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Notre regard

20 ans d’aide d’urgence | La fabrique des «débouté·es de l’asile»

ll y a 20 ans, l’État créait l’«aide d’urgence»

Image issue du travail photographique de Mathias Deshusses pour l’installation de Papier blanc (voir plus bas).

En 2004, dans le cadre de la Loi fédérale d’allégement budgétaire de la Confédération, le Conseil fédéral décide, pour réduire les dépenses dans le domaine de l’asile, de supprimer l’aide sociale des personnes frappées d’une décision NEM tout en leur interdisant de travailler. L’objectif est de les inciter à quitter la Suisse rapidement, par des conditions de vie fortement dégradées. Dans l’attente de ce départ «volontaire», ils ne peuvent prétendre qu’au minimum prévu par la Constitution suisse pour les personnes en détresse. C’est la naissance de l’«aide d’urgence».

Des mesures d’économie ?

Trois ans plus tôt, le Conseil fédéral avait pourtant appelé le peuple à rejeter une initiative de l’UDC affichant les mêmes objectifs d’économie en réduisant les montants d’aide sociale. Avec succès.

Le message du CF estimait alors que «la minimalisation des prestations d’assistance et l’exclusion du marché du travail pourraient entraîner une augmentation de la petite criminalité et que ces mesures seraient à la fois disproportionnées et extrêmement difficiles à mettre en œuvre n’étant pas de nature à réduire l’attrait de la Suisse comme terre d’asile, elles ne permettraient pas de réaliser des économies substantielles. Elles entraîneraient bien plus de dépenses supplémentaires.»

C’est pourtant dans le cadre de «mesures d’économies» qu’il instaure l’aide d’urgence, entrée en vigueur en 2004. Une mesure étendue en 2008 à toutes les personnes déboutées de leur demande d’asile. À quel prix ?

Elise Shubs (EPER)

Cet article introduit le dossier consacré aux 20 ans de l’aide d’urgence paru dans dans le numéro 199 de la revue asile.ch (septembre 2024).

Exposition | «Papier blanc», une installation pour une prise de conscience

Pour marquer les 20 ans de l’entrée en vigueur de ce régime de l’aide d’urgence, le Service d’aide juridique aux exilé·es (SAJE) de l’EPER à Lausanne, en partenariat avec Point d’Appui, souhaite sensibiliser le grand public aux conditions de vie méconnues des personnes qui subissent cette loi. Nous avons développé une installation visuelle et sonore sous la forme d’une expérience immersive intitulée «Papier blanc». Elle rend compte des conditions d’hébergement précaires des personnes à l’aide d’urgence. Notre installation sera inaugurée lors de la Nuit des musées à Lausanne le 21 septembre au Palais de Rumine.

Nous avons dupliqué l’intérieur d’une réelle chambre 5 m/3 m d’un foyer d’aide d’urgence dans laquelle deux personnes vivent depuis 6 ans. En entrant dans cet espace étriqué et peu éclairé, dans lequel raisonne des témoignages de personnes à l’aide d’urgence, les visiteur·euses peuvent se rendre compte de la promiscuité et des conditions de vie. Sur l’extérieur de la structure, le travail photographique du juriste du SAJE Mathias Deshusses qui a documenté les conditions d’hébergements des personnes à l’aide d’urgence est exposé accompagné de citations et témoignages et d’un texte explicatif sur l’aide d’urgence.

Cette structure mobile se veut itinérante. N’hésitez pas à vous mettre en contact avec nous si vous souhaitez l’accueillir!

Le dispositif a été installé au Palais de Rumine, à Lausanne, dans le cadre de la nuit des musées. L’évènement a rencontré un franc succès, avec plus de 12’500 visiteur·euses, et donné lieu à des échanges puissants. Ci-dessous, quelques photos prises à cette occasion.

EPER Lausanne | elise.shubs@eper.ch

Photo prise depuis l’intérieur de la chambre reconstituée.
Extérieur de la chambre.
Extérieur de la chambre.