Tribunal fédéral | Avances de frais auprès des requérants MNA
Dans un arrêt du 16 octobre 2017 le Tribunal fédéral enjoint le Tribunal administratif fédéral de renoncer en règle générale à percevoir des avances de frais dans le cadre de recours déposés par des requérants d’asile mineurs non accompagnés. La pratique actuelle consistant à exiger des avances de frais dans de telles situations restreint de manière inadmissible l’accès à la justice.
Retrouvez ci-dessous le communiqué de presse du Tribunal fédéral du 14 novembre 2017.
L’arrêt est accessible sur www.tribunal-federal.ch : Jurisprudence > Jurisprudence (gratuit) > Autres arrêts dès 2000 > entrer 12T_2/2016.
Arrêt du 16 octobre 2017 (12T_2/2016)
Renonciation à percevoir des avances de frais auprès de requérants d’asile mineurs non accompagnés
Un ressortissant érythréen, âgé de 15 ans au moment de son entrée non accompagnée en Suisse, a déposé une demande d’asile en 2014. Il a formé un recours auprès du Tribunal administratif fédéral contre le rejet de sa requête d’asile. Le Tribunal administratif fédéral a rejeté sa demande d’assistance judiciaire gratuite au motif que le recours était dénué de chances de succès. Il a en conséquence demandé, en 2016, au requérant le paiement d’une avance de frais fixée à Fr. 900.–. Comme le recourant n’a pas payé le montant réclamé dans le délai imparti qui avait été prolongé par le Tribunal, celui-ci a déclaré le recours irrecevable. Une fondation a adressé au nom du requérant une dénonciation au Tribunal fédéral en sa qualité d’autorité de surveillance des Tribunaux fédéraux de première instance.
La Commission d’administrative du Tribunal fédéral en sa qualité d’autorité de surveillance n’a pas vocation à traiter de cas d’espèces et donc à se prononcer sur des jugements rendus par les Tribunaux fédéraux de première instance. En matière de jurisprudence, sa compétence se limite en substance à constater que les mécanismes de nature administrative d’un Tribunal fédéral de première instance créent des obstacles insurmontables ou difficilement justifiables à l’accès à la justice. En l’espèce, le Tribunal fédéral considère que la dénonciation est partiellement fondée. Il enjoint le Tribunal administratif fédéral de modifier sa pratique et de renoncer en règle générale à l’avenir à percevoir des avances de frais auprès de mineurs non accompagnés dans le cadre de la procédure d’asile. La pratique du Tribunal administratif fédéral consistant à percevoir une avance de frais auprès de requérants d’asile mineurs non accompagnés lorsque leur requête d’assistance judiciaire gratuite est rejetée, se base sur une décision de 2002 de l’ancienne Commission suisse de recours en matière d’asile. Il en résulte que l’exigence du versement d’une avance de frais ne relève pas, dans la présente cause, d’un cas particulier, mais bien d’une pratique constante arrêtée aux seules fins de réduction de la charge de travail du Tribunal fédéral administratif. Un tel mécanisme fonde la compétence de la Commission administrative du Tribunal fédéral.
Selon la Loi sur la procédure administrative (article 63 alinéa 4 PA), l’autorité de recours peut renoncer à percevoir une avance de frais si des motifs particuliers le justifient. De tels motifs existent en règle générale dans les procédures d’asile concernant des requérants mineurs non accompagnés. Le droit interne connaît toute une série de lois spécifiques aux mineurs qui prennent en compte leur situation particulière. Par exemple, selon la Loi sur l’asile, les demandes d’asile des requérants mineurs non accompagnés doivent être traitées en priorité. Sur le plan international, la Convention des Nations Unies relative aux droits des enfants met aussi en avant le besoin d’une protection spéciale des enfants, en particulier s’agissant de leurs assurer une protection juridique appropriée. Les états parties sont tenus de prendre les mesures appropriées pour que les enfants qui cherchent à obtenir le statut de réfugiés ou sont considérés comme tels, bénéficient des droits qui leurs sont reconnus. La procédure d’asile ne relève pas de mécanismes portant sur des bagatelles. Les enjeux qui en résultent ont trait au respect de l’intégrité physique et psychique des personnes concernées, respectivement à leur droit à la dignité, voire même à la vie. Dans un tel contexte, exiger des avances de frais de mineurs non accompagnés se révèle une mesure restreignant de manière démesurée l’accès à la justice. Sous réserve de situations spéciales, notamment en présence de mineurs disposant de fortune personnelle ou d’autres ressources avérées, il conviendra dès lors à l’avenir de renoncer à percevoir des avances de frais.