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Comptoir

Regroupement familial pour permis B, C et F: conditions, difficultés et enjeux

Elodie Feijoo, responsable du Comptoir des médias chez asile.ch

Le regroupement familial se retrouve une fois de plus au cœur de l’actualité politique et médiatique. Les motions 24.3511 et 24.3057, intitulées « Pas de regroupement familial pour les personnes admises à titre provisoire » seront à nouveau débattues le 18 décembre par le Conseil des États lors de la session parlementaire d’hiver. Présenté comme un instrument de politique migratoire par certain·es et comme un levier d’intégration par les autres, le regroupement familial est un mécanisme permettant à des membres de la famille de rejoindre un·e proche déjà installé·e dans le pays afin de maintenir l’unité familiale. Lors du point presse du 21.11.24, nous avons cherché à mieux comprendre les conditions, difficultés, et enjeux du regroupement familial avec trois intervenant·es aux expertises complémentaires.

Présentation des intervenant·es

  • Mélinda Dinh, doctorante à l’Institut de démographie et socioéconomie de l’Université de Genève et associée au nccr – on the move
  • Marc Baumgartner, directeur d’elisa-asile, association offrant des conseils juridiques gratuits en matière d’asile et spécialisée dans le regroupement familial, et chercheur associé au nccr – on the move
  • Zaid Habte, réfugié d’origine érythréenne ayant mené une procédure de regroupement familial pour réunir sa famille

Éléments abordés lors du point presse

Après une présentation du cadre légal et des conditions du regroupement familial en Suisse, Mélinda Dinh s’est focalisée sur les obstacles à l’intégration professionnelle des partenaires. Celles-ci (70% de personnes issues du regroupement familial sont des femmes) risquant de perdre leur permis en cas de divorce ou de dépendance à l’aide sociale, elles ne font donc souvent pas appel à l’aide sociale et aux mesures d’accompagnement qui y sont liées. Ne faisant pas partie du public-cible prioritaire des programmes d’intégration cantonaux, peu de mesures leur sont destinées et elles font face à un risque élevé de déqualification. Parmi les suggestions évoquées: des mesures plus flexibles et adaptées aux besoins de ce public (majoritairement féminin, hautement diplômé) et une plus grande implication des employeurs.

Marc Baumgartner a axé sa présentation sur les personnes admises provisoirement (titulaires d’un permis F). Il a d’abord clarifié le fait que les réfugié·es de guerre en Suisse reçoivent généralement un permis F, et non un permis B réfugié, malgré des besoins similaires et un besoin de protection internationale reconnu. L’admission provisoire n’a de provisoire que le nom; le séjour en Suisse est bien souvent durable. 45’000, c’est le nombre de titulaires du permis F en Suisse. Pourtant, seules 108 autorisations de regroupement familial ont été délivrées par an au cours des dernières années. La raison? Des conditions difficiles à remplir (indépendance financière, langue, appartement adéquat), une notion restrictive de la famille, des délais d’attente et de prescription. Les membres de la famille doivent ensuite se rendre dans une ambassade spécifique, choisie par la Suisse: Les Erythréens et les Soudanais doivent pas exemple se rendre au Kenya, alors qu’il y a une ambassade en Ethiopie. Le directeur d’elisa-asile a rappelé que les motions qui seront discutées le 18 décembre sont contraires au droit, notamment à la Convention de l’ONU relative aux droits de l’enfant.

Zaid Habte a partagé son expérience de la procédure de regroupement familial qu’il a lui-même menée; sa procédure a duré cinq ans et il vient d’être réuni avec sa famille. Il a décrit l’inquiétude de savoir sa femme enceinte au Soudan lors de l’éclatement de la guerre, la difficulté des démarches administratives qu’il a dû mener, ainsi que le coût financier élevé – non seulement des démarches administratives, mais également du voyage de sa famille.

Retrouvez ci-dessous l’enregistrement audio du point presse migrations ainsi que les slides de Mélinda Dinh.

Enregistrement Audio: Suite à un souci technique, seul l’enregistrement audio du point presse est disponible:

Slides de Mélinda Dinh

Les points presse migrations (PPM) sont une collaboration du nccr – on the move et du Comptoir des médias, dont l’objectif est de permettre le dialogue et la connaissance entre le monde des médias, la recherche scientifique et les professionnel·les du terrain.

© Image d’illustration de l’article: photo de Volodymyr Hryshchenko sur Unsplash