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Documentation

CSP | Prise de position sur la restructuration de l’asile (débats parlementaires)

Prise de position de l’Association suisse des Centres sociaux protestants – Version 1.2 – 17 février 2015.

Pour télécharger la prise de position en format pdf, cliquez ici ou sur l’image ci-dessous.

CSP_prise positionEn résumé

L’excessive longueur de certaines procédures d’asile est due à différents facteurs tels que le manque d’effectifs du SEM, sa politique visant à laisser de côté le traitement de certaines demandes pouvant aboutir à l’octroi d’une protection, ou encore les obstacles financiers et politiques en matière d’exécution des renvois (non-effectivité des accords de réadmission). La présente restructuration, qui ne fait pas de ces points le cœur du sujet, n’est pas le meilleur moyen d’atteindre les objectifs annoncés.

Sur le fond, l’accélération des procédures d’asile doit tenir compte de la vulnérabilité particulière des réfugiés présumés*. Dans le domaine du droit d’asile, les dossiers sont complexes et s’accommodent mal du carcan d’une cadence. Le Ministre de l’intérieur français Bernard Cazeneuve dit d’une révision du droit d’asile français, qui vise à ramener les procédures à une durée de 9 mois, qu’elle est «ambitieuse». En Suisse nous voulons réduire à 100 jours, soit à peine plus de 3 mois, la procédure ordinaire qui par défaut sera «accélérée».

Le rythme espéré sera difficile à tenir en premier lieu pour les autorités. Mais si des erreurs sont commises à cause de l’accélération ou que le temps passé dans un centre fédéral se prolonge, ce sont les réfugiés présumés qui en subiront les conséquences. De même, si le SEM annonce que les délais devront être «impératifs», il n’y a en réalité que les délais de recours, qui sont au bénéfice des réfugiés présumés et que l’on prévoit de raccourcir, qui seront juridiquement contraignants. Il convient donc de mettre en place des garde-fous pour éviter que les réfugiés présumés portent le poids de l’accélération, et notre prise de position formule des propositions dans ce sens.

Enfin la mise en place d’une protection juridique, même en admettant que celle-ci puisse jouir de conditions garantissant son indépendance (moyens et délais de recours suffisants) ne suffit pas à pallier aux problèmes qui se posent du fait de l’accélération et de la concentration des réfugiés présumés dans de grands centres fédéraux.

* Dans la mesure où les « demandeurs d’asile » finissent régulièrement par être reconnus comme des réfugiés (comme le démontrent les statistiques), nous préférerons dans ce document les qualifier de « réfugiés présumés », afin que ne soit pas oublié le caractère légitime de leur demande de protection, jusqu’à preuve du contraire.

Remarques générales

Obstacles à l’exécution des renvois non levés

La présente restructuration tire sa légitimité de chiffres présentés par le DFJP sur la longueur de certaines procédures qui comprennent, à tort selon les CSP, le temps qu’il faut pour exécuter les renvois[1]. Les renvois peuvent être difficiles voire impossibles à exécuter entre autres raisons à cause de l’absence d’accords de réadmission avec le pays d’origine ou de l’ineffectivité de ces accords. Dans la mesure où le présent projet n’amène aucun changement sur ce point, un des facteurs principaux de la durée de « procédure » demeure, et met fondamentalement en péril l’accélération souhaitée par le DFJP.

Mesures urgentes – aucune évaluation?

Les mesures urgentes adoptées le 28 septembre 2012 ont été prorogées par le Parlement le 26 septembre 2014. Le message prévoit également leur reprise sans même les discuter. Certaines mesures ne semblent avoir déployé aucun effet, ou alors un effet négatif, et devraient a minima faire l’objet d’une évaluation.

La suppression de la désertion comme motif d’asile (art. 3 al. 3), présentée comme un moyen de réduire le nombre de demandes émanant de ressortissants érythréens, n’a à notre connaissance eu aucun effet positif.

