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Documentation

Question parlementaire | Afflux de migrants à Chiasso. Chiffres précis et mesures pratiques

Le 16 juin 2016, Marco Romano, groupe PDC, a déposé une question au Conseil fédéral concernant le nombre de migrants transitant par Chiasso. Le Conseil fédéral a répondu le 17 août 2016.

Cliquez ici pour lire le texte de la question et de la réponse sur le site du Parlement que nous reproduisons ci-dessous.

Question:

L’afflux de migrants à la gare de Chiasso a nettement augmenté au début du mois de juin. Au vu de la situation internationale, la pression ne diminuera certainement pas au courant des mois prochains. Le nombre élevé de nouveaux arrivants appelle un examen approfondi de la situation afin de prendre des mesures appropriées. En particulier, ne serait-ce que pour avoir une base de comparaison avec les pays voisins, nous devons disposer de certaines informations.

1. Sur la base des enregistrements effectués par le Corps des gardes-frontière à la gare internationale de Chiasso du 1er au 15 juin 2016:

1.1. Combien de personnes sont-elles arrivées?

1.2. Quelles sont les cinq nationalités les plus représentées?

1.3. Combien de migrants (en %) disposaient d’un document d’identité officiel et valable?

1.4. Combien d’entre eux (en chiffres réels et en %) ont demandé l’asile?

1.5. Pour combien de personnes ayant demandé l’asile à la gare pendant la période mentionnée la procédure était-elle encore en cours à la fin juin?

2. Sur la base des chiffres recueillis par le Centre d’enregistrement et de procédure de Chiasso, géré par le Secrétariat d’Etat aux migrations, combien de migrants (en chiffres réels et en %) arrivés à Chiasso pendant la période mentionnée étaient déjà enregistrés en Italie ou dans un autre Etat Schengen?

3. L’Italie reprend-elle systématiquement les personnes non enregistrées qui arrivent en train à Chiasso et forcément de l’Italie? Si non, pourquoi?

4. Est-il possible de déterminer si les personnes provenant d’Italie et non enregistrées étaient arrivées dans la Péninsule depuis quelques semaines ou depuis longtemps?

5. Sachant que la plupart des migrants arrivent en train, les autorités italiennes des frontières collaborent-elles avec la Suisse sur le tronçon ferroviaire Côme-Lugano, qui relève de la compétence des deux pays?

6. Un contrôle systématique des trains à Milan et à Côme, avec l’appui de la Suisse, afin de garder en Italie les migrants non enregistrés, est-il envisageable?

7. La collaboration opérationnelle entre la Suisse et l’Italie est de plus en plus cruciale, ne serait-ce que pour garantir la crédibilité des autorités suisses. Dans cette optique, que peut et qu’entend faire la Suisse au niveau diplomatique, afin d’améliorer cette collaboration?

Réponse du Conseil fédéral:

Question 1:

1.1. Pendant la période du 1er au 15 juin 2016, 1633 personnes en séjour illégal ont été enregistrées par le Corps des gardes-frontière (Cgfr) à la gare de Chiasso. Parmi ces personnes, 141 ont été directement remises à l’Italie.

1.2. Les principaux pays de provenance ont été l’Erythrée (729 personnes), la Gambie (185), la Somalie (177), l’Ethiopie (119) et le Nigéria (96). Cependant, une grande partie des personnes en quête de protection et des migrants circulent sans documents de voyage, si bien que le Cgfr ne peut pas confirmer la nationalité de toutes les personnes. Dans la statistique de l’asile que le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) a publiée pour les mois de janvier à mai 2016, l’ordre des nationalités est du reste quelque peu différent (Afghanistan, Erythrée, Syrie, Irak, Somalie).

1.3. Cet élément ne figure pas dans la statistique tenue par le Cgfr, car aucune personne ne remplissait les conditions d’entrée visées à l’art. 5 de la loi sur les étrangers. Par conséquent, aucune personne n’avait un document de voyage officiel et valable pour l’entrée en Suisse.

1.4. Sur les 1633 personnes appréhendées, 1492 personnes, soit 91 %, ont demandé l’asile. Cependant, ce pourcentage reflète uniquement la situation des deux premières semaines de juin à Chiasso; il n’est représentatif ni pour d’autres périodes ni pour l’ensemble de la Suisse.

