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Notre regard

Editorial | La politique vaudoise déraille

Du jamais vu dans la politique vaudoise en matière d’asile. Jadis terre promise pour nombre d’immigrés, le canton est-il en train de devenir un enfer? Une caisse de résonance qui reprend très fidèlement tous les cantiques entonnés par le chef d’orchestre Christophe Blocher?

Depuis 28 avril dernier, le canton a pris de nouvelles mesures limitant l’accès des requérants d’asile à l’emploi. En effet, toutes les personnes exerçant une activité lucrative dont la demande d’asile avait été rejetée sont priées de prendre congé de leur emploi.

Au total, ce sont plusieurs centaines d’hommes et de femmes contribuant à l’économie du pays qui sont poussés à la mendicité et à la charge du contribuable.

Dans les couloirs du Grand Conseil vaudois, certains représentants de la droite soutiennent que «cette nouvelle mesure vise à inciter les requérants déboutés à perdre toute illusion de vivre en Suisse».

Une affirmation à prendre avec des pincettes. L’initiative pourrait aussi se transformer en autogoal, au moins pour une raison: parmi les personnes concernées par la mesure se trouvent de nombreux ressortissants de pays qui refusent de «collaborer avec Berne». En clair, certains pays refusent de délivrer des documents d’identité à leurs ressortissants frappés d’une décision de renvoi de la Suisse.

Conclusion, ces contribuables d’hier viennent aujourd’hui gonfler les rangs des bénéficiaires de l’aide sociale à la charge du canton.

De toute évidence, le Conseil d’Etat vaudois préfère assumer ce risque que de voir dans le futur de nouveaux déboutés s’opposer à leur renvoi en invoquant leur bonne intégration.

Tous les Kosovars de l’association «En quatre ans on prend racine», qui avaient occupé l’Eglise de Bellevaux en 2001 sont aujourd’hui titulaires du permis B. Une issue qui aurait été inimaginable s’ils avaient été mis à l’assistance forcée. Le canton de Vaud ne devrait-il pas être fier d’avoir permis cette solution humanitaire?

Le virage à 180 degrés adopté par la majorité de droite du Conseil d’Etat frappe évidemment de plein fouet les «523» déboutés dont le sort était toujours sur le balant. Le 20 mai, le Conseil d’Etat dévoilait clairement le chantage auquel il entend les soumettre: ou bien vous vous déclarez «volontaires» pour partir, ou bien vous vous retrouverez sans travail.

Au soir du 20 mai, l’UDC vaudoise se félicitait de cette «normalisation» de la politique d’asile vaudoise. Faut-il comprendre que la norme, dans ce canton, est désormais dictée par l’UDC?

Manuel L. Hiol