MEM: Le coup de pouce professionnel
En 2010, l’EPER a lancé dans les cantons de Vaud et de Genève un programme pilote sur trois ans: Mentorat, Emploi, Migration (MEM). Celui-ci vise à favoriser l’insertion sur le marché du travail des migrants ayant un profil professionnel. Il recherche aujourd’hui des mentors prêts à épauler des migrants dans leur intégration professionnelle.
Selon un récent rapport de l’OCDE (1), « Parmi les personnes très qualifiées arrivées en Suisse pour des raisons humanitaires, une sur deux environ occupe un emploi nécessitant une qualification inférieure à la sienne ». L’autre moitié subit un chômage de longue durée (2).
La déqualification professionnelle ne touche pas uniquement les personnes liées à l’asile: de nombreux migrants sur le marché du travail suisse sont concernés, en particulier les personnes d’origine extra-européenne, tous permis confondus.
Les obstacles sont nombreux: manque de maîtrise de la langue locale, méconnaissance du marché de l’emploi, absence de réseau professionnel, difficultés à faire reconnaître compétences et diplômes acquis à l’étranger et à obtenir un premier emploi par manque d’expérience professionnelle en Suisse. L’OCDE qualifie de «sous-développée» la politique fédérale d’intégration. Elle fait mention de son retard dans la lutte contre les discriminations, en particulier auprès des employeurs et souligne la complexité du système suisse de reconnaissance des qualifications acquises à l’étranger.
L’OCDE recommande, entre autres, la mise sur pied de projets de mentorat pour migrants qualifiés.
Ouvert à toutes les professions
Le programme Mentorat Emploi Migration a pour objectif de mettre en contact des migrants extra-européens (excepté USA, Canada, Australie et Nouvelle-Zélande) et la population active en Suisse.
Les mentés sont au bénéfice d’une formation ou d’une expérience professionnelle dans leur pays d’origine, mais sont sans emploi ou exercent un travail sans lien avec leurs compétences. Les mentors sont professionnellement actifs et disposés à accompagner une personne migrante du même secteur professionnel sur une durée maximum d’une année. Dans le cadre d’un duo, le mentor fournit des informations sur la situation de la profession et du marché de l’emploi, sur des compléments de formation éventuels et soutient le migrant dans ses démarches de postulation.
Ouvert à tous types de professions, le MEM a surtout intéressé des mentés et des mentors relativement qualifiés. Malgré une proportion importante de détenteurs de permis B, le MEM s’adresse aussi aux bénéficiaires de permis F, ainsi que B et C réfugié. Indépendamment des obstacles liés à des parcours de vie parfois traumatiques, les difficultés institutionnelles sont d’autant plus réelles pour ces personnes. Les employeurs sont, par ailleurs, mal informés quant aux possibilités de les employer.
Depuis début 2012, un travail en réseau plus serré a permis de légèrement augmenter le nombre de personnes admises provisoirement ou réfugiées inscrites au MEM. Toutefois, leur niveau de français souvent trop faible est une limite pour une insertion dans leur domaine à ce stade de leur parcours.
Depuis 2010, le MEM a enregistré environ 190 inscriptions de la part de personnes migrantes. Parmi elles, 36 personnes ont des permis liés à l’asile, dont 15 sont admises provisoirement. 81 duos ont été constitués dont 55 sont en cours. Plus de 90 migrants inscrits attendent d’entamer un duo. Sur 26 duo terminés,10 participants – soit 38% – ont trouvé un emploi dans leur domaine à leur niveau de compétences et 6 ont trouvé un emploi dans un autre domaine que le leur au cours du mentorat. Les 10 autres, sans emploi au terme du duo, ont estimé avoir une vision plus claire des démarches à poursuivre pour s’insérer professionnellement.
Shirine Dahan, collaboratrice au MEM
Pour participer en tant que mentor:
www.mentoratemploimigration.ch
Note:
(1) T. Liebig, S. Kohls, K. Krause, 2012, «L’intégration des immigrés et de leurs enfants sur le marché du travail en Suisse», Document de travail de l’OCDE sur les affaires sociales, l’emploi et les migrations, n°128
(2) Enfin, celles dont le niveau d’éducation est plus faible auraient un taux d’activité relativement élevé, répondant par-là à un besoin de l’économie suisse.