1.5. Les personnes qui déposent une demande d’asile à la gare de Chiasso sont ensuite réparties sur tous les centres d’enregistrement et de procédure (CEP). Dans ce contexte, on enregistre le lieu où le requérant d’asile entre dans le CEP et y est enregistré, mais pas celui où il a déposé sa demande (par ex. la gare de Chiasso). Il n’est par conséquent pas possible d’effectuer des dépouillements statistiques concernant les procédures d’asile des personnes qui ont déposé une demande d’asile à la gare de Chiasso pendant la première quinzaine de juin 2016. Au total, ce sont 1129 entrées qui ont été enregistrées dans les CEP pendant la première quinzaine de juin (Chiasso: 187). A la fin de juin 2016, la procédure d’asile n’était pas encore terminée dans 1014 cas (Chiasso: 141). Il arrive aussi que les demandes d’asile soient retirées et que les personnes concernées n’entrent pas du tout dans un CEP.

2. Du 1er au 15 juin 2016, les données de 996 personnes ont fait l’objet d’une comparaison avec Eurodac. Sur ces personnes, 668 étaient déjà enregistrées dans la banque de données Eurodac dans un ou plusieurs pays et 328 n’y étaient pas enregistrées. 52,1 % des cas concernaient l’Italie (519 résultats positifs). Du point de vue statistique, il n’est pas possible de dépouiller séparément les données concernant le CEP de Chiasso. De plus, les empreintes digitales introduites dans Eurodac ne peuvent pas être mises en relation directe avec les demandes d’asile enregistrées, car un certain laps de temps s’écoule entre la demande d’asile et l’introduction des données dans Eurodac. Lorsque des indices donnent à penser qu’une personne relève de la compétence d’un autre Etat Dublin, la Suisse demande systématiquement à cet Etat de la prendre en charge. La compétence d’un Etat peut être déterminée sur la base des empreintes digitales figurant dans la banque de données Eurodac, mais aussi en se fondant sur d’autres indices tels que les liens de parenté, des documents de tout genre ou encore les déclarations des requérants d’asile.

3. Si une personne dépourvue d’autorisation de séjour est interceptée dans la zone frontière, la demande de réadmission peut être présentée en procédure simplifiée. En 2015, l’accord de réadmission bilatéral a ainsi permis de renvoyer directement en Italie en procédure simplifiée 4049 migrants irréguliers (en particulier dans le trafic ferroviaire à Chiasso et à Brigue).

4. Il n’est en principe pas possible de déterminer si une personne qui n’a pas été enregistrée en Italie a vécu dans ce pays durablement ou non. Cette durée peut cependant être appréciée au cas par cas en se fondant sur les déclarations des requérants d’asile, la présence d’indices ou les réponses des autorités italiennes à des demandes d’information fondées sur le Règlement Dublin. L’expérience permet cependant de dire que les personnes originaires de la Corne de l’Afrique qui se présentent à Chiasso sont souvent arrivées dans la Péninsule peu de temps auparavant.

5 – 7. A l’heure actuelle, la collaboration avec l’Italie est bonne: celle-ci identifie et enregistre les migrants qui arrivent sur les côtes méridionales et a également amélioré son système d’accueil. Le Conseil fédéral est conscient que cette situation pourrait changer si l’Italie était confrontée à une forte augmentation de la migration. Pour cette raison, il poursuit un dialogue régulier et fructueux avec l’Italie, en soulignant fermement que les obligations prévues par l’acquis de Dublin doivent être respectées.

En règle générale, la collaboration avec les autorités italiennes de contrôle de la frontière fonctionne bien, y compris dans le trafic ferroviaire, et des concertations ont lieu. Dans le trafic ferroviaire, les autorités italiennes n’effectuent pas leurs contrôles jusqu’à Lugano. Le 14 octobre 2013, la Suisse et l’Italie ont signé à Rome un accord révisé sur la coopération policière. Cet accord a été approuvé par l’Assemblée fédérale en 2015. En Italie, la procédure de ratification est encore en cours. Entre autres, cet accord règle désormais la coopération directe dans la région frontalière. Cette coopération comporte également des patrouilles mixtes. Dans certains domaines (patrouilles communes, armement et munition, échange de renseignements), des conventions séparées sont nécessaires pour assurer l’exécution de l’accord. Ces conventions sont en cours de négociation. Des patrouilles communes devraient à l’avenir être possibles dans le trafic ferroviaire sur la base du nouvel accord et de ses conventions d’exécution.