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Notre regard

La justice européenne confirme qu’être une femme et venir d’Afghanistan est un motif d’asile

Camille Aubry | asile.ch

Dans un arrêt rendu le 4 octobre 2024, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) conclut que les femmes afghanes doivent être reconnues comme réfugiées «uniquement» sur la base de leur pays d’origine et de leur sexe. Les mesures discriminatoires mises en place par le régime des talibans constituent des persécutions, selon les juges, qui estiment qu’une protection internationale doit leur être accordée, et ce sans besoin d’établir les risques auxquelles elles seraient exposées en cas de renvoi. Plusieurs pays, dont la Suisse, avaient déjà adapté leur pratique dans ce sens à l’égard des femmes afghanes. Le Parlement suisse avait -en pleine campagne électorale- tenté d’attaquer la nouvelle pratique des autorités d’asile, occupant les débats pendant près d’une année, avant d’y renoncer lors de la dernière session d’automne.

Cette jurisprudence a été rendue par la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) suite à une demande préjudicielle de l’Autriche. Si les États membres demeurent souverains en ce qui concerne l’octroi ou le refus de l’asile, les décisions rendues par la CJUE font jurisprudence [1]RTS et la Tribune de Genève, sur une dépêche de l’ATS.. Certains pays (Suède, Finlande, Danemark) avaient déjà pris les devants en accordant l’asile aux femmes afghanes en raison de leur nationalité et de leur sexe.

Rappel de la situation en Afghanistan

Le régime actuellement en place en Afghanistan applique une lecture extrêmement rigoriste de la loi islamique. Depuis leur prise du pouvoir, les talibans imposent des restrictions et des règles qui ont des conséquences sur l’ensemble de la population et des droits humains. Les femmes et les filles sont spécialement touchées, leurs droits fondamentaux sont restreints, voire retirés. Pour donner un exemple de leurs conditions de vie qui ne cessent de se détériorer : depuis fin août, elles n’ont plus le droit de s’exprimer dans l’espace public, ni par la parole, ni par le chant.

Les décisions des autorités fédérales validées

Tout comme dans l’UE, le sujet des femmes afghanes et d’une nécessaire systématique dans la reconnaissance de leur besoin de protection sur les motifs que nous évoquons dans cet article est une thématique fréquemment débattue en Suisse.

Crédits : Unsplah, John Crozier.

Le SEM évalue depuis mi-juillet 2023 que les femmes afghanes subissent à la fois une législation discriminante et une persécution religieuse. Ces éléments représentent un motif d’asile à part entière qui doit découler, après évaluation individuelle, sur un octroi d’asile définitif – et non plus provisoire, comme c’était le cas jusqu’à lors.

Une motion en particulier avait menacé cette adaptation dans la pratique du SEM. Renvoyée en commission après une session parlementaire extraordinaire sur la «pratique en matière d’asile pour les femmes afghanes» (décembre 2023) et réfutée par le TAF (sur un jugement de novembre 2023), elle a finalement été liquidée lors de cette session d’automne. Pour plus de détails à leur sujet, nous vous renvoyons vers nos deux fact-checking (décembre 2023 et mai 2024) et vers la décision rendue par le TAF.

La décision rendue début octobre au niveau européen prouve que les décisions des autorités fédérales – en ce qui concerne le traitement des femmes afghanes – sont fondées. Elle légitime donc les adaptations du SEM dans sa pratique.

Cette pratique a permis à de nombreuses femmes afghanes et leurs filles vivant en Suisse depuis de nombreuses années de demander une transformation de leur permis F (admission provisoire) en statut de réfugiées.


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Notes
Notes
1 RTS et la Tribune de Genève, sur une dépêche de l’ATS.