De même, que sait-on de la suppression des demandes d’asile dans les ambassades? (art. 19 al. 1, 1bis et 2 ; art. 20) Les visas humanitaires, présentés comme une alternative pendant la campagne référendaire précédent la votation du 9 juin 2013, ne sont quasiment pas délivrés. Entre le 1er janvier 2006 et le 28 septembre 2012, 377 autorisations d’entrée par an en moyenne avaient été délivrées dans le cadre d’une procédure d’asile à l’ambassade. Entre le 29 septembre et la mi-juin 2014, soit presque deux ans, seuls 24 visas humanitaires par an en moyenne ont été délivrés. Quelles économies ont été réalisées et que sont devenues les victimes de persécutions qui trouvent désormais les portes de nos ambassades closes?

Enfin, aucun centre spécifique pour réfugié présumé dit «récalcitrant» (art. 26 al. 1bis, 1ter et 2ter) n’a été ouvert. Dès lors il y a tout lieu de penser qu’il n’existait en réalité aucun problème justifiant l’emploi excessif et non-démocratique de l’urgence.

Centres fédéraux: Zürich ou les Rochats ?

Pour projeter ce que devrait être une procédure d’asile restructurée, la Conseillère fédérale Simonetta Sommaruga s’appuie sur l’exemple d’un centre test établi en plein cœur de Zürich. Cette situation idéale illustre mal ce que sera un futur centre fédéral du même type : il devient en effet toujours plus difficile de trouver des emplacements pour ouvrir des centres de grande taille. Et concrètement les centres fédéraux post-restructuration pourraient ressembler davantage au centre récemment ouvert aux Rochats (VD) qu’à celui de Zürich. Le centre des Rochats est isolé : le village le plus proche se trouve à 6 kilomètres, et les réfugiés présumés qui y logent doivent emprunter les transports publics pendant au minimum 45 minutes pour se rendre à Yverdon consulter un juriste.

Au moment de faire l’exercice de se projeter dans une procédure d’asile souhaitée, il paraît donc impératif de gommer l’effet « vitrine » du centre test actuel. Des centres isolés poseront problème sur le plan de l’accès à des soins ou à une aide juridique extérieurs (en cas de refus de la part du représentant légal de faire recours contre une décision négative). Ils limiteront aussi les possibilités pour les réfugiés présumés de nouer des contacts avec la population locale et la société civile, alors qu’il sera ultérieurement exigé d’une partie considérable d’entre eux de s’intégrer rapidement. De plus, selon le projet, la durée maximale de séjour dans le centre d’enregistrement ne sera plus de 90 jours comme aujourd’hui mais pourra atteindre 140 jours. Les centres actuels ne peuvent donc pas servir tels quels, mais doivent subir des remaniements pour s’adapter à des séjours plus longs. Il faut prévoir des chambres où les familles peuvent être réunies, des espaces de jour pour les célibataires, les familles et les enfants, des espaces calmes, des loisirs et des activités, la présence permanente d’une personne formée dans le domaine médical, des aménagements garantissant la liberté de circuler de chacun.

Indépendance de la protection juridique

La mise en place d’une protection juridique est la condition sine qua non d’une accélération des procédures qui ne se fait pas uniquement au détriment des droits des réfugiés présumés. Cette protection juridique doit être indépendante de l’administration. Cette indépendance dépend de différents facteurs:

  • Délais de recours : s’ils sont raccourcis, et c’est prévu pour les procédures accélérées (art. 108 al. 1), cela complique voire rend impossible la recherche de moyens de preuves et la rédaction d’un recours de qualité, et ce même si le mandataire juridique est aguerri.
  • Ressources : si les moyens octroyés à un prestataire de protection juridique sont insuffisants, la défense des intérêts des requérants d’asile ne sera pas garantie (surcharge des mandataires, recours bâclés, etc.). Ce point crucial dépendra de décisions ultérieures à la présente révision.
  • Contrôle des autorités : comme le prestataire est mandaté par l’Etat, celui-ci pourrait chercher à lui imposer des restrictions dans le type de démarches entreprises pour la protection juridique, sous l’appellation trompeuse d’un «contrôle de qualité». Il serait contraire à l’indépendance de la protection juridique de vouloir exclure des mandataires qui défendent les intérêts de leurs mandants par des démarches parfaitement légales qui ne sont pas du goût de l’administration.
  • Localisation géographique des bureaux des mandataires : les requérants ne peuvent avoir confiance en leur représentant légal que s’ils peuvent le distinguer clairement des fonctionnaires de l’administration censés trancher leur cas. Si tous travaillent au même endroit, cette distinction n’est pas garantie et le climat de confiance nécessaire entre un mandataire et son mandant ne peut pas être instauré.

Augmentation des effectifs du SEM

Le message prévoit l’augmentation de l’effectif de l’ODM de 250 postes (p.120). Les CSP ont toujours défendu l’idée que la première mesure à adopter, avant même d’engager une restructuration complète de la procédure d’asile, était d’augmenter les effectifs de l’administration. Nous réaffirmons notre soutien à cette mesure aujourd’hui, tout en rendant attentifs les parlementaires au fait que Christof Blocher, lorsqu’il était en charge du DFJP, a lui-même drastiquement réduit les effectifs par mesure d’économie (116 postes rien qu’en 2005). Les retards accumulés par la suite dans le traitement des demandes sont donc en partie due à des réductions d’effectifs sur lesquelles il faut aujourd’hui revenir.

Aide d’urgence: nivellement par le bas

Le message précise: «Il importe que les hébergements cantonaux n’offrent pas de meilleures prestations que les centres de la Confédération. Il s’agit d’éviter ainsi que des requérants faisant l’objet d’une procédure accélérée tentent d’être attribués à un canton afin d’obtenir une aide d’urgence.» (p. 29).

Dans les Centres actuels d’enregistrement et de procédure, qui relèvent déjà de la compétence fédérale, les requérants qui perçoivent l’aide sociale sont assistés en nature, dans des structures collectives sans espace privatif, et reçoivent 3 francs d’argent de poche par jour. Il est donc à présager que l’aide d’urgence qui sera dispensée par la Confédération sera inférieure à ces barèmes et ne comprendra plus qu’une aide en nature. Autrement dit, un régime d’aide d’urgence globalement plus sévère que celui appliqué dans la plupart des cantons, où des prestations en espèce sont encore versées à celles et ceux qui attendent leur expulsion de Suisse. A Genève par exemple, l’aide d’urgence comprend une aide financière de 10 francs par jour pour un adulte célibataire outre le logement, le transport et l’assurance-maladie.

Ainsi la restructuration induit un nivellement par le bas de l’aide d’urgence. Les CSP se sont toujours opposés au régime d’aide d’urgence, premièrement parce que ses effets sont dévastateurs sur la santé des demandeurs d’asile déboutés, deuxièmement parce que ce régime n’a prouvé son efficacité ni à susciter davantage de retours volontaires ni à rendre la Suisse moins attractive.

Détention administrative

La restructuration prévoit que les cantons créent entre 500 et 700 places de détention administrative supplémentaires, soit près du double des places existantes aujourd’hui. Elle prévoit également la mise en place de centres de départ, dont on sait très peu pour l’heure, mais ils seront probablement aménagés de sorte à inciter les demandeurs d’asile déboutés à un retour volontaire et de nombreux renvois seront exécutés depuis ces centres.

Les CSP sont d’avis que la migration n’est pas un crime, que le recours à la détention administrative doit être limitée au maximum et que des alternatives à la détention doivent être développées (assignation à résidence, aide au retour incitative, coaching très serré des demandeurs d’asile déboutés pour nourrir des perspectives de retour). La détention administrative est aussi très coûteuse. Il est enfin reconnu que plus la détention se prolonge, plus la perspective d’un renvoi s’amenuise: l’efficacité de la détention administrative de plus de quelques jours n’est ainsi même pas prouvée. Il est donc regrettable de constater que la présente restructuration prend au contraire le chemin d’un usage massif de la détention administrative.

Commentaire article par article

Art. 24 al. 4 Centres de la Confédération Le présent commentaire rejoint notre remarque introductive (Centres fédéraux: Zürich ou les Rochats ?) : les centres actuels sont prévus pour une durée maximale de 90 jours, aussi des centres prévus pour une durée de 140 jours doivent être conçus différemment, avec des chambres où les familles peuvent être réunies, des espaces de jour pour les célibataires, les familles et les enfants, des espaces calmes, des loisirs et des activités, la présence permanente d’une personne formée dans le domaine médical, des aménagements garantissant la liberté de circuler de chacun.L’alinéa 4 prévoit de plus que la durée du séjour puisse être prolongée «raisonnablement». Cette mention est trop floue et ouvre la porte à un séjour prolongé dans les centres de la Confédération. En même temps, aucune contrepartie n’est prévue si le SEM ne respecte pas les délais drastiques auquel il a lui-même décidé de s’astreindre. Les CSP estiment que si les délais énoncés dans la loi ne sont pas respectés par le SEM, la personne doit intégrer la procédure étendue de manière automatique. 

Les CSP proposent de modifier l’art. 24 al. 4 p-LAsi comme suit:

« La durée du séjour dans les centres de la Confédération ne dépasse pas 140 jours. Le séjour peut être prolongé de 5 jours si une clôture rapide de la procédure d’asile le requiert. L’attribution à un canton survient si la procédure n’a pu être achevée au terme des 140 jours ou au plus des 145 jours. Le Conseil fédéral règle les modalités de prolongation de la durée maximale de séjour dans les centres de la Confédération. »

Art. 26 Phase préparatoire Les délais prévus semblent bien trop courts pour achever la récolte de toutes ces informations.Il faut également tenir compte du fait que les demandeurs d’asile qui viennent d’arriver en Suisse ont besoin d’un temps d’adaptation avant de se soumettre à l’ensemble des mesures prévues dans la phase préparatoire et dans la procédure accélérée. Les populations concernées arrivent pour la plupart au terme d’une fuite éprouvante, durant laquelle toutes leurs ressources ont été mobilisées. Les intéressés devront en plus subir une série d’entretiens dont le contenu risque de devenir très confus pour eux, puisqu’ils concerneront tant les motifs de fuite, que l’évaluation de la demande et des entretiens en vue du retour. Dans le même temps, et s’ils n’ont pu, comme c’est le cas de la plupart des demandeurs d’asile, arriver en Suisse avec un dossier complet, ils devront comprendre les compléments documentaires et informatifs qu’ils doivent impérativement déposer pour voir leur demande aboutir, et les faire venir de leur pays ou de leur lieu de fuite. 

Le risque est donc grand qu’au terme de cette phase préparatoire, les éléments essentiels à la demande d’asile n’aient pu être valablement réunis dans des conditions équitables, ce qui conduira à de mauvaises décisions de la part de l’ODM. En conséquence, cette situation entraînera de façon prévisible l’augmentation des procédures de réexamen et de recours, réduisant à néant les bénéfices éventuels attendus de cette procédure en matière de délai de traitement des demandes d’asile.

 

Enfin, les obligations des Etats dans le cadre des procédures Dublin ont été revues à la hausse, tant du fait de l’application de Dublin III que du fait de la jurisprudence de la CourEDH (arrêt Tarakhel). Un délai de 10 jours ne laissera pas à l’administration le temps de procéder aux clarifications nécessaires.

