous avons commencé en juin 2022. Nous avons quitté le Kenya le 20 juin, et nous sommes arrivés en Suisse le 21 août.”

Amina, Innocent et leur neveu (Migrant Solidarity Network) +

“On a tous des souvenirs douloureux, et ils reviennent encore et encore, ils ne partent pas”

Amina, Innocent et leur neveu Gabriel (14 ans) sont partis du Burundi cet été avec une autre famille composée d’une mère et des ses trois enfants mineurs, dont un de trois ans. Ils ont vécu le pire en Croatie. Malgré cela, le Secrétariat d’Etat aux migrations veut qu’ils soient expulsés vers la Croatie.

La police nous a arrêtés au moment de passer la frontière entre la Croatie et Slovénie. Nous devions traverser par un champ de maïs et franchir une rivière. Les voisins nous ont vus, ils nous ont dénoncés. La police est arrivée avec une voiture, tous les feux et la sirène allumés etc. Ça faisait beaucoup de bruit. Nous étions cachés dans le maïs et la police a lâché les chiens, ils ont tiré trois fois avec un pistolet. La femme avec nous a crié de peur.  À ce moment-là, on est tous sortis du champ. On a expliqué qu’on traversait le pays, qu’on ne voulait pas demander l’asile en Croatie. C’était 21h30 environ. La police a commencé à matraquer mon mari, à lui jeter des coups de pied. Ils l’ont accusé d’être le passeur. Les policiers nous ont interrogés et nous ont menacés de nous renvoyer au Burundi. Ils nous ont embarqués dans la voiture, mon mari enfermé dans le coffre. Ils ne nous ont pas dit la destination.  Le voyage a duré environ 1 h. Finalement, on est arrivé dans une salle vide avec de la paille sur le sol pour dormir. On avait un sac à dos avec un minimum de nourriture et de boisson, ainsi que de l’argent, environ 240 €. Les policiers nous ont tout pris. Ils nous ont privés de nourriture, même le petit de 3 ans n’a rien eu. Ils nous ont pris les empreintes digitales : on a pensé que c’était pour Interpol ou pour des contrôles de police, mais au lieu de cela, c’était pour EURODAC, on ne le savait pas, ils ne nous ont rien dit. C’est seulement vers 4h du matin qu’ils nous ont donné des biscuits.

Le jour après, ils nous ont amenés à un centre de Zagreb où ils nous ont enregistrés. On a pu manger à midi. Et là, ils nous ont rendu nos téléphones, mais pas l’argent. Le soir, on a été privé de nourriture. Nous sommes sortis pour aller acheter de quoi manger, mais on ne nous a pas laissé entrer dans les magasins, à cause de la couleur de notre peau. En Croatie, les gens s’arrêtaient dans la rue pour observer notre couleur de peau, pour nous regarder et parler de nous. Le jour suivant, des personnes cagoulées sont arrivées au centre ; dans le couloir, il y avait au moins 5 personnes, et 3 ont forcé notre porte, elles ont bousculé Gabriel qui est tombé. Elles nous ont accusés de posséder de la drogue, alors qu’ils nous avaient fouillés auparavant. Elles ont accusé mon mari d’être une personne maléfique ; c’était à cause de ses tatouages. Le lendemain, nous avons appris qu’il fallait une carte pour manger, nous sommes allés la chercher. Nous avons cherché à savoir si d’autres personnes avaient subi la visite agressive des personnes cagoulées. Personne n’avait vécu ça ! En retournant dans notre chambre, on a découvert que les cartes étaient bloquées, on n’avait plus accès à notre chambre. Les voisins nous ont fait comprendre que la réception voulait nous voir. Mon mari et moi sommes restés là pendant 4 h. Deux femmes nous ont proposé de demander l’asile ici, de rester en Croatie, les autorités nous donneraient une maison, de l’argent, l’aide sociale… nous recevrions encore d’autres dédommagements. Mais surtout, nous ne devions pas parler des violences, ni des accusations subies. J’ai proposé aux dames de nous emmener à l’hôpital pour faire des analyses de sang, pour prouver notre innocence.  Elles ont refusé en disant que tout était ok. Elles nous ont posé beaucoup de questions sur notre parcours, elles nous ont demandé de faire une déposition sur les raisons de notre départ du Burundi, avec la menace que si nous ne le faisions pas, elles nous renverraient au pays. Nous avons donc signé des documents. Elles ont dit vouloir chercher des infos et des vérifications auprès d’un avocat. Cela prendrait un jour ou deux. Pendant la nuit, tous les 7, nous avons pris la fuite et avons passé la frontière. Ça été facile ! 

Au centre, mon mari est allé à l’infirmerie parce qu’il a encore des douleurs, des hématomes et des enflures à cause des passages à tabac.  Aujourd’hui, il n’est toujours pas guéri. Malgré les soins reçus depuis deux semaines, il veut un vrai contrôle car il a peur de séquelles irrémédiables. Il n’a toujours pas vu le médecin.  Gabriel et moi avons des problèmes psychologiques, j’ai demandé à Caritas de pouvoir parler avec un psychologue, mais j’attends toujours. On a tous des souvenirs douloureux, et ils reviennent encore et encore, ils ne partent pas.