 

Les CSP proposent de modifier l’art. 26 al. 1 p-LAsi de la façon suivante :

« La phase préparatoire commence lors du dépôt d’une demande d’asile. Elle dure au plus 30 jours pour toutes les procédures. Ces délais peuvent, sur demande du requérant ou de son représentant légal, être prolongés, lorsqu’il apparaît que des éléments déterminants pour la demande d’asile ne peuvent être établis pour de justes motifs dans le délai prévu. »

Art. 37 Délais concernant la procédure de première instance Les délais prévus sont extrêmement courts et l’administration sera la première à avoir de la peine à les tenir. Toutefois les CSP pensent que c’est bien à l’administration d’assumer les conséquences de l’accélération qu’elle entend mettre en place, et non aux réfugiés présumés. Ainsi, l’art. 37 al. 4 prévoit que la décision est prise dans les deux mois qui suivent la fin de la phase préparatoire. Il conviendrait d’appuyer ce principe pour éviter que des réfugiés présumés restent plusieurs mois voire années sans décision sur leur demande, comme c’est le cas aujourd’hui. En effet le délai d’attente d’une décision, de par l’incertitude qu’il provoque et l’absence de statut stable, nuit au processus d’intégration des réfugiés présumés.Les CSP proposent de modifier l’art. 37 al. 4 p-LAsi de la façon suivante :« Dans une procédure étendue (art. 26d), la décision est prise dans les deux mois qui suivent la fin de la phase préparatoire. Si la décision n’a pas été prise dans un délai d’une année suivant la fin de la phase préparatoire, le requérant reçoit une réparation pour les torts et préjudices subis dans la mesure où il obtient ultérieurement une protection. Le Conseil fédéral fixe les modalités de cette réparation. »
Art. 82 al. 2bis Le terme de « moratoire général relatif aux décisions en matière d’asile et à l’exécution du renvoi » apparaît à notre connaissance pour la première dans la LAsi. Cette appellation correspond selon notre compréhension au régime appliqué par exemple aux demandeurs d’asile déboutés tamouls du Sri Lanka, pour lesquels l’exécution du renvoi a été suspendue suite à deux cas de personnes récemment arrêtées et emprisonnées à leur sortie de l’avion. Il serait peu clair que de tels moratoires se prolongent indéfiniment. Ceci peut se régler soit par l’octroi d’une admission provisoire au bout d’une année sur la base du constat de l’impossibilité du renvoi (art. 83 LEtr qu’il conviendrait peut-être d’amender dans ce but), soit par le recours à la protection provisoire (art. 66 à 73 de la LAsi – jamais utilisés à ce jour).A minima la formule du présent projet doit être modifiée pour obliger les cantons à verser l’aide sociale aux personnes faisant l’objet d’un tel moratoire. En effet la logique de l’aide d’urgence est de pousser des personnes censées quitter le pays à entreprendre un retour volontaire. Or ici, précisément, l’exécution du renvoi fait l’objet d’un moratoire, pour des raisons qui excluent également toute démarche en vue d’un retour volontaire. L’octroi de l’aide sociale se justifie d’autant plus qu’un moratoire est une décision politique pour laquelle le demandeur d’asile débouté ne saurait être tenu responsable et donc être pénalisé. 

Les CSP proposent de modifier l’art. 82 al.2bis p-LAsi de la façon suivante :

« Les cantons doivent octroyer l’aide sociale pour les personnes visées aux al. 1 et 2 pendant la durée d’un moratoire général relatif aux décisions en matière d’asile et à l’exécution du renvoi, si le DFJP le prévoit. L’indemnisation est régie par l’art. 88, al. 2. »

Art. 102i al. 5 Tâches du prestataire Le fait que le prestataire soit une œuvre d’entraide devrait suffire à assurer une certaine qualité.L’indépendance des représentants légaux et du prestataire constitue une condition sine qua non de la mise en place d’une véritable protection juridique. Les organisations et les représentants légaux qui défendent les demandeurs d’asile doivent pouvoir continuer à travailler dans une logique de défense des réfugiés présumés, et engager toute procédure utile à la défense des dossiers, quoi qu’en pensent les autorités. Le seul fait que la Confédération verse une indemnisation du montant de son choix au prestataire de son choix la place déjà dans une relation de pouvoir asymétrique vis-à-vis du prestataire et des représentants légaux.Le message précise : « Dans le cadre du contrôle de la qualité, il convient de veiller à limiter la représentation juridique dans des procédures de recours aux cas qui ne sont pas d’emblée voués à l’échec. » Mais c’est le TAF qui décide de qualifier un cas voué à l’échec ou non avant de rendre sa décision. Même dans cette situation, il arrive régulièrement que des cas que le TAF estimait voués à l’échec finissent par obtenir gain de cause.

 

Via le « contrôle de qualité », l’administration cherche à s’approprier un nouveau pouvoir en s’inventant le droit de dicter aux représentants légaux quels cas doivent faire l’objet de recours ou non. C’est une atteinte profonde à l’indépendance du prestataire et des représentants légaux, pour qui la défense des intérêts des demandeurs d’asile devrait être la seule préoccupation.

 

Les CSP proposent de modifier l’art. 102i al. 5 p-LAsi de la façon suivante :

« Le prestataire et le SEM procèdent à un échange d’informations régulier, en vue notamment de coordonner les tâches et d’assurer la qualité. »

Art. 108 al. 1 Délais de recours L’article 108 alinéa 1 p-LAsi prévoit une réduction des délais de recours de 30 à 7 jours dans le cadre des procédures accélérées. Les procédures en première instance dépassent aujourd’hui plusieurs centaines de jour. Si l’accélération des procédures n’est en soi pas une mauvaise chose, il semble en revanche inutile et dommageable d’économiser vingt jours sur le délai de recours, dernier moment dans la procédure d’asile au cours duquel le requérant peut faire valoir ses droits.La nature d’une décision en procédure accélérée demeure pour l’heure confuse : elle comprendra des éléments de forme, de fond, ainsi que les éléments qui ont amené le SEM à considérer le cas comme relevant de la procédure accélérée et non étendue. Dès lors, il est pour l’heure difficile de savoir quels griefs pourront être invoqués devant le TAF. Mais ces recours seront assurément, dans un certain nombre de cas, complexes, et porteront, dans un certain nombre de cas, sur la vraisemblance des motifs allégués et la discussion autour des moyens de preuve. Dans ces cas il s’agit de discuter l’usage fait par l’autorité de son pouvoir d’appréciation, et de telles argumentations demandent du temps pour être étayées. 

Dès lors une réduction des délais de recours est inadéquate. En effet la procédure d’asile est une procédure qui nécessite des délais adaptés à sa complexité, au vu de l’importance des biens juridiques qu’elle protège et de la vulnérabilité particulière des personnes qu’elle concerne.

 

L’expérience des personnes qui conseillent aujourd’hui les demandeurs d’asile démontre que des délais insuffisants conduisent inévitablement à la démultiplication des procédures de réexamen par la suite, si le requérant n’a par exemple pas eu suffisamment de temps pour faire venir des moyens de preuves ou autres documents nécessaires à l’établissement des faits. Dès lors, accélérer la procédure ne peut se faire sans des délais de procédure et de recours adéquat.

 

Les CSP proposent de modifier l’article 108 alinéa 1 p-LAsi de la façon suivante :

« Dans la procédure accélérée, le délai de recours, qui commence à courir dès la notification de la décision, est de trente jours pour les décisions prises en vertu de l’art. 31a, al. 4, et de dix jours pour les décisions incidentes. »

 

Pour toute question sur ce document, contacter Aldo Brina, chargé d’information sur l’asile des CSP, aldo.brina@csp-ge.ch , 022 807 07 00

[1] DFJP, Rapport sur des mesures d’accélération dans le domaine de l’asile, 11 mars